La crise des missiles a finalement trouvé une solution, alors que les deux camps restent sur leurs positions. La situation, quelque peu assombrie par la crise des missiles, a eu une évolution heureuse par l'acceptation par l'Irak de la destruction de la centaine de missiles Al Samoud 2 mis en cause par les experts de l'ONU. Bagdad avait confirmé, hier, que cette destruction débuterait le jour même comme l'a annoncé un haut fonctionnaire du ministère irakien de l'Information. Ce dernier a déclaré à la presse qu'«il a été convenu lors de la réunion avec l'ONU de commencer l'opération aujourd'hui (hier, Ndlr) avec la démolition de quatre missiles Al-Taji». Selon la même source, des experts de l'ONU devaient, le même jour, procéder au démontage des chambres de coulée utilisées dans la fabrication de ces engins dans la perspective de leur destruction. Deux des principaux défenseurs de la voie pacifique pour désarmer l'Irak, la France et la Russie ont accueilli favorablement la décision de Bagdad de se plier aux exigences de Hans Blix, chef des inspecteurs de l'ONU. Se félicitant de cette décision, le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin a indiqué, vendredi, que «le choix de la France, comme celui de la majorité de la communauté internationale, se trouve aujourd'hui conforté» assurant que «c'est une étape importante dans le processus de désarmement de l'Irak». Sentiment partagé par le vice-ministre russe des Affaires étrangères qui a déclaré, hier, à l'agence russe Itar-Tass, que «l'Irak a pris une décision positive en répondant aux exigences de Hans Blix et est prêt à détruire ses missiles al-Samoud 2» ajoutant: «Le recours à la force est en contradiction avec la situation actuelle et la coopération active de Bagdad avec les inspecteurs de l'ONU». Ainsi la communauté internationale met en relief le fait qu'il est possible de désarmer pacifiquement l'Irak sans avoir recours à la force militaire. Cet optimisme, mesuré, dans le processus de désarmement mené par les inspecteurs de l'ONU ne convainc toujours pas Washington qui ne voit aucune autre alternative aux frappes militaires contre l'Irak. Alors que le Premier ministre britannique, Tony Blair, se gausse du mémorandum présenté par la France, la Russie et l'Allemagne, et appuyé par la Chine, estimant que c'est «un exercice inutile», les Etats-Unis s'emploient, par des pressions diplomatiques et également commerciales, à faire infléchir les positions du Chili, du Mexique et de l'Angola, les uns étant liés, (Mexique) ou sur le point de l'être, (Chili) par des accords commerciaux, - à l'instar du Mexique membre de l'Alena (Accords de libre-échange nord-américains) au même titre que les USA et le Canada -, les autres (Angola) cherchant à obtenir une éligibilité au titre de la loi américaine sur la croissance, donnant un accès privilégié au marché américain. Ainsi, Washington ne semble vouloir reculer devant aucun expédient, qui s'assimile fort à un chantage, pour contraindre ces petits pays membres non permanents du Conseil de sécurité à voter son projet de résolution exigeant la force contre l'Irak. Pour être adopté, un projet de résolution doit recueillir neuf voix et ne faire l'objet d'aucun vote négatif de la part des détenteurs du droit de veto. Washington est, de fait, loin du compte si l'on note que sur les quinze membres du Conseil de sécurité, douze sont soit contre soit réticents à voter ce projet, d'autant que tous admettent que le désarmement pacifique de l'Irak est plus réel que jamais. D'autant réel, que, outre l'obstacle des missiles qui a été levé, sur le terrain, à Bagdad, des biologistes irakiens ont accepté d'être interrogés en privé, ce qu'ils ont jusqu'ici refusé. Dans une déclaration à la presse, le porte-parole de la Cocovinu (Commission d'inspection, de contrôle et de vérification des Nations unies), Hiro Ueki, a indiqué que «la Cocovinu a conduit deux interviews privées hier soir (vendredi ndlr) dans les domaines biologique et balistique» ajoutant: «Nous avons sollicité ces interviews, les premières à avoir lieu (en privé) depuis le 7 février». Ainsi, peu à peu, Bagdad accède à une coopération active avec les experts de l'ONU tel que le demandait le Conseil de sécurité. Cela devait et aurait dû enlever aux Etats-Unis leur détermination, toujours non fondée, à attaquer l'Irak. La Maison-Blanche ne semble pas prendre en considération cette avancée positive du désarmement effectif de l'Irak, restant sur les mêmes positions à savoir que l'Irak ne saurait être désarmé que par la force. Toutefois, notons que le Département d'Etat estimait, vendredi, que l'éventualité d'un exil de Saddam Hussein demeurait d'actualité. Selon le porte-parole du département d'Etat, Richard Boucher, le départ en exil du président irakien est «une idée qui est toujours d'actualité», indiquan: «Ce n'est pas une idée forcément prometteuse, (...) mais si Saddam Hussein ne désarme pas, c'est une autre manière de résoudre le problème en évitant un conflit militaire.» Il semble peu évident, après les dernières déclarations du président Saddam Hussein que cette perspective, départ en exil, soit sérieusement envisagée, d'autant qu'en Irak, les inspecteurs de l'ONU font du bon travail sur le terrain pour rendre le désarmement de ce pays effectif.