La décision du Conseil des ministres de l'Union africaine de charger la Commission de l'Union africaine de prendre «toutes les dispositions» pour l'organisation d'un référendum d'autodétermination au Sahara occidental a été qualifiée, hier à Alger, «d'importante et historique» par le ministre sahraoui des Affaires étrangères, Mohammed Salem Ould Salek. Cette position a été prise au moment où le Maroc s'apprêtait à juger devant les tribunaux militaires des militants sahraouis, a déploré le chef de la diplomatie sahraouie lors d'une conférence de presse. M. Salem Ould Salek s'est félicité hier de la décision adoptée à l'unanimité par le Conseil des ministres de l'Union africaine en marge du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement de l'Union africaine (UA), tenu les 27 et 28 janvier dernier à Addis Abeba. Pour lui, cette décision exprime la volonté de l'Organisation continentale d'œuvrer pour le règlement du conflit ainsi que son attachement à la résolution 104, adoptée en 1983 à Addis Abeba par l'union continentale, portant sur l'organisation d'un référendum d'autodétermination du peuple sahraoui. «Au nom de la République sahraouie, je témoigne de notre disposition à travailler en étroite collaboration avec l'UA et à œuvrer à faciliter l'organisation du référendum», a-t-il dit en lançant un appel aux Nations unies, au Conseil de sécurité, en particulier à ses membres permanents, ainsi qu'à tous les autres acteurs, de prendre toutes les mesures nécessaires afin de s'assurer auprès de la partie marocaine de la tenue du référendum et de son bon déroulement». Cette décision signifie également que l'UA, partenaire de l'ONU dans la lutte contre l'occupation, ne peut plus rester les bras croisés face à la souffrance du peuple sahraoui. «Il s'agit d'un rappel à l'ordre émis par l'UA, partenaire des Nations unies, sur l'urgence de tenir le référendum qui permettra de mettre fin à la crise sahraouie dans le cadre de la légalité internationale», a déclaré M. Ould Salek, rappelant que le Sahara occidental est le dernier pays africain sous occupation et qu'il appartient à son peuple d'avoir le dernier mot sur son sort. Comparution de militants devant des tribunaux militaires Par ailleurs, le ministre sahraoui a également précisé qu'il a été porté à la connaissance de l'UA le rapport de la commission des droits de l'homme et des peuples africains sur l'état déplorable des droits de l'homme dans les territoires occupés du Sahara occidental, et ce, alors que le Maroc s'apprête à présenter 24 militants pacifistes sahraouis devant des tribunaux militaires. «Cela constitue une violation des traités et conventions internationaux. Le gouvernement sahraoui condamne fermement cet acte criminel qui constitue une preuve de plus des exactions de l'occupant marocain», a déclaré le ministre. «Nous lançons un appel urgent aux Nations unies, à l'UA, à l'Union européenne et à toutes les organisations de défense des droits de l'homme de faire pression sur le Maroc pour libérer tous les prisonniers politiques sahraouis, y compris ceux du camp Gdeim Izik, et de cesser tout acte de répression et de torture, ainsi que de se conformer au droit international et ne pas entraver la tenue du référendum», a-t-il déclaré. La répression des contestataires sahraouis ayant fait plusieurs morts et blessés a été très peu médiatisée. Les activistes ont dénoncé le meurtre et la disparition d'une dizaine de leurs compagnons. D'ailleurs, le gouvernement marocain a empêché les observateurs et les journalistes d'entrer dans les territoires, refusant ainsi l'ouverture d'une enquête internationale sur les faits, selon l'Observatoire international des droits de l'homme. Vingt-quatre militants sahraouis du camp de Gdeim Izik, détenus depuis deux ans et accusés du délit d'association de malfaiteurs et de plusieurs meurtres de membres de forces de l'ordre, a débuté le 1er février devant le tribunal militaire de Salé (Rabat). Ils risquent la peine de mort. Le deux poids, deux mesures de la France Concernant la situation au Sahel, le ministre sahraoui a estimé que la lutte contre le terrorisme et la stabilité dans la région devaient comprendre la fin du «terrorisme marocain» et la stabilité du Sahara occidental. «On ne peut s'engager dans la lutte contre le terrorisme dans la région avant de mettre fin au terrorisme qu'exerce le Maroc sur notre population depuis 1975, de même que l'instabilité de la région, pour nous, est nourrie par les répercussions de l'occupation», a-t-il indiqué en ajoutant que la lutte contre le terrorisme dans la région du Sahel et les efforts consentis pour garantir la stabilité devaient inéluctablement passer par la lutte contre le trafic de drogues et de stupéfiants de production marocaine pour un marché africain et européen, dans lequel des responsables marocains sont impliqués. Le ministre regrette une «certaine complaisance à l'égard du Maroc», visible notamment à travers le peu d'intérêt qu'accordent les médias à ce sujet. Sur la question du Sahel toujours, le ministre sahraoui a déclaré soutenir les efforts du Mali pour la préservation de son intégrité territoriale tout en dénonçant «le deux poids, deux mesures de la France». «La France défend le Mali dont l'intégrité territoriale est menacée alors qu'elle nie ce droit au peuple sahraoui», a estimé le ministre, regrettant la complaisance française à l'égard du Maroc. «La France joue un grand rôle dans l'évolution de la situation dans la région ; nous espérons d'elle un rôle positif qui aura des répercussions positives sur ses intérêts et ses relations avec les pays de la région», a-t-il déclaré.