La mission de désarmement de l'ONU, loin d'enfoncer l'Irak, laisse l'espoir d'arriver à une solution pacifique. Dans son intervention, Hans Blix déclare d'emblée: «Dans aucun cas, nous n'avons vu de preuves convaincantes que la partie irakienne savait en avance que les inspecteurs allaient arriver» démentant indirectement les supputations de Washington. M.Blix affirme, par ailleurs, que «les inspections aident effectivement à combler le fossé en termes de connaissance (de l'armement irakien) dû à l'absence des inspecteurs (depuis 1991)». Ce qui n'empêcha pas le représentant de l'ONU de faire grief à Bagdad du fait qu'il dispose de missiles dont la portée dépasse les normes imposées par l'ONU qui sont de 150 km. Ainsi, selon Hans Blix, «sur la base des données fournies par l'Irak, les deux variantes du missile Al Samoud 2 sont en mesure de dépasser 150 km de portée. Ce système de missile est donc interdit par les résolutions 687 et 715 (de 1991)». Se référant ensuite aux photos satellite présentées par les Etats-Unis, le chef de la mission de désarmement de l'ONU indique: «En fait de mouvement de munitions sur ce site, il peut aussi bien s'agir d'une activité de routine que d'un mouvement de munitions prohibées à l'approche des inspecteurs» mettant ainsi en doute les «preuves» présentées le 5 février devant le Conseil de sécurité par le secrétaire d'Etat américain, Colin Powell. De son côté, le directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique, Mohamed El-Baradei, a estimé que l'adoption par le Parlement irakien de la loi interdisant les armes de destruction massive comme étant «un pas dans la bonne direction». Pour conclure, Hans Blix indique que la période «nécessaire pour parvenir à un désarmement de l'Irak, grâce aux inspections, pourrait être courte, en cas de coopération immédiate, active et inconditionnelle de Bagdad». Sans être totalement positif, le rapport de MM.Blix et El Baradei laisse en vérité la porte grande ouverte à une résolution de la crise irakienne par des moyens pacifiques. Le poker menteur du président Bush n'a ni pris ni convaincu. Crucial était donc pour l'Irak le rapport des experts en désarmement de la conclusion duquel dépendaient en fait le sort de l'Irak et la suite des événements. Les deux camps fourbissaient leurs armes et cherchaient à entraîner dans leur sillage les indécis. Sur les quinze membres du Conseil de sécurité, au moins onze penchaient pour le groupe emmené par la France et comprenant, deux autres membres permanents, la Chine et la Russie. Ce groupe demandait la poursuite des inspections, avec le doublement, voire le triplement, du nombre des experts, selon Paris, pour permettre un travail plus efficient et un désarmement réel et contrôlé de l'Irak. Dans cette partie de poker dont l'enjeu n'est rien moins que le déclenchement d'une guerre dont personne ne peut présager l'issue, il fallait surtout avoir le courage de résister aux pressions américaines qui confinent au diktat. C'est ce courage dont ont fait montre les chefs des inspecteurs de l'ONU qui, sans être tendres avec Bagdad, ont été fermes dans leurs observations quant aux manquements dont aurait été coupable l'Irak.