Hier matin, les conducteurs de trains de la Société nationale des transports ferroviaires (SNTF) ont entamé un mouvement de grève en solidarité avec un des leurs menacé de licenciement suite à l'accident ferroviaire survenu, le 22 août 2011 à Boudouaou (Boumerdès) dans lequel un cadre de la société avait trouvé la mort. Devant le dépôt d'Alger, où devait se rassembler les grévistes, Haroun Boulemia, responsable de la section syndicale de ce corps, nous a indiqué que «ce mouvement était spontané et à défaut d'échos favorables, il risque de devenir illimité et à travers le territoire national». «Le conducteur incriminé devait être auditionné par une commission de discipline, mais des membres du comité de participation ont boycotté la commission pour décharger l'administration de toute responsabilité. Le conducteur est accusé d'être seul responsable de cet accident, sans tenir compte des conditions dans lesquelles il travaille» précise-t-il, ajoutant que les conducteurs de locomotives sont responsables de chaque accident, contrairement aux lois internationales. «Quand un train percute une personne. Le conducteur n'est pas responsable car arrêter un train demande du temps. Des accidents de ce genre ne sont pas imputables au conducteur mais à tout un environnement qui implique beaucoup d'autres personnes et responsables», a-t-il fait remarquer. «Les usagers n'ont jamais été en sécurité à bord des trains» Le matériel y est aussi pour beaucoup dans les accidents, soutiendra un autre syndicaliste, en relevant que tout n'est pas toujours conforme. «Les chemin de fer, c'est toute une culture, c'est une vitrine du tissu industriel. Dans notre pays, la gestion catastrophique du secteur a engendré de multiples failles et je vous le dis, l'usager algérien n'a jamais été en sécurité à bord des trains, il faut le savoir», s'alarme-t-il. A titre d'exemple, il nous a révélé que le train électrique a circulé pendant trois ans sans aucune norme sécuritaire et sans personnel qualifié. «Sur ce train, il devait y avoir un outil important, le GSMR, qui facilite la communication entre les différents trains et les postes de commandement. Mais faute de ce moyen, les trains étaient isolés dès leurs sorties des gares», a-t-il révélé, en ajoutant que pour y remédier des téléphones portables ont été distribué aux conducteurs, il y a seulement trois jours. «C'est très grave et inadmissible. Nous constituons un danger public à cause de l'administration qui ne veut pas investir dans le matériel adéquat», a déploré ce syndicaliste. Une assemblée générale, tenue le 19 septembre dernier, devait résoudre ces problèmes de matériel et des conditions de travail, mais l'administration a fait la sourde oreille. C'est d'ailleurs face à ce mépris, que cette grève, qui risque de durer a été aussi déclenchée. «Cette mobilisation a été aussi décidée pour interpeller le ministre des Transports afin qu'il examine le statut des conducteurs qui date de l'ère coloniale», nous a précisé M. Boulemia. «Nous voulons un statut particulier, nous travaillons neuf heures par jour. Imaginez quel est notre état psychologique avec cette charge de travail. Conduire un train est stressant, nous devons travailler dans de bonnes conditions pour éviter toute erreur humaine», souligne-t-il, ajoutant qu'il projette de créer d'ici peu l'Union des conducteurs de trains pour défendre leurs intérêts. L'administration surprise par la grève Noureddine Dakhli, directeur des ressources humaines de la SNTF, nous a indiqué être surpris par ce mouvement alors qu'il avait participé à l'assemblée du 19 septembre. «Ce mouvement dans la wilaya d'Alger a été conduit en dehors de tout règlement, alors que nous avons un canal de discussions avec les partenaires sociaux. Aussi, j'ai assisté à l'AG, j'ai écouté les doléances et j'ai répondu à quelques points mais sur certains nous n'étions pas d'accord. Cette réunion a duré cinq heures, les conditions de travail, la gestion des carrières, la formation ont été abordés. Je suis sorti de cette réunion satisfait et, aujourd'hui, je suis surpris. A l'heure où je vous parle, il n'y a toujours pas de plate-forme de revendications. Ils déclenchent un mouvement dont on ne connaît pas les causes», souligne-t-il, ajoutant que des sanctions seront prises. Concernant le service minimum, ce dernier nous indiquera que ce ne sont pas tous les employés qui sont en grève et que les grévistes ont été remplacés par leurs chefs de service. Les trains régionaux ont été assurés dans la matinée mais de fortes perturbations ont été relevées dans la journée.