Poussé par les pressions exercées par l´opposition locale, qui a retrouvé un certain regain de forme, et singulièrement par les Etats-Unis, le président égyptien a fini par jeter du lest en annonçant, au début du mois dernier, la prochaine mise en oeuvre d´un amendement de la Constitution qui ouvre la voie à des élections présidentielles pluralistes. Cette ouverture du raïs égyptien est quelque peu dans l´air du temps mais reste une ouverture au forceps, imposée par les pressions extérieures et par la rapide évolution du monde arabe contre lesquelles Hosni Moubarak n´a pas en réalité de parades appropriées. En effet, c´est forcé et contraint que le raïs égyptien a dû, -en contre-temps avec le programme qu´il a tracé pour les prochains mois avec en perspective la présidentielle- céder sur la forme, en instruisant le Parlement, dominé par son parti, le PND, de préparer des amendements à la loi fondamentale aptes à ouvrir le champ politique égyptien en permettant le pluralisme politique. Reste certes à voir ce que seront ces amendements et si effectivement ils participeront à lancer l´Egypte sur la voie de la démocratie. Aussi, l´annonce de l´élection du futur président égyptien au suffrage universel constitue une avancée certaine pour peu que le citoyen égyptien puisse s´exprimer dans ses choix en toute liberté et indépendance. De fait, comme cela a pu être démontré ailleurs, notamment en Afrique, le pluralisme politique - et des élections pluralistes - ne constitue pas en soi une garantie suffisante de liberté pour le choix citoyen, d´autant plus qu´en Egypte, le président, généralement l´homme fort du moment, est désigné par le Parlement, désignation qui est systématiquement approuvée par référendum par le peuple. Il est patent que la démocratie qui est d´abord une culture politique, ne se fait pas par ordonnance, et la timide ouverture initiée par le président Moubarak, qui y a été poussé à son corps défendant par les événements, est loin de constituer une panacée pour un pays qui a vécu à l´ombre de la dictature tout au long des cinq dernières décennies. En fait, cette «révolution» dans la loi fondamentale sera tout au plus un ersatz de démocratie, alors qu´il ne fait pas de doute que Hosni Moubarak, très probablement candidat à sa propre succession, a toute les chances de conserver la haute main sur les affaires du pays. De fait, le président égyptien a vite fait de rectifier le tir en précisant que sa décision d´amender la Constitution et d´ouvrir des espaces de liberté par le pluralisme politique n´a aucun rapport avec l´opposition égyptienne et encore moins avec les pressions étrangères, notamment américaines. Toutefois, ces dénégations auraient été plus crédibles si le raïs égyptien avait pris les devants en prenant les initiatives de réformes sans qu´il y soit contraint par les évolutions que connaît la région arabe sous les pressions conjuguées des événements et de la superpuissance mondiale. De fait, les amendements, -qui doivent être finalisés d´ici le mois de mai-, apportés à la loi fondamentale égyptienne, auraient été plus crédibles s´ils avaient été décidés plusieurs mois avant l´échéance présidentielle pour donner aux candidats de l´opposition de se préparer avec le minimum de garantie et de chance de faire jouer au choix citoyen son rôle. Aussi, cette réforme de la Constitution vient-elle un peu tard ne serait-ce que du fait qu´elle vient à quelques mois seulement d´un important scrutin que sont les élections présidentielles. En fait, acculé dans ses derniers retranchements, notamment après la fin de non-recevoir opposée par le raïs égyptien au projet américain de «Grand Moyen-Orient», Hosni Moubarak se devait de donner des gages de réformes internes pour ne point être totalement isolé dans un monde arabe soumis aux fortes pressions américaines, Washington étant décidé à forger le Grand Moyen-Orient à sa mesure et le raïs égyptien n´avait pas d´autre choix que de se plier aux desiderata de l´Oncle Sam.