La valse des visites à haut niveau a rendu la distance plus courte entre Alger et Paris. Jacques Chirac, l'homme le plus médiatisé après Bush, Saddam et Ben Laden, de par sa position vis-à-vis de la guerre en Irak, sera à Alger, dimanche prochain, pour une visite d'Etat de trois jours. Beaucoup de spécialistes des relations algéro-françaises s'accordent à dire que le président recevra un accueil jamais réservé par les Algériens à un président français depuis l'Indépendance. Il faut dire que Chirac, le gaullien, a pris goût à notre pays après sa visite éclair à Bab El-Oued en 2001. Le temps et la tournure, qu'ont pris les événements, ont fini par arranger les choses au mieux dans les relations entre les deux pays, tiraillés entre une histoire passionnelle et la réalité dure du présent. Désormais, les relations diplomatiques vont changer entre l'Algérie et la France. La nouvelle vision, qui semble primer sur la passion, est, sans nul doute, celle du risque et de l'intérêt économique. Il s'agit de fonder une nouvelle ère de partenariat entre les deux pays. La déclaration de Bouteflika, lors de sa première visite en France, assurant que la France sera le pays le plus privilégié de l'Algérie en termes de partenariat, n'est pas tombée dans l'oreille d'un sourd. Cela a été d'autant plus clair à travers le nouveau redéploiement diplomatique et économique que compte entreprendre la France en Afrique. Un redéploiement qui ne pourra réussir sans l'incontournable Algérie. Plus réaliste, la France se rend compte que la passion a trop fait traîner les choses au profit des Américains. Selon l'Elysée, les deux pays doivent ainsi signer une «déclaration d'amitié», symbole d'un rapprochement approuvé par une large majorité de Français, qui se disent à 69% favorables à la signature d'un traité d'amitié, selon un sondage CSA publié, lundi, dans le journal Le Parisien. La visite de M.Chirac, dit-on à l'Elysée, doit donner à ces relations «un nouveau départ» dans tous les domaines: économique, politique et culturel. Dans ce contexte, l'Algérie se montre plus que jamais enthousiaste à tenir sa parole avec la France en encourageant les groupes français à investir davantage en Algérie. L'autre particularité dans les relations entre l'Algérie et la France est celle relative aux discours que prononcera Jacques Chirac devant les deux Chambres. Il sera non seulement le premier président français, mais le premier étranger à le faire en Algérie indépendante. Par ailleurs, certaines organisations tentent justement de profiter de la singularité de cette visite pour faire pression sur le pouvoir. Après les ârchs, qui ont décidé de marcher sur Alger, c'est au tour du Collectif des familles de disparus en Algérie et des Français attachés aux droits de l'Homme. Ces derniers ont, à travers une lettre adressée à l'Elysée, sollicité un rendez-vous avec le président Chirac. «Nous souhaitons vous entretenir des problèmes que connaissent les familles», écrivent les responsables de cette organisation qui ont ajouté que «les autorités algériennes semblent vouloir mettre un point final au dossier des disparus en demandant d'accepter leur version officielle». Le dossier des disparus risque de causer une gêne aux deux dirigeants, qui tiennent à tourner la page, au moment où les familles de disparus insistent pour que la page des «disparus ne soit pas tournée avant d'être lue».