Le malheureux feuilleton du diplomate algérien, Mohamed Ziane Hasseni, retenu en otage judiciaire par l'administration française, risque de prendre d'ici quelques semaines de nouvelles proportions. L'affaire a déjà pris une autre tournure avec la nomination d'un autre juge d'instruction. Ce qui signifie que le harcèlement judiciaire va encore s'éterniser risquant cette fois-ci de perturber davantage les relations algéro-françaises. Certains observateurs qui suivent le dossier de près estiment qu'il existe une réelle volonté de nuire au diplomate algérien, et à l'Etat algérien, en essayant de monter un simulacre de procès comme il en existe des milliers dans les annales de la justice coloniale. Tous les éléments contenus dans le dossier de l'instruction, ainsi que les attitudes des deux juges d'instruction prouvent qu'on est en face d'un véritable cas d'espèce de flagrant déni, d'un juridisme basé sur les prismes coloniaux et le fameux code de l'indigénat. Si pour les juristes et les experts, on trouve dans cette affaire tous les ingrédients d'un acharnement judiciaire et moral, alors que l'accusation a épuisé tous ces arguments et autres procédés dilatoires, qu'en est-il pour les diplomates ? Il est clair que les relations entre les deux pays vont souffrir encore davantage, et des ministres n'en cachent plus cette crainte, comme cette petite déclaration de Ould Abbas qui estimait récemment que l'affaire Hasseni constitue une «épine» dans les relations entre l'Algérie et la France. Aujourd'hui, on est en droit de s'interroger pourquoi Paris «laisse faire» le chantage, fait perdurer le harcèlement, même si l'Elysée jure qu'elle n'a aucun pouvoir sur la justice, que cette dernière est libre et que le garde des Sceaux ou le parquet n'a aucune «influence» sur l'autonomie des juges et leur indépendance. Assertions difficiles à gober, d'autant que l'histoire politique récente de la France fourmille d'exemples flagrants d'interventionnisme de l'exécutif sur le judiciaire, voire sur des affaires ou des scandales qui avaient secoué l'opinion publique dans l'Hexagone ou sur des pressions médiatiques tous azimuts. Cette situation délibérée de maintenir un énigmatique statu quo sur l'affaire n'a pas seulement jeté un froid ou une épine dans les relations diplomatiques algéro-françaises, mais risque à la longue de porter un sérieux coup à la coopération bilatérale. Selon nos informations, des experts algériens sont en train d'explorer de nouvelles pistes qui pourraient à terme internationaliser l'affaire et porter devant d'autres juridictions supranationales les recours nécessaires qui feront condamner cette «justice» coloniale, qui ne prouve ni ses accusations ni ne croit à aucune preuve d'innocence. Ces nouvelles pistes juridiques (comme des commissions de l'Union européenne entre autres) ne semblent pas exclure en parallèle d'autres actions de défense, sauf que dans ce cas précis, la proximité de l'élection présidentielle en Algérie reporterait toute réponse vigoureuse de l'Etat algérien à cette forme de chantage vers le mois de mai.