La chef de l'opposition birmane Aung San Suu Kyi, habituellement très silencieuse sur le cauchemar enduré par la minorité musulmane des Rohingyas, a condamné lundi la volonté des autorités de limiter à deux le nombre d'enfants par famille. "Une telle discrimination n'est pas bonne. Et ce n'est pas en ligne avec les droits de l'Homme non plus", a-t-elle déclaré aux journalistes à Rangoun tout en précisant qu'elle ne savait pas si la loi était appliquée ou non. Les Rohingyas se sont vu rappeler un ordre ancien "pour forcer à la monogamie et ne pas avoir plus de deux enfants", selon un porte-parole du gouvernement rakhine, dans l'ouest du pays. La mesure "a été réapprouvée" la semaine dernière dans deux districts à très grande majorité rohingya. Cette disposition avait été mise en place sous l'ancienne junte militaire à l'encontre d'une communauté considérée par l'ONU comme l'une des plus persécutées de la planète. Des violences entre Rohingyas et bouddhistes de la minorité ethnique rakhine ont fait environ 200 morts l'an dernier, déplaçant environ 140.000 personnes et mettant en lumière une tension à vif entre les deux communautés. Alors que les Rakhines expriment la peur de se voir envahir par les musulmans, le rapport de la commission d'enquête officielle sur ces violences avait plaidé en avril pour un "planning familial" pour les musulmans, tout en rejetant des mesures "obligatoires qui pourraient être vues comme injustes et abusives". Phil Robertson, de l'organisation Human Rights Watch, a de son côté dénoncé une mesure "contraire aux droits de l'Homme", appelant le pouvoir central à intervenir et soulignant que la décision avait par le passé conduit à des arrestations et à l'absence d'existence légale pour les enfants au-delà de deux. Les quelque 800.000 Rohingyas confinés dans l'Etat Rakhine ont été privés de nationalité par l'ancienne junte dissoute en 2011. Ils sont vus par beaucoup de Birmans comme des immigrés illégaux du Bangladesh.