Cela se précise chaque jour et la guerre dont on parle depuis des mois se profile un peu plus à l´horizon. Il est attendu que le discours, mercredi prochain, du secrétaire d´Etat américain, Colin Powell, devant le Conseil de sécurité où celui-ci compte présenter à l´opinion publique internationale, les «preuves» de Washington contre Saddam Hussein, permettra à la situation de se décanter et de voir plus clair dans un écheveau embrouillé à dessein. Maintenant la pression sur Bagdad, les Etats-Unis, qui ne font rien pour prendre en compte l´opposition de la communauté internationale à la guerre, redoublent, en revanche, d´efforts pour rendre une telle alternative inévitable. Cette opposition, que ce soit celle de dirigeants de premier plan, comme les présidents Chirac et Poutine ou le chancelier Schröder, ou celle exprimée par les manifestations publiques, - y compris aux Etats-Unis où les opposants à la guerre se font de plus en plus nombreux -, laisse totalement insensible le président Bush plus que jamais décidé de se débarrasser de l´encombrant dictateur irakien. Cette détermination américaine à aller à la guerre, malgré l´opposition de la communauté internationale, est exprimée par l´ultimatum lancé, vendredi, par Bush qui laisse de «quatre à six semaines» à Saddam pour désarmer. Le président américain, qui a toujours affirmé qu´il n´y avait nul besoin d´une deuxième résolution du Conseil de sécurité pour enclencher la guerre, a fini par se rallier, du bout des lèvres, à ce principe, condition sine qua non mise par beaucoup de pays pour seulement envisager, et encore avec le feu vert du Conseil de sécurité, une éventuelle guerre en Irak. Aussi, les Etats-Unis poussent-ils un peu plus à cette extrémité en mobilisant sa diplomatie pour convaincre les pays réticents à les suivre dans cette aventure voulue par eux seuls. Précipitant les choses, les derniers développements indiquent, en effet, que l´on semble être entré dans le dernier quart d´heure. Il y a eu, d´une part, la recommandation faite, samedi, par l´ambassadeur des Etats-Unis à Riyad appelant les citoyens américains à quitter l´Arabie Saoudite. Avertissement dans lequel, l´ambassadeur américain indique: «Les citoyens américains se trouvant actuellement en Arabie Saoudite devraient faire une évaluation rigoureuse de l´état de leur sécurité et songer à partir.» D´autre part, le deuxième fait qui accrédite l´imminence de cette guerre annoncée est la déclaration de Condoleezza Rice, conseillère du président américain pour la sécurité nationale. Celle-ci, dans un entretien au quotidien cairote Al Ahram a laissé entendre que les Etats-Unis «contrôleraient temporairement» l´Irak (après la guerre), confirmant ainsi les rumeurs persistantes, ces dernières semaines, qui affirmaient que Washington envisageait de diriger directement l´Irak, ou un commandement militaire américain serait installé, durant une période plus ou moins longue. Mme Rice argue le fait qu´«il y aura un certain moment, (...) au cours duquel nous aurons besoin que l´ordre soit établi, et les forces militaires américaines joueront un rôle de premier plan dans cela» précisant: «Quant au volet politique, il faut prendre en considération le fait que Saddam Hussein gouverne l´Irak depuis 30 ans et qu´il faut donner un peu de temps pour permettre l´émergence de dirigeants politiques.» Au vu de la piètre image que donne d´elle «l´opposition» irakienne, il est clair que dans l´esprit de la conseillère du président Bush «ce peu de temps» peut s´évaluer en dizaine(s) d´années sinon plus. Une fois en Irak, les Etats-Unis y seront pour y rester, cela ne fait aucun doute, et l´éviction de Saddam Hussein, qui justement empêche la mainmise américaine sur le pétrole irakien, n´est, en fait, qu´une couverture pour s´emparer de cet or noir tant convoité. En attendant de connaître les «preuves» que Colin Powell compte montrer au Conseil de sécurité, des sources irakiennes à Bagdad ont indiqué, hier, que le chef de la Mission d´inspection de contrôle et de vérification de l´ONU, Hans Blix, sera de nouveau à Bagdad le 8 février prochain, pour avoir des discussions avec les dirigeants irakiens. Il sera accompagné dans ce déplacement en Irak par le directeur de l´Agence internationale de l´Energie atomique (Aiea) Mohamed El-Baradei. Par ailleurs, des sources proches de la présidence irakienne ont indiqué, hier, qu´aucun haut dirigeant irakien ne se déplacera à New York pour écouter ce que va dire le secrétaire d´Etat américain pour justifier la guerre que son pays prépare contre l´Irak.