Depuis des semaines, les plus sceptiques du microcosme politique algérois avaient misé sur une défaillance de la mouvance islamiste et sa non-participation à la prochaine élection présidentielle. L'absence des figures de proue de cette tendance aurait rajouté, selon leurs projections, à la décrédibilisation du vote et pourrait contribuer d'une manière spectaculaire à augmenter encore davantage les taux d'abstention. Ce scénario reposait, en fait, sur un retrait magistral de Djaballah, que certains écrits malintentionnés le présentaient comme l'unique leader incontesté de l'opposition islamiste modérée, d'autant qu'il cherchait depuis des mois à fédérer ses anciens réseaux organiques pour pouvoir arracher ce fameux quitus partisan. En vérité, Djaballah qui s'est épuisé depuis novembre dernier dans ses larges consultations avec les responsables de deux partis islamistes, Ennahda et El Islah, voulait obtenir l'approbation des deux sensibilités pour se présenter comme un candidat unique de la mouvance islamiste, sur la base d'un compromis politique, un programme commun et une feuille de route négociable. Selon des indiscrétions, le plan de Djaballah consistait à phagocyter d'abord Ennahda, son premier parti, en brandissant son expérience politique, médiatique, oratoire, voire même «populaire». Puis, dans une seconde étape, il proposera ses «services» à son ex-second parti, El El Islah, sous le sceau de l'union sacrée et le retour de l'enfant prodige, une sorte de réconciliation partisane intra-muros. Au même moment, il usera de tous les artifices et autres subterfuges pour faire croire que des parties au sein même du pouvoir «l'invitaient» avec insistance à participer aux joutes électorales. Avant même son annonce de retrait, il avait suggéré cela dans ses innombrables interviews avec la presse, voulant sans doute convaincre les plus réticents de sa mouvance qu'il est le seul interlocuteur valable avec les autorités. Mais, ce plan a échoué lamentablement. D'abord, c'est le chef d'El Islah, Djahid Younsi, qui sera candidat de son parti en espérant le soutien militant de Fethi Rebai (Ennahda), ensuite ce sera Mohand Oussaïd Belaïd, ancien secrétaire général du défunt parti Wafa d'Ahmed Taleb Ibrahimi. Deux annonces qui vont changer carrément les données politiques du scrutin, mettant à nu les visées de certains sur une forte abstention des islamistes en avril. Car, selon nos informations, les deux partis qui ont divorcé avec Djaballah vont entrer en force dans la campagne électorale, estimant qu'il s'agit ici d'une «opportunité politique qui mettra sur orbite de nouveau la solution islamique» aux crises qui secouent le pays. Selon leurs analyses, les dernières manifestations de soutien aux Palestiniens de Ghaza ont démontré que la fibre «religieuse» de la société algérienne reste intacte, et que seul ce sentiment était capable de remplir les salles de meeting. De plus, l'intrusion de Mohamed Saïd, chef du nouveau Parti de la liberté et de la justice, devrait réactiver les anciens comités de soutien de Taleb Ibrahimi créés en 1999, de même qu'on devra s'attendre à une implication de ce dernier en faveur de son poulain. Pour Mohamed Saïd, ces élections sont une occasion pour faire connaître le parti, le PLJ, sa doctrine, ses programmes, estimant dans des récentes déclarations que les «dés ne sont pas pipés» avec cette présidentielle, et que la «politique n'est pas une science exacte» et qu'il jouera à fond sa carte d'islamiste qui allie modernisme et morale.