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L'incertitude de l'après-guerre
IRAK
Publié dans L'Expression le 05 - 05 - 2003

Les Irakiens sont plongés dans l'expectative ne sachant quel sort est réservé à leur pays.
Chaque jour, les Américains découvrent un peu plus qu'il est plus facile de faire la guerre que de la conclure. La guerre, dont la fin officielle n'est toujours pas annoncée, n'en finit pas cependant de faire mesurer ses retombées pour le peuple irakien qui ne sait toujours pas à quoi s'en tenir. Les aléas de la guerre sont terribles pour les Irakiens qui, du jour au lendemain, se sont retrouvés dans une situation, aussi lamentable, sinon pire, que ce qu'elle était sous le régime déchu de Saddam Hussein. Un régime qui aura laissé un peuple déshérité, privé de tout et, plus singulièrement, des commodités indispensables à la vie telles que l'électricité, l'eau notamment, dont l'inexistence dans certains quartiers, ou encore la destruction de centrales électriques et d'eau potable dans d'autres, ont induit des bouleversements dramatiques pour une population dont une bonne majorité est privée par ailleurs de travail. C'est dans ce contexte difficile, que les Américains se tâtent ne sachant vers quelle priorité se tourner. C'est du moins l'impression que donnent les officiels de la coalition, notamment dans la capitale Bagdad, où ils n'arrivent pas à réunir un pouvoir irakien de transition crédible. De fait, le contact entre la population irakienne et les Américains se fait mal et les réticences de la population, notamment des notables, à collaborer - le chef intérimaire de la police de Bagdad, Zoulair Al-Nouaimi, qui a démissionné de son poste, en donne un aperçu - accentue les difficultés de forces d'occupation à établir un modus vivendi avec les Irakiens.
A tou le moins pour, d'une part, remettre l'Irak au travail, rouvrir les écoles et les universités, d'autre part, réduire la criminalité, assurer la sécurité du pays et de la population. Aspects, à la limite fastidieux, que les Américains aimeraient voir pris en charge par les Irakiens eux-mêmes. Ceux-ci, comme détachés de tout, ne donnent pas l'impression de s'inquiéter de la dérive dans laquelle leur pays plonge chaque jour davantage. Sur le plan du devenir immédiat du pays, et pour pallier les difficultés «culturelles» et politiques qu'ils rencontrent dans leur administration de l'Irak, les Américains semblent avoir opté pour le partage de ce pays en trois secteurs chapeautés chacun par un des membres de la coalition, - Etats-Unis, Grande- Bretagne, Pologne - et supervisés, à leur tour, par l'administrateur provisoire, le général à la retraite, Jay Garner, lui-même placé sous la férule du futur super-administrateur Paul Bremer. Outre les trois pays cités de la coalition, Washington va demander à la Bulgarie, au Danemark, aux Pays-Bas, à l'Ukraine, à l'Italie et à l'Espagne, notamment, d'envoyer des policiers pour assurer la sécurité dans les villes irakiennes. Ainsi, les Etats-Unis veulent impliquer le maximum de pays afin d'assurer la sécurité ainsi que les faire participer à la «reconstruction» de l'Irak, sans pour cela passer par un mandat de l'ONU. De fait, Washington agit en tant que «Conseil de sécurité» décidant directement de tout ce qui touche à l'Irak. De fait, les Nations unies sont mises dans l'incapacité d'agir alors qu'elles ne cessent de mettre en garde contre le désastre humanitaire qui menace l'Irak, mises en garde qui, pour le moment, semblent n'avoir que peu d'effet sur les Etats-Unis qui ont, à l'évidence, d'autres préoccupations que celles de se pencher sur le cas d'un pays se trouvant quasiment au bord de l'abîme, dont les deux tiers de la population dépendent aujourd'hui de l'aide alimentaire internationale. Et la situation actuelle du pays ne permet pas la fluidité de l'arrivée de cette aide. Raison pour laquelle les sanctions imposées par l'ONU à l'Irak doivent être levées. Mais encore faudra-t-il que cela soit fait dans la légalité des règles du droit international. C'est-à-dire qu'il appartient au seul Conseil de sécurité, qui sanctionna l'Irak, de lever cette condamnation, alors même que les Américains demandent cette levée uniquement pour pouvoir exploiter à leur convenance le pétrole irakien. Ce à quoi s'opposent nombre de membres du Conseil de sécurité. George W.Bush, qui a refusé de donner le temps aux experts de l'ONU pour trouver les armes de destruction massive que détiendrait l'Irak, et qui ont motivé la guerre contre ce pays, estimait hier, que «nous trouverons (ces armes) (...) ce n'est qu'une question de temps». Alors que le peuple irakien désorienté souffre, les occupants américano-britanniques peuvent-ils se défaire de leurs responsabilités envers ce peuple qu'ils ont décidé d'administrer, ou se permettre de laisser le temps au temps?


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