Tard dans la journée d'hier, s'est ouvert au Conseil de sécurité un débat public. Hans Blix à affirmé, hier, devant le Conseil de sécurité, que le désarmement de l'Irak nécessiterait des mois. Le chef des inspecteurs en désarmement déclare: «Vérifier le désarmement, même avec la coopération de l'Irak, ne prendra pas des semaines ou des années, mais des mois.» C'est ainsi que le chef des inspecteurs en désarmement dit, sans doute indirectement, son scepticisme quant à l'empressement des Etats-Unis à entrer en guerre. Pour sa part, M.El Baradei affirme qu'il n'existe aucune preuve que l'Irak utilise des tubes d'aluminium pour usage prohibé, qu'il n'y a aucun signe d'activité nucléaire et que l'assertion selon laquelle l'Irak «a tenté d'acheter de l'uranium au Niger est fausse». Cependant, George W.Bush a affirmé hier, dans une conférence, à la Maison-Blanche, que «Saddam Hussein ne désarme pas. C'est un fait. On ne peut le nier», ajoutant: «Nous sommes dans la dernière phase de la diplomatie, la solution de ce problème au Conseil de sécurité est une affaire de jours.» Ces déclarations intervenaient quel-ques heures avant le débat public programmé au Conseil de sécurité, et singulièrement, avant la présentation, le même jour, du rapport de Hans Blix. Par leurs déclarations et affirmations, George W.Bush, Tony Blair, Colin Powell, notamment, se sont répandus ces dernières quarante-huit heures en propos tranchants, tentant tous d'affirmer que la seule alternative qui reste contre l'Irak, c'est la guerre. Ce qui n'est l'avis ni des chefs des inspecteurs de l'ONU, MM.Blix et El Baradei, ni celui de la France, de la Russie et de l'Allemagne auxquelles s'est jointe la Chine, qui estiment que rien ne justifie en l'état actuel de la situation une frappe militaire contre l'Irak. Hans Blix, à déclaré - avant de présenter son nouveau rapport de situation - que l'Irak «avait coopéré de manière active le mois dernier». Plus explicite, son collègue, Mohamed El Baradei, directeur de l'Agence internationale de l'énergie atomique, a estimé, pour sa part, dans un texte paru dans le quotidien des milieux financiers américains, le Wall Street Journal d'hier, que «les inspections sur les armes nucléaires en Irak font des progrès marquants», indiquant: «Sauf circonstances imprévues, et à supposer que le niveau de coopération de l'Irak s'accélère et que le soutien des autres pays continue, l'Aiea devrait être en mesure dans un proche avenir de fournir au Conseil de sécurité des assurances concernant l'existence ou l'absence d'un programme nucléaire en Irak.» C'est donc de temps que les inspecteurs ont besoin pour conclure leur travail et donner une appréciation fondée, soit sur le désarmement de l'Irak, ou a contrario sur le redémarrage d'un nouveau programme d'armes prohibées, ce qui ouvrirait la voie à des frappes militaires contre l'Irak. Ce que la communauté internationale, dans son immense majorité, estime que c'est loin d'être le cas et qu'il faut laisser la commission de désarmement faire son travail. Bush n'en affirme pas moins que le temps est maintenant à l'action, minimisant les oppositions internationales à une guerre que rien, en l'état actuel des informations existantes, ne justifie. Inlassablement, Londres et Washington répètent que Bagdad est «en violation patente» de la résolution 1441, le Premier ministre britannique, Tony Blair, allant jusqu'à indiquer qu'«il passerait outre à un veto ‘‘déraisonnable''», répliquant indirectement à la déclaration faite à Paris, mercredi, par les chefs des diplomaties française, allemande et russe - Dominique de Villepin, Joschka Fischer et Igor Ivanov - lesquels ont affirmé dans une déclaration commune: «Nous ne laisserons pas passer un projet de résolution qui autoriserait un recours à la force.» A Washington, le président Bush a, plutôt, minimisé la portée de cette déclaration, comme si cela avait été un exercice de style, alors que l'avenir de la communauté internationale risque de basculer par la détermination des Etats-Unis et de la Grande-Bretagne de porter en Irak une guerre aux conséquences incalculables. Si la «phase diplomatique» vivait, selon M.Bush, ses derniers moments, des indices donnent à croire que la «phase juridique» ne fait que commencer. C'est ainsi que des juristes britanniques éminents contestent à Tony Blair les analyses qu'il fait quant au droit qu'aurait la Grande-Bretagne de recourir à la force contre l'Irak. A plusieurs reprises le Premier ministre britannique a justifié le recours à la force par le fait que l'Irak menacerait, entre autres, la Grande-Bretagne. Dans une pétition ces juristes indiquent: «Personne ne peut sérieusement affirmer à ce stade que le Royaume-Uni est directement menacé» et enfonçant le clou affirment: «Nous sommes des professeurs de droit international. Sur la base de l'information rendue publique, il n'y a aucune justification dans la législation internationale à l'usage de la force militaire contre l'Irak.» Quant aux propos de M.Blair affirmant qu'il passerait outre à «un veto déraisonnable» (que les trois autres membres permanents du Conseil de sécurité seraient amenés à prendre), les juristes britanniques apostrophent leur chef du gouvernement soutenant: «Toute tentative de mépriser ces 32 votes, (Londres a usé autant de fois du veto) sous prétexte qu'ils sont déraisonnables aurait été considérée comme une atteinte inacceptable du droit de la Grande-Bretagne à exercer un veto aux termes de l'article 27 de la Charte de l'ONU.» Cette entrée en ligne des juristes qui soutiennent les positions des diplomates opposés à une guerre programmée enlève encore le peu d'arguments qu'ont Washington et Londres à opposer à la communauté internationale. Même s'il n'arrive pas à convaincre la communauté internationale de la nécessité d'employer la force contre l'Irak, le président Bush n'en persiste pas moins affirmant dans sa conférence de presse d'hier: «S'il nous faut agir, nous agirons. Et nous n'avons pas vraiment besoin de l'approbation des Nations unies.» Aussi, l'ONU serait un pis-aller pour Washington dont la décision d'aller à la guerre est déjà prise.