Le Temps d'Algérie publie, en exclusivité, le contenu de l'enquête menée sur le projet de réalisation de la centrale électrique de Hadjret Ennous. Une enquête qui révèle les «largesses» considérables dont a bénéficié SNC Lavalin. La même enquête révèle que le ministère de tutelle, en l'occurrence celui de l'Energie et des Mines, était au courant et a cautionné toutes les clauses et «privilèges» obtenus par l'opérateur canadien. D'autres détails, également inédits, sont révélés par le rapport d'enquête dont Le Temps d'Algérie dispose d'une copie. L'enquête revient sur l'appel d'offres dont l'ouverture des plis a abouti au choix porté sur la société canadienne pour la réalisation de la centrale électrique de Hadjret Ennous (Tipasa). C'est ainsi qu'il est précisé que c'est pour libérer le marché de l'électricité et du gaz et l'abandon du monopole de Sonelgaz qu'a été promulguée la loi 01/02 datée du 5 avril 2002, se rapportant à l'énergie électrique et distribution de gaz par canalisation. Il a également été précisé que c'est dans ce cadre qu'a été créée la Commission de régulation de l'électricité et du gaz (Creg), dont le siège se trouve actuellement au ministère de l'Energie et des Mines. Celle-ci est considérée comme étant une structure indépendante, chargée de faire respecter les lois techniques, économiques et environnementales, de même que protéger le consommateur et assurer la transparence des transactions et l'équité entre les opérateurs. C'est à la Creg qu'a été confiée l'étude des appels d'offres se rapportant à la réalisation des stations électriques et l'émission d'autorisations d'exploitation. L'Etat a dans ce domaine mis à exécution une sérié de projets de réalisation de centrales électriques dans différents endroits du pays, dont celles de Skikda, Tlemcen, Berrouaghia et Hadjret Ennous, à Tipasa. Ces projets avaient pour but de faire face à la demande croissante en matière d'énergie électrique. Le pays enregistrait des coupures fréquentes (délestages). A été créée dans ce cadre la société par actions (SPA) Algerian Energy Company (AEC) par le ministère de l'Energie et des Mines, avec pour mission de trouver un investisseur étranger disposant des capacités techniques et financières adéquates avec le projet de réalisation de centrales électriques et le lancement d'un avis d'appel d'offres pour sa concrétisation sur terrain. Dans ce cadre, AEC a lancé un avis d'appel d'offres numéroté 06/AEC/2003 pour la création d'une société par actions (société du projet), avec la SPA AEC, Sonelgaz et Sonatrach. La mission de cette entreprise est la réalisation d'études, le financement et l'exploitation de la centrale électrique de Hadjret Ennous, d'une capacité de 1200 mégawatts, et la commercialisation de l'énergie électrique qui y sera produite, conformément aux lois en vigueur en Algérie. L'article 4 de la déclaration de création de cette société fixe les conditions de vente de l'énergie électrique produite dans cette centrale dans le marché algérien et l'obtention par cette société créée, la SPA SKH (Sharikate kahraba Hadjret Ennous), d'un engagement de l'acheteur de l'énergie électrique représenté par Sonelgaz qu'il garantit la pratique d'un prix de référence pour sa vente au marché local pour une durée fixée entre les deux parties. Voilà comment SNC Lavalin est arrivée En parallèle, Algerian Energy Company a, en date du 10 novembre 2003, lancé un avis d'appel d'offres pour le compte de la société du projet (la SPA SKH), composée de Sonelgaz, Sonatrach et la SPA AEC, pour la réalisation d'une centrale électrique à Hadjret Ennous, avec une capacité de 1227 mégawatts. Simens et SNC Lavalin ont postulé suite au lancement de l'avis d'appel, et présenté, chacun, ses propositions techniques et commerciales. L'ouverture des plis techniques a eu lieu le 19 juin 2004 et après l'étude des offres commerciales, la société canadienne SNC Lavalin a obtenu le marché, «vu son expérience, ses capacités techniques et commerciales et également son offre technique et commerciale présentées dans le cadre de la réponse à l'avis d'appel d'offres». SNC Lavalin s'est également engagé à participer à hauteur de 51% du capital de la SPA SKH, société par actions créée pour la réalisation du projet de la centrale électrique de Hadjret Ennous. La loi 01/02 datée du 5 avril 2002 à l'origine de la «catastrophe» Peu de personnes ont, à l'époque, alerté sur le contenu de la loi 01/02 du 5 avril 2002 qui accorde des privilèges considérables aux investisseurs, au détriment des intérêts du pays. C'est d'ailleurs sur la base de cette loi qu'un accord a été conclu entre Sonelgaz et SNC Lavalin au terme duquel la société nationale d'électricité et de gaz (Sonelgaz) offre, gratuitement, du gaz naturel, durant 20 ans, à la société canadienne SNC Lavalin. Cette information ressort dans l'enquête autour de cette affaire. Sonelgaz s'engage à éviter toute perturbation dans la livraison de gaz à SNC Lavalin. Le gaz fourni, gratuitement, par Sonelgaz, est utilisé par SNC Lavalin pour sa transformation en énergie électrique. Un autre contrat a été conclu et par lequel Sonelgaz s'engage à acheter cette énergie électrique produite par SNC Lavalin qui se voit, de cette façon, gagnante sur toute la ligne. Cette société canadienne s'assure, de cette façon, à rentabiliser toute sa production pendant 20 ans, puisque Sonelgaz s'engage comme acheteur durant ce laps de temps. Bénéficiaire de soutien à l'investissement et exempté d'impôts et de taxes Les investigations menées dans le cadre de l'enquête ont révélé, également, que la société du projet (SPA SKH) composée de SNC Lavalin, Sonelgaz et Sonatrach et la SPA AEC, a bénéficié de facilités de la part de l'Agence nationale de soutien à l'investissement et était exempté d'impôts, de taxes douanières et de l'impôt sur la valeur ajoutée pendant 36 mois, conformément à la décision octroyant les privilèges de réalisation numéro 632/2006 et datée du 23 septembre 2006. Les privilèges accordés à SNC Lavalin sont loin de s'arrêter là. Nous y reviendrons demain, avec de plus amples détails et d'autres révélations.