Le président syrien Bachar al-Assad s'est dit dimanche déterminé à lutter contre la révolte qui secoue son régime depuis près de 15 mois, accusant de nouveau l'étranger de mener une "guerre" contre la Syrie, dans son premier discours depuis janvier. M. Assad, resté sourd aux appels à cesser la violence, a en outre démenti tout lien de ses forces avec le massacre de Houla qui a provoqué un tollé international, et écarté tout dialogue avec l'opposition liée à l'étranger, dans ce discours de plus d'une heure prononcé devant le nouveau Parlement. La communauté internationale a multiplié ces derniers jours les mises en garde contre une guerre civile ouverte en Syrie, même si elle est divisée sur la façon de régler le conflit. Le cessez-le-feu est préconisé dans le plan de sortie de crise du médiateur de l'ONU et de la Ligue arabe Kofi Annan qui est resté lettre morte, le régime continuant de réprimer dans le sang la révolte et les combats entre soldats et rebelles s'intensifiant avec des dizaines de victimes tous les jours. Devant les députés issus des élections du 7 mai organisées en pleine violence et boycottés par l'opposition, M. Assad a martelé que son pays faisait face à un "plan de destruction" et "à une véritable guerre menée de l'étranger", se posant comme un rempart contre le "terrorisme qui augmente". Ne reconnaissant pas le mouvement de révolte assimilé à du "terrorisme", il a souligné que son régime avait en vain "essayé tous les moyens politiques" pour sortir de la crise. Mais ceux responsables du "terrorisme ne sont pas intéressés par le dialogue ou les réformes. Ils sont chargés d'une mission et ne s'arrêteront que s'ils l'accomplissent ou si nous arrivons à les arrêter". Mais, a-t-il assuré, "il n'y aura pas de compromis dans la lutte contre le terrorisme et ceux qui le soutiennent. La sécurité de la nation est une une ligne rouge". M. Assad a écarté tout dialogue avec les opposants liés à l'étranger, en allusion notamment au Conseil national syrien (CNS), la principale composante de l'opposition, basé à l'étranger, qui refuse à son tour tout dialogue avant un départ de M. Assad. Au début de son discours, M. Assad a rendu hommage à "tous les martyrs, civils ou militaires", ajoutant que leur "sang n'aura pas coulé en vain". Il a souligné que ceux ayant commis le carnage de Houla (centre), dans lequel 108 personnes dont 49 enfants ont été massacrés le 25 mai, étaient des "monstres", et rendu un hommage appuyé à l'armée. La rébellion et le régime se sont rejeté la responsabilité du massacre, alors qu'un haut responsable de l'ONU a dit que "de forts soupçons" pesaient sur les milices pro-régime. Une enquête internationale indépendante a été ouverte. M. Assad, dont la famille est au pouvoir depuis quatre décennies, est intervenu rarement en public depuis le début de la révolte le 15 mars 2011, et à chaque fois il a évoqué "un complot de groupes terroristes tramé avec l'étranger" pour semer le chaos en Syrie. Plus de 13.400 personnes ont été tuées en près de 15 mois, en majorité des civils morts dans la répression, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). La révolte populaire s'est militarisée au fil des mois face à la répression. Les violences continuent de tuer malgré la présence de près de 300 observateurs de l'ONU censés surveiller un cessez-le-feu proclamé le 12 avril en vertu du plan Annan et systématiquement violé. Samedi, 89 personnes ont encore été tuées, dont 57 soldats, selon l'OSDH, le bilan le plus lourd pour l'armée régulière en une journée depuis mars 2011. Mais ce bilan n'a pu être confirmé de source indépendante ou par le régime. Dimanche, trois civils ont péri à Alep (nord) et Hama (centre) par des tirs et dans un pilonnage, selon l'OSDH. Face à l'escalade, le chef de la diplomatie saoudienne Saoud Al-Fayçal, dont le pays est très critique du régime syrien, a accusé M. Assad de "manoeuvrer" pour "gagner de temps". Il a dit à Jeddah que son pays "soutient la création d'une zone tampon en Syrie". Présent aussi à Jeddah, le patron de l'ONU Ban Ki-moon a dit avoir pris acte des demandes de la Ligue arabe de fixer un calendrier pour l'application du plan Annan et de recourir au Chapitre VII de sa charte pour imposer la rupture des liens diplomatiques et des sanctions à la Syrie. Il a dit souhaiter qu'elles soient "discutées par le Conseil de sécurité". Dans ce contexte de violences, l'organisation Human Rights Watch a appelé à "isoler" les groupes vendant des armes à Damas, comme la compagnie publique russe Rosoboronexport. "Fournir des armes à la Syrie alors que des crimes contre l'humanité y sont commis pourrait revenir à une assistance dans l'accomplissement de ces crimes". Au Liban voisin, où la révolte syrienne attise les tensions, 14 personnes ont été tuées depuis samedi à Tripoli (nord) dans des affrontements entre Libanais pro et anti-Assad.