Le conflit gazier entre Moscou et Kiev s'est encore aggravé hier. Dans un climat glacial, la pénurie du gaz commence à toucher d'autres pays européens, à l'exemple de l'Italie et de la France. Des négociations entre la Russie et ses partenaires européens sont annoncées pour aujourd'hui à Bruxelles, a affirmé le président de la compagnie russe Gazprom, Alexeï Miller. Le différend gazier a pris, en effet, des dimensions alarmantes. En cette période hivernale, caractérisée par une forte consommation du gaz, les pays européens sont confrontés à un froid exceptionnel. L'on s'achemine vers une véritable rupture de stocks. Le groupe italien ENI qui est le plus gros fournisseur de gaz de la Péninsule, a annoncé hier qu'il ne reçoit plus de gaz russe depuis 01h (00h GMT). Les autorités italiennes ont fait de la disponibilité de «très hauts niveaux de stockage» et annoncé avoir cependant pris les mesures nécessaires «pour maximiser les livraisons en provenance d'autres pays fournisseurs comme la Libye, l'Algérie, la Norvège, la Grande-Bretagne et les Pays-Bas». La France a été à son tour touchée par le conflit gazier russo-ukrainien, subissant une chute de près de 70 % de ses approvisionnements en gaz russe. Les livraisons de gaz naturel russe à la Roumanie ont été totalement interrompues hier matin, a annoncé la compagnie roumaine de transit Transgaz. Pays frontalier de l'Ukraine, la Roumanie importe de Russie un tiers du gaz qu'elle consomme, soit environ 6 milliards de mètres cubes de gaz par an. Le gouvernement bulgare a imposé pour sa part hier des restrictions de la consommation de gaz aux grandes entreprises du pays après la brusque coupure des livraisons de gaz russe aux Balkans. Le gouvernement a appelé dès mardi tous les consommateurs à réduire au maximum leur consommation de gaz et deux entreprises chimiques ont stoppé leur production. La Bulgarie est, avec la Slovaquie, la Bosnie et la Macédoine, l'un des pays d'Europe continentale qui dépendent quasi entièrement des livraisons de gaz russe via l'Ukraine. L'Ukraine a été contrainte de recourir au mazout pour se chauffer. Pour la compagnie russe, Gazprom, l'Ukraine est seule responsable de cette situation. Le numéro deux du géant gazier russe Gazprom, Alexandre Medvedev, a accusé hier à Berlin l'Ukraine d'avoir coupé toutes les livraisons de gaz vers l'Europe, ce qui selon lui présente des «problèmes techniques sérieux» pour les gazoducs. La Russie, qui a coupé jeudi les fournitures de gaz à l'Ukraine, faute d'un accord sur le prix des livraisons pour 2009, a accusé l'Ukraine de détourner du gaz en transit sur son territoire pour des clients européens. La Russie se dit «prête à discuter jour et nuit» avec Kiev pour régler le conflit sur le prix du gaz. Une réponse «plus ferme»
Le Premier ministre tchèque Mirek Topolanek, dont le pays préside l'Union européenne pour six mois, a averti hier à Prague à des journalistes, que «si les livraisons de gaz russe à l'Europe n'étaient pas rétablies d'ici demain, nous verrons une intervention plus ferme de la présidence et de l'UE». Le chef du gouvernement tchèque n'a pas précisé quelle forme pourrait prendre la réaction de l'UE, qui a demandé à nouveau hier dans un communiqué «une solution urgente» au contentieux gazier russo-ukrainien et une «reprise immédiate» de toutes les livraisons à l'Europe. Dans ce contexte, il y a lieu de rappeler que l'Algérie important fournisseur de gaz des pays européens, notamment l'Italie et l'Espagne, n'a pas usé de cette mesure de suspension des livraisons pour obtenir une augmentation des tarifs. Le contentieux gazier algéro-ibérique est encore en examen dans les instances du tribunal commercial de Genève. Le gaz algérien plus fiable est encore consommé à un prix bon marché.