Des parents d'enfants atteints de la maladie de phénylcétonurie, une maladie génétique rare, ont organisé hier un rassemblement devant le ministère de la Santé pour protester contre l'absence de prise en charge de leurs enfants et les fausses promesses des ministres qui se sont succédé à la tête du secteur. Cette maladie est responsable de troubles du cerveau entraînant un retard mental et une dégradation physique importante, handicapant l'enfant à vie. Détectée dès la naissance dans de nombreux pays qui s'astreignent au dépistage, elle peut être soignée si le traitement est administré à l'enfant dès son plus jeune âge. En Algérie, ce ne serait pas le cas, selon des bénévoles auprès des familles de phényls. «Dans notre pays, le dépistage n'est pas automatique alors qu'il l'est dans de nombreux pays développés. Nous recensons actuellement 444 cas sur tout le territoire, sans compter ceux qui ne sont pas encore diagnostiqués et tous les cas qui ne se font pas connaître. Donc, non seulement nos enfants sont diagnostiqués en retard mais en plus, la prise en charge est inexistante. En effet, nos enfants ont besoin d'une alimentation hyperprotéique et d'un lait spécial, le XP Maxamaid, qui coûte 15 000 DA la boîte, une fortune, et qui, de plus, n'est pas disponible dans toutes les pharmacies. Nous le trouvons surtout à Hussein Dey chez une pharmacienne qui nous connaît bien et qui ramène quand elle le peut ce lait», a expliqué une militante de cette association qui compte bien rendre visible le combat de ces familles. En effet, elle s'active sur les réseaux sociaux, son réseau amical et familial pour récolter chaque année une somme conséquente qui permet à l'association de distribuer les boîtes de lait. «Nous menons des campagnes sur facebook, nous mobilisons les algériens de l'étranger pour nous aider. Ce sont surtout des jeunes qui se mobilisent car ces familles en détresse ont besoin de notre aide. Personnellement, j'ai mon petit cousin qui est atteint de cette maladie et quand j'ai observé toutes les difficultés qu'ont rencontrées ses parents pour le soigner, j'ai décidé que ce serait également mon combat», a-t-elle affirmé. Un des parents a tenu à nous indiquer que l'association n'en n'était pas à son premier rassemblement. «C'est la quatrième fois que nous nous manifestons. A plusieurs reprises, nous avons eu droit à des promesses sans lendemain. On nous a promis le dépistage prénatal et la prise en charge effective de la maladie. Toutefois, rien n'a été fait, le dépistage n'est toujours pas automatique et la santé de nos enfants se dégrade de jour en jour. Ils ont tenté de nous faire taire en nous distribuant 3 à 4 boîtes de lait comme si nous étions des mendiants. C'est un échec car nous sommes des parents et nos enfants sont notre priorité ; nous ferons tout pour qu'ils puissent vivre comme les autres», a-t-il déclaré, déplorant par ailleurs que les analyses sanguines soient disponibles uniquement au niveau de l'hôpital Mustapha. De nouvelles promesses «Si mon fils avait été dépisté à la naissance, il aurait bénéficié d'un traitement jusqu'à ses 10 ans, puis il aurait vécu comme les autres enfants. Il faut savoir que la plupart des enfants atteints de cette maladie ne sont pas scolarisés car ils accusent un retard mental et physique qui va les entraver toute leur vie et qui est difficilement pris en charge dans les écoles. Chaque jour que Dieu faisait, je voyais la santé de mon enfant se dégrader. Il a aujourd'hui 20 ans et il n'est pas autonome, il aura des difficultés à construire son avenir. Je regrette vraiment qu'il soit né dans un pays qui ne l'a pas pris en charge», a déploré une mère de famille. En fin de matinée, on a décidé de recevoir 3 représentants des parents. Un responsable du cabinet du ministre leur a expliqué que ce dernier allait poursuivre sa campagne de dons de boîtes de lait auprès des personnes enregistrées au niveau des hôpitaux. Toutefois, il a indiqué que cette campagne ne pourrait perdurer au-delà de 3 mois, mais qu'en contrepartie, le ministère de la Santé s'engageait à prendre attache avec le ministère du Travail afin de demander l'inscription du lait au registre des médicaments remboursables. Il a également fait savoir aux représentants des familles que la phénylcétonurie sera classée maladie chronique, ce qui leur permettra d'être enregistrés à la Cnas et de disposer du traitement facilement. Toutefois, les familles ont un avis mitigé vis-à-vis de ces annonces, car d'ici 3 mois, «ce sera la période du Ramadhan et les promesses d'aujourd'hui seront vite oubliées ; on connaît la chanson. Tout ceci, c'est pour nous empêcher de manifester ; nous ne sommes pas dupes. C'est pour cela que nous comptons nous constituer en une vraie force et ce, en formant une association visible aux yeux de tous. Par la suite, nous organiserons des rassemblements du côté de la présidence et du Palais du gouvernement», a affirmé une autre jeune fille bénévole auprès des familles.