Un seul homme, Rebrab, remet en cause la parole de six journalistes, l'institution qu'est El Khabar et des enregistrements auxquels il ne s'attendait guère. Issad Rebrab a compris, bien trop tard, être allé trop loin dans ses «confidences» à ses «amis journalistes». Celui qui, durant longtemps, a cru que la presse, toute la presse, était sous sa botte, vient de découvrir ébahi le retour de manivelle des valeurs qu'il a, souvent, donné l'air de défendre. Issad Rebrab, qui se sait à présent au centre d'une terrible polémique, qui sait aussi que son combat actuel ne porte sur rien moins que le sauvetage de sa peau, n'a pas hésité une seconde, une seule, à remettre en cause l'intégrité morale de l'une des plus anciennes et plus soudées rédactions du pays. Dans une entreprise désespérée et folle, aussi folle serait-on tenté de dire que ses aveux qui risquent de lui coûter plus cher encore que les impôts qu'il n'a pas payés, Rebrab a tenté de remettre en cause le travail, mais aussi la parole de six journalistes, dont certains totalisent de très longues années de pratique. Il a, au passage, balayé d'un revers de «mots» l'intégrité morale du plus grand journal du pays, El Khabar. Ce qu'il convient, désormais, d'appeler l'affaire Rebrab, pour sérieuse qu'elle soit, n'en a pas moins frisé le vaudeville à la lumière de la tournure qu'elle tend à prendre. Rebrab dément en bloc tout ce qu'il a dit. Pour un peu, s'est exclamé un confrère, il aurait déclaré ne pas être venu du tout, ou pourquoi pas, qu'il s'agissait de quelqu'un d'autre que lui. Car, à n'en point douter, la mystification est bien trop grosse, bien plus que la couleuvre qu'il a tenté de faire avaler à l'opinion dans le journal dont il a le contrôle. El Khabar, depuis le lancement de sa nouvelle rubrique, «Petit-Déjeuner», il y a de cela près d'une année, a reçu environ une centaine de personnalités, dont beaucoup dépassent de loin en importance politique ou médiatique celle d'Issad Rebrab. Aucun invité n'a eu à s'en plaindre, ou à déplorer quelques propos déformés, et encore moins quelque invention que se serait amusé à imaginer un journaliste en mal de sensation. Car, pour incroyable que cela puisse paraître, Rebrab a tenté de démentir la quasi-intégralité des propos qui lui ont été attribués, allant même jusqu'à évacuer des sujets entiers, prétendant n'en avoir jamais parlé. Qu'un journaliste, dans un entretien en tête-à-tête, se trompe, ou fasse même montre de quelque malhonnêteté intellectuelle, passe. Mais que toute une rédaction verse dans ce genre de pratiques relève tout bonnement de l'hérésie. El Khabar, dont la notoriété n'est plus à faire, représente une valeur tant morale que financière ne pouvant souffrir, désormais, être remise en cause de la sorte. Il y va de la crédibilité de toute la presse algérienne et du bon sens lui-même. Ce n'est, du reste, pas un hasard si dans sa réponse, le journal arabophone parle de déontologie et se décide, sans doute la mort dans l'âme, à révéler une partie des graves, très graves, phrases dites par Rebrab et qu'El Khabar s'était auparavant gardé de rendre publiques sur demande instante du concerné. Ce dernier, en cherchant à avoir le beurre et l'argent du beurre (cette maxime n'a jamais été aussi proche de la réalité que pour le patron de Cevital) risque de tout perdre en même temps. En citant nommément le Président de la République, menaçant aussi de révéler celui du grand général intervenu dans ses affaires sulfureuses, El Khabar a rapproché un peu plus cet homme du verdict de la justice. Cet homme qui, trop longtemps durant, a vécu au-dessus des lois et des hommes, a cru pouvoir éternellement manipuler à son gré les médias en contrepartie de quelques pages de pub.