Malgré les divergences souvent importantes, les déchirures qui affectent le mouvement des ârchs, l'appel à la grève générale a été presque partout respecté d'Iferhounène à Tigzirt et de Tadmaït à Yakouren, les services publics et les administrations ont baissé rideau, une façon de commémorer le 23e anniversaire d'avril 1980. Dans certaines daïras comme Draâ El-Mizan et Draâ Ben-Khedda hormis les services administratifs et les entreprises, le reste: commerces, cafés, marchés, était ouvert. A Draâ Ben-Khedda, à la première heure de la matinée, toute la ville était fermée. Les commerçants se regardaient, c'était à qui ouvrirait le premier. Vers 9h, il ne restait pratiquement que les militants et les inconditionnels du 20 Avril, qui ont gardé les rideaux baissés. Le marché aux légumes était approvisionné et les citoyens vaquaient normalement à leurs occupations. A Draâ El-Mizan, seuls les services publics et les entreprises ont fermé. Dans cette ville, les citoyens, comme à Draâ Ben-Khedda, disent être dans l'esprit du 20 Avril, mais plusieurs voient en la grève «une action qui n'est pas appropriée». Un autre intervient: «Quand le mouvement était représentatif, on était avec lui, mais dès lors que ceux qui sont censés nous représenter, ne représentent en fait qu'eux-mêmes...». Ailleurs, à Boghni, aux Ouadhias, aux Ouacifs, à Beni-Yenni, à Aïn El-Hammam et jusqu'à Azazga, Yakouren, Bouzeguène et aussi du côté de la Kabylie maritime, tout était fermé. A Tizi Ouzou-Ville, tôt le matin, dans les rues bondées de jeunes, les uns venant à la marche, on ne remarque que les jeunes vendeurs de tabac et de cacahuètes. Ici et là, une boulangerie, une pharmacie ou encore un cabinet médical était ouvert. Le service minimum était assuré. Les commerces, les cafés, les services publics comme la poste, Sonelgaz, les banques et les entreprises ont tous obéi à l'appel à la grève. Au niveau du quartier, les Genêts, sous une large banderole noire où étaient inscrits des slogans hostiles au ministre de l'Intérieur, un groupe de jeunes attendaient d'intégrer la marche. La ville de Tizi Ouzou a vécu un moment d'intense émotion, hier. Des gens ont rejoint la marche, d'autres disent que «le 20 Avril appartient à tout le monde, ni aux ârchs ni aux partis politiques. Nous sommes sortis pour tamazight et contre la hogra!» Contrairement aux autres années, la marche d'hier n'a certes pas mobilisé les masses, même si les observateurs donnent 10.000 marcheurs et les ârchs 500.000, mais au-delà de cette bataille de chiffres, une vérité reste: celle de la mobilisation citoyenne pour tamazight, les libertés collectives et individuelles et la lutte contre la hogra. Un thème récurrent inscrit sur les banderoles et les slogans scandés. Hier, Tizi Ouzou a, malgré tout, réussi à dompter sa colère. Les ârchs y ont été pour beaucoup dans l'empêchement des dérives.