Le changement du gouvernement mettra un terme à la crise au sommet de l'Etat. C'est officiel: le gouvernement Benflis est tombé hier en fin de matinée. Le Président de la République a chargé Ahmed Ouyahia de former un nouvel Exécutif quelques heures après avoir décidé de la fin de mission de son prédécesseur. Cette nomination est quelque peu une première dans l'histoire de l'Algérie indépendante, au sens qu'elle concerne un homme qui a déjà occupé cette fonction auparavant. Mais plus que cela, le choix d'Ouyahia n'est pas fortuit, relèvent de nombreux observateurs. Ces derniers insistent sur le fait que de nombreux facteurs concourent à justifier la désignation d'Ouyahia plutôt qu'une autre personnalité politique. La première a trait au fait que le désormais nouveau Chef du gouvernement tient solidement les rênes d'une formation politique qui, quoi qu'on ait dit à son propos, n'en est pas moins homogène et dispose de 46 représentants à l'Assemblée populaire nationale, élus à l'occasion d'une élection reconnue comme transparente par les principales capitales. Autant dire qu'en nommant Ouyahia, le chef de l'Etat s'appuiera sur un allié sûr, avec en prime, une machine électorale rodée et disposant d'une réelle expérience politique. Au RND, se joindront les hommes du cercle présidentiel, écartés du FLN, mais toujours influents dans leurs régions d'origine, à l'image de Belkhadem, Barkat et Hadjar, pour ne citer que les plus en vue. Ces derniers sont susceptibles de convaincre une partie de l'électorat, traditionnellement acquis au FLN. Cela pour dire que le Président de la République entend mettre de son côté toutes les chances de réunir la base politique la plus large possible sans en référer au FLN version Benflis, dont les intentions en ce qui concerne la prochaine échéance électorale semblent diverger avec celles du chef de l'Etat. Aussi, à moins d'une année de la présidentielle, Bouteflika place ses pièces sur l'échiquier politique et passe à la vitesse supérieure, en écartant celui qui, désormais passe pour son plus important adversaire. L'autre raison qui plaide pour la nomination d'Ouyahia est contenue dans le communiqué de la présidence de la République annonçant sa prise de fonction. En effet, l'on lit sur le communiqué que le choix se base sur le fait que le nouveau locataire du Palais du gouvernement «a déjà acquis une expérience très utile pour la gestion du pays dans ses différentes responsabilités et, en particulier, à la tête du gouvernement». Plus que cela, en fait, il est clair que les positions d'Ouyahia sont en phase avec l'essentiel du programme présidentiel à l'exception de la loi sur les hydrocarbures, dont le gel constitue un facteur encourageant. Par ailleurs et au plan de la gestion des affaires de la République, le changement du gouvernement mettra un terme à la crise au sommet de l'Etat, dont l'une des plus importantes conséquences est la non-tenue depuis des semaines du Conseil des ministres. Aussi, le retour d'Ouyahia aux affaires permettra-t-elle à la machine de l'Exécutif de fonctionner de nouveau, d'autant que des dossiers prioritaires attendent d'être traités, à l'image de la crise en Kabylie ou le dialogue avec le partenaire social déjà engagé par l'équipe de Benflis. En fait, le temps presse et le nouveau locataire du Palais du gouvernement va entamer «incessamment» ses consultations pour la composition de son équipe gouvernementale qu'il soumettra «dès que possible, à l'approbation du Président de la République conformément à la Consti-tution», annonce le communiqué de la présidence. Enfin, la passation de consignes entre les deux hommes a eu lieu hier, en fin d'après-midi.