C'est le deuxième entretien que le Président de la République a accordé à ce journal, le seul de la presse nationale. S'exprimant, dans un entretien exclusif, dans les colonnes du confrère Le Jeune Indépendant dans son édition d'hier, le Président de la République s'est prononcé sur plusieurs sujets chauds caractérisant l'actualité nationale, mais sans aller au fond des questions avec la loquacité qui lui est connue. Les réformes en cours, la situation en Kabylie, la concorde nationale et l'échéance électorale de 2004 ont été les principales questions abordées par Bouteflika à l'occasion de sa quatrième année à la magistrature. Au sujet des réformes, le chef de l'Etat a indiqué «qu'aucun secteur» de l'activité nationale «n'a été négligé» dans les plans d'action mis en oeuvre durant ces quatre années. Dans ce contexte, il a précisé qu'une «attention particulière a été accordée aux dossiers de réforme de l'éducation, de la justice et des structures et missions de l'Etat ainsi qu'à la relance économique». Soulignant que des «étapes importantes ont été franchies» dans ce domaine, le Président a relevé cependant que «beaucoup de travail reste à accomplir, tout en exprimant sa détermination à poursuivre l'action jusqu'à son terme», notamment dans le domaine de la relance économique. Parlant de la concorde nationale, Bouteflika a indiqué que pour atteindre cet objectif «aucun moyen raisonnable ne doit être négligé». Cette affirmation indique un certain recul par rapport aux précédentes déclarations qu'il a faites sur le même sujet, il y a une année, lors de l'ouverture de l'année judiciaire, où il disait qu'il n'y a pas d'autre solution, pour le règlement de la situation sécuritaire dans notre pays, que la concorde civile qui sera étendue à la concorde nationale. Bouteflika a-t-il abandonné le projet qui a été son cheval de bataille? A la question de savoir s'il se présentait à la présidentielle de 2004, Bouteflika n'a pas répondu par la négative. Il a affirmé qu'il prendrait, à ce sujet, une décision au «moment opportun». ce qui laisse entendre que l'éventualité de sa candidature est effectivement inscrite sur son agenda. Aussi tient-elle aux tractations de coulisse, aux rapports de force et à la conjoncture qui en découlera après l'installation d'un nouveau gouvernement si Benflis est démis de ses fonctions. Pour ce qui est de la levée partielle ou totale de l'état d'urgence, le chef de l'Etat a estimé que les «conditions ne semblent pas encore réunies» et qu'il sera levé lorsque la «situation se stabilisera». Une déclaration discordante par rapport à l'avis donné par son chef de cabinet. Ce dernier, s'exprimant, en son nom personnel, dans les colonnes du journal Le Monde, avait déclaré qu'il ne voyait aucun inconvénient à ce que l'état d'urgence soit levé. La divergence de points de vue entre les deux hommes, sur le sujet, ne fait donc plus de doute. Bouteflika diverge également avec la grande majorité de la classe politique, à l'exception du RND, qui n'a cessé de revendiquer la levée de l'état d'urgence. Dans le même registre, le Président a ajouté que la société «n'est pas à l'abri du désordre». Très évasif au sujet de la situation en Kabylie, Bouteflika s'est contenté de rappeler que les pouvoirs publics n'ont ménagé aucun effort pour normaliser la situation. «Il faut continuer en appliquant les mesures déjà prises et en maintenant toujours ouvertes les portes du dialogue», a-t-il dit. Pas un mot sur les mesures concrètes à prendre pour régler cette crise, sur les partielles qui seraient renvoyées aux calendes grecques en cas de changement de gouvernement, et sur les détenus du mouvement citoyen. Pour l'affaire Khalifa, le Président de la République a tout simplement dit que «l'Etat s'est trouvé face à des insuffisances juridiques et à une situation inédite à laquelle les services publics concernés n'étaient pas préparés». Au plan international, il a rappelé que l'Union du Maghreb arabe uni (UMA) est un grand projet qui est «non seulement souhaitable, mais parfaitement fiable et réalisable», ajoutant que pour défier le temps, l'UMA «a besoin de se débarrasser des approches affectives pour se rapprocher constamment de la rigueur qui a présidé à l'émergence de l'Union européenne». Concernant la question du Sahara occidental, il a réaffirmé que la position de l'Algérie est une position de principe qui «n'a pas changé». «Toute proposition qui va dans le sens de la libre expression du droit à l'autodétermination du peuple sahraoui ne peut qu'emporter l'agrément de l'Algérie», a-t-il réaffirmé.