Les musulmans de l'ensemble du Proche-Orient ont salué dimanche l'élection du candidat des Frères musulmans Mohamed Morsi à la présidence égyptienne, tandis que les pétromonarchies du Golfe ont, elles, réagi avec prudence. Suivie de près de la bande de Gaza jusqu'au Golfe, la victoire de Mohamed Morsi sur l'ancien général Ahmed Chafik a été interprétée comme un événement historique aux conséquences importantes débordant au-delà des frontières de la seule Egypte. "La nation égyptienne n'a pas élu un président pour la seule Egypte, mais pour les pays arabes et musulmans également", a estimé Faouzi Barhoum, porte-parole du mouvement radical palestinien Hamas, au pouvoir dans la bande de Gaza, où certains espèrent que Morsi mettra peut-être fin à la coopération du Caire au blocus israélien du territoire côtier. Considérant la victoire de Morsi à travers le prisme du "printemps arabe" qui a fait tomber les dirigeants de Tunisie, de Libye et du Yémen mais aussi d'Egypte, les islamistes ont dit penser que la victoire du candidat des Frères musulmans prouvait que leur "révolution" était en marche. "Mohamed Morsi est président d'Egypte, Dieu soit loué!", a déclaré Mohamed al Kahtani, cofondateur de la Fédération saoudienne des droits civiques et politiques (ACPRA), organisation qui milite en faveur de la démocratisation. "C'est une victoire pour les révolutions arabes", a-t-il dit sur Twitter. En Arabie saoudite, premier producteur mondial de pétrole, les autorités sont restées silencieuses après l'annonce de la victoire de Morsi. Les relations entre les Frères musulmans et le pouvoir saoudien ne sont pas bonnes, nombre de responsables saoudiens accusant la confrérie de soutenir des revendications de changements politiques au sein du royaume. La Turquie a estimé que la victoire de Morsi reflétait la volonté du peuple égyptien, mais a souligné qu'il lui restait à faire ses preuves. "Des tests importants attendent le nouveau président qui conduira le peuple égyptien vers la démocratie libre et pluraliste qu'il mérite", a déclaré le ministère des Affaires étrangères à Ankara. A Téhéran, le ministère iranien des Affaires étrangères a félicité le peuple égyptien pour avoir choisi comme président Mohamed Morsi, une victoire où Téhéran voit l'une des dernières étapes du "Réveil islamique". "Le mouvement révolutionnaire du peuple égyptien (...) est dans la phase finale du 'Réveil islamique' qui va ouvrir une ère nouvelle au Proche-Orient", écrit le ministère dans un communiqué rapporté par l'agence de presse Isna. Dans l'ensemble des pays arabes du Golfe, les réactions sont en revanche restées prudentes. Aux Emirates arabes unis (EAU), l'agence de presse WAM a écrit que le gouvernement émirati respectait "le choix des Egyptiens dans le contexte de sa marche vers la démocratie". Dahi Khalfan, chef de la police de Dubaï, s'est montré plus sceptique. "Un choix malheureux", a-t-il dit dans un tweet. L'agence de presse officielle de Bahreïn a rapporté que le roi Hamad avait félicité Mohamed Morsi, saluant un "climat de liberté et de démocratie" en Egypte, tandis que le ministre jordanien de l'Information, Samih al Maaïtah, disait son espoir de voir le nouvel élu garantir la stabilité de son pays. En Algérie, Atef Kedadra, journaliste de renom au journal El Khabar, a estimé que la victoire de Morsi avait une énorme portée symbolique, mais, a-t-il ajouté, le nouveau président devra faire montre d'un esprit d'ouverture. "S'il ne nomme que des islamistes, il ira à sa perte, car les islamistes n'ont pas l'habitude de diriger". Catherine al Talli, défenseur syrienne des droits de l'homme, voit dans les événements d'Egypte matière à encourager l'opposition en lutte en Syrie contre le régime du président Bachar al Assad. Le Conseil national syrien (CNS, qui représente l'opposition), est du même avis, estimant que la victoire de Morsi est "une source d'espoir pour le peuple rebelle syrien".