De terribles et tristes constats continuent d'être faits, des témoignages continuent aussi d'être rapportés quotidiennement par les personnes handicapées et leurs familles sur leur situation sociale. Particulièrement sur les difficultés d'adaptation et d'intégration liées à leur environnement et à leur prise en charge. Cette frange de notre population ne cesse d'exprimer le calvaire dans lequel elle vit. “Je suis paralysé depuis deux ans et, depuis cette date, j'essaie d'obtenir une pension de handicapé justifiée par un certificat médical établissant mon handicap à 100% par un médecin de la Cnas, mais, je n'ai rien eu”, nous révélera Amar, un homme de 70 ans, qui se déplace sur un fauteuil roulant. Malika est mère de quatre enfants handicapés. “Depuis leur naissance, je n'ai pas cessé de solliciter toutes les autorités concernées afin de m'aider dans leur prise en charge, mais je n'ai pu obtenir que des promesses. On survit grâce aux dons des personnes charitables. Pour leur pension de handicapés, on ne la reçoit jamais à temps. C'est toujours avec des retards de quatre à six mois”, nous dira-t-elle. “Dans la société algérienne, le handicapé est non seulement mal accepté, mais il est également mal pris en charge. Cette attitude lui cause une douleur et une souffrance profondes qu'il subit dans un isolement total”, selon des représentants du mouvement associatif qui ne cessent de tirer la sonnette d'alarme sur cette situation. “À chaque occasion, nous essayons d'attirer l'attention des pouvoirs publics sur les problèmes que rencontrent les handicapés, mais nous nous heurtons à un silence glacial. En tant qu'association, nous n'avons jamais bénéficié de subvention ou d'aide de la part du ministère de la Solidarité nationale. Et pourtant, la plupart des handicapés ne trouvent refuge que dans les différentes associations qui essayent tant bien que mal de trouver des solutions à leurs problèmes”, nous révélera M. Azouz, directeur de la publication de la revue Espoir, magazine spécialisé pour handicapés. En effet, plusieurs associations interpellent quotidiennement les ministères de la Santé et de la Solidarité nationale sur diverses difficultés. Ainsi, l'association Adem, de Constantine, lance un appel urgent sur l'état actuel du produit Mestinon, un médicament destiné au traitement des malades atteints de myasthénie. “Ce produit est en rupture depuis longtemps. Il n'est importé que récemment par un laboratoire algérien, le Laboratoire de diagnostic maghrébin (LDM), mais, il est en souffrance au niveau des Douanes algériennes”, dénonce le représentant de l'Adem, dans une lettre adressée au ministre de la Santé. L'Association des myopathes tire également la sonnette d'alarme sur la situation de ces personnes qui souffrent en silence. Une maladie génétique mal dépistée et dont les appareils coûtent très cher. Pour l'Association des parents atteints de maladies génétiques (Apegem), les enfants atteints de phénylcétonurie (PCU), maladie très grave qui n'est curable que par un régime qui doit débuter avant le troisième mois de la naissance, souffrent également. “Environ mille enfants sont atteints au niveau national. Nous interpellons le ministère de la Santé pour une prise en charge immédiate de ces enfants. Il est à savoir que ces malades dépendent d'un lait médicament, XP Maxamaid, qui coûte 10 586,24 dinars. Les moyens financiers, généralement limités des parents de ces enfants, ne peuvent leur permettre de se procurer ce lait chaque semaine. En Algérie, il n'existe qu'une seule pharmacie qui l'importe et c'est un médicament non remboursable”, nous avouera Mme Allouache Bahidja, pharmacienne. “Il faut savoir que ces enfants ne peuvent prendre aucune alimentation à part ce lait qui est obligatoire jusqu'à l'âge de 8 ans. Nous interpellons les autorités publiques pour une prise en charge immédiate de ces malades une fois diagnostiqués. Une campagne de dépistage précoce nous fera gagner du temps et sauvera l'enfant. Nous insistons sur l'importance du dépistage pour une prise en charge rapide de l'enfant malade”, insistera notre interlocutrice. On citera aussi l'exemple de l'Association des parents d'enfants atteints d'infirmité motrice cérébrale (IMC) de Bordj El Kiffan qui a fermé ses portes aux enfants inscrits à l'école Kaim, un établissement spécialisé qui prend en charge la scolarité de ses enfants. “L'association n'a plus les moyens financiers de maintenir ces élèves cette année. Ses responsables ont frappé à toutes les portes, et particulièrement celles du ministère de la Solidarité nationale, pour une aide. Malheureusement, elle n'a rien obtenu et l'école a fini par être fermée”, a tenu à dénoncer un représentant de l'Association des sourds- muets d'Algérie, et de soulever le problème vécu par les 170 élèves de l'école des sourds-muets de Mohammedia qui aurait pu connaître le même sort. “Les élèves étaient très perturbés à l'idée qu'ils allaient quitter leur école. La décision de leur transfert vers le nouveau centre de Rouïba n'a été annulée que grâce aux parents des élèves qui ont refusé de voir leurs enfants dispatchés dans d'autres établissements.”