Rocambolesque. Alors qu'il a été chassé par ses opposants de la salle Atlas de Bab El Oued, où devait se tenir le 3e congrès du parti, le président du Front national algérien (FNA) a déjoué tous les plans de ses adversaires et réussi à tenir son congrès sans autorisation à l'hôtel Matarès de Tipasa, où étaient hébergés les congressistes qu'il avait invités. Après les échauffourées, les insultes et autres prises de bec entre opposants et partisans de Moussa Touati, des scènes invraisemblables ponctuées par la fermeture jeudi matin de la salle Atlas de Bab El Oued par les contestataires du FNA, tout le monde pensait que l'inamovible président du parti avait échoué devant ses adversaires et que le congrès était de fait reporté, une aubaine pour ses adversaires qui pouvaient ainsi affirmer «de plein droit» qu'un congrès extraordinaire s'impose. Peine perdue, puisque Moussa Touati, loin de s'avouer vaincu, a fait mine d'évacuer les lieux à 14h, prétextant «le respect de ses engagements», avant de se retrouver dans la soirée, à l'insu de ses adversaires qui ont pourtant promis «de le suivre partout et de l'empêcher», à l'hôtel Matarès de Tipasa où logeaient les 1300 congressistes qu'il a invités, pour organiser «un congrès en plein air», à l'issue duquel il a été réélu à l'unanimité. Fil des évènements. «Nous avons pris l'engagement avec la wilaya d'Alger de quitter la salle à 14 h pour permettre l'ouverture d'une manifestation culturelle», a-t-il déclaré jeudi à Alger pour justifier son «retrait», accablant au passage les services de sécurité qui ne se sont pas, à ses yeux, acquittés de leur tâche, à savoir préserver l'ordre. Accusant ses adversaires, notamment les députés, «qui ont usé de leur immunité parlementaire» pour entraver «sans gêne» les travaux du congrès, Moussa Touati a ainsi quitté les lieux, promettant de tenir son congrès «coûte que coûte». Ses adversaires qui avaient procédé, il y a une semaine à Djelfa, au retrait de confiance à Moussa Touati, criaient alors victoire et assuraient que Touati n'est plus «dès aujourd'hui» président du FNA. «Sur le plan organique, à partir d'aujourd'hui, Touati n'est plus président du FNA puisqu'il devait remettre son mandat en jeu aujourd'hui», précisait l'ancien député Abdelkader Bendrihem. Croyant à une première victoire qui allait être ponctuée par la destitution de Touati lors d'un prochain congrès extraordinaire qu'ils ne cessent de revendiquer (une demande d'autorisation a été déposée au niveau du ministère de l'Intérieur), les contestataires qui affirment avoir au sein de leur mouvement la majorité des membres du conseil national, des bureaux de wilaya et du bureau national, mettent en avant «l'illégalité» de la procédure de Moussa Touati qui ne les a pas invités en tant que membres. «Je n'ai pas besoin d'une autre autorisation». Entre-temps, le président du parti n'a pas perdu son temps. Il s'est dirigé vers le lieu d'hébergement de ses «invités» et s'est empressé de tenir son congrès, prenant ainsi de court ses adversaires. «Dans l'impossibilité de le faire à Alger après tout ce qui s'est passé, nous avons tenu notre congrès à l'hôtel Matarès», nous a confirmé hier Moussa Touati. «Les 1300 congressistes m'ont élu président et un conseil national de 144 membres a été également élu», ajoutera notre interlocuteur avant de préciser que «le temps ne nous a pas permis d'aborder d'autres points à l'ordre du jour à l'instar des modifications qui devaient être portées au statut du parti». «Ces points seront abordés lors de la conférence nationale des cadres qui aura lieu incessamment», précisera Touati qui refusera de répondre à notre question sur l'autorisation de la tenue du congrès à Tipasa. «Pourquoi insistez-vous ? tonne-t-il avant de lâcher : «Nous considérons que nous disposons d'une autorisation», dit-il, allusion faite à l'autorisation concernant la salle Atlas. «C'est la même instance (l'Intérieur) qui autorise, alors nous sommes en règle», ajoute-t-il. «La wilaya de Tipasa lui a refusé l'autorisation», soutient Mohamed Brahimi, un des contestataires, dans une déclaration au Temps d'Algérie, affirmant que son pseudo congrès a été tenu dans la cour de l'hôtel. «Une première dans l'histoire du parti. C'est illégal», dit-il, affirmant que Touati a invité des gens qui n'ont rien à voir avec le parti. «Des touristes venus de Blida et Tablat pour la plupart», ajoute notre interlocuteur, révélant que des exclus du parti ont pris part à la rencontre. «Nous disposons de noms», soutient-il. Il faut noter à ce propos que le même argument (exclusion des rangs du parti) est utilisé par Moussa Touati pour accabler ses opposants. «Dans l'immédiat, nous allons intenter une action en justice contre Touati», explique encore la même source, rappelant que les statuts du parti stipulent que tous les membres doivent être invités. «Il ne nous a pas invités au congrès. Comment a-t-il fait pour inviter ses congressistes alors que le conseil national ne s'est pas réuni depuis une année ?» s'interroge Mohamed Brahimi. «Nous allons utiliser toutes les voies légales pour le destituer et reprendre les rênes du parti», assène Brahimi qui regrette que l'Intérieur ait accordé une première autorisation pour un homme «autoproclamé». Il rappellera dans ce sillage la demande introduite auprès des services de l'intérieur pour la convocation d'une session extraordinaire du conseil national, promettant dans le cas où leur démarche aboutit «d'inviter tout le monde». Le feuilleton FNA risque de perdurer, les protestataires promettant de revenir à la charge.