Promulgué en février 1992, il a été reconduit chaque année en raison de la situation sécuritaire. L'état d'urgence sera levé incessamment apprend-on de sources concordantes. Le décret portant sur sa levée serait sur le bureau du Président de la République, ajoutent encore nos sources. Promulgué en février 1992, l'état d'urgence a été reconduit chaque année en raison de la situation sécuritaire. Du coup, les libertés publiques ont été sérieusement limitées. C'est ce qui explique la campagne menée par les partis d'opposition, essentiellement le FFS et le PT ainsi que certaines associations de la société civile. Aussi bien chez les uns que chez les autres, la question de l'«impunité» revient comme un leitmotiv. Cela fera d'ailleurs les choux gras de la presse étrangère, notamment française, qui alimentera sa campagne anti-algérienne. Après avoir fait l'objet de plusieurs effets d'annonce, la levée de l'état d'urgence a été maintes fois démentie. Pourquoi cette décision maintenant? Hormis le fait que la menace terroriste n'est plus ce qu'elle était malgré la persistance de quelques attentats dans des régions circonscrites du pays, il semble que cette fois les décideurs ont pris la mesure de l'ampleur des dégâts occasionnés par cette situation de «non-droit» sur les ressorts de la société. Ceux-là mêmes qui ont empêché l'Algérie d'abdiquer devant la déferlante terroriste et qui montrent des signes inquiétants d'affaiblissement. Paradoxalement, l'avocat Farouk Ksentini, président de la Commission nationale consultative de promotion et de protection des droits de l'Homme (Cnppdh), a, indirectement, suggéré le 28 février dernier que l'état d'urgence sera maintenu. Prétextant le terrorisme «qui fait encore des victimes», Farouk Ksentini fera remarquer cependant que «le maintien de l'état d'urgence ne semble pas être totalement justifié». Justement, l'état d'urgence a toujours été qualifié d'alibi à l'impunité. Dans ces conditions, quel sera concrètement l'impact de la levée de l'état d'urgence sur la société et sur les questions brûlantes que sont les droits de l'Homme, les disparus, l'impunité, auxquelles il convient d'ajouter la crise de Kabylie. Pour rappel, le rapport de la Commission Issad sur les événements de Kabylie a relevé des dérives qui y ont été constatées chez les gestionnaires de la crise et qui sont en rapport direct avec l'application du décret présidentiel relatif à l'état d'urgence. Un rapport qui semble avoir fini dans les tiroirs de son commanditaire. En attendant de savoir quelles seront les mesures concrètes qui accompagneront l'imminente décision du levée de l'état d'urgence, on fait savoir que les rapports des deux commissions, celle de la réforme de la justice et celle des structures de l'Etat, ont permis une avancée dans la refonte des textes de loi en faveur de la réhabilitation du champ politique et des libertés. Dans cet ordre d'idées, on croit savoir que la mission qui échoira au gouvernement Ouyahia sera de driver ces réformes au plus vite pour éloigner l'Algérie, une fois pour toutes, des tirs croisés des états-majors politiques et militaires d'outre-mer qui misent sur son effritement pour justifier leur intervention au nom du «devoir d'ingérence humanitaire». Concernant la donne islamiste en rapport avec le FIS dissous et l'avènement du terrorisme, on croit savoir également que le numéro 2 du parti dissous, qui doit terminer de purger sa peine de 12 ans le 12 juin prochain, est déjà élargi et serait en train de se remettre dans une résidence d'Etat dans la perspective de son départ en exil, sur sa demande, ajoutent encore nos sources. Enfin, d'aucuns s'interrogent si le dénouement de cette tragédie nationale qui a endeuillé le pays durant plus d'une décennie, pourrait avoir lieu par la promulgation d'une grâce présidentielle, comme celle décrétée par le Président Chadli Bendjedid au lendemain des événements tout aussi tragiques que ceux d'Octobre 1988? Des observateurs avisés avancent que cela serait possible à condition que l'Etat accompagne cette décision par un train de mesures à l'instar de celle annoncée par Ksentini en parlant de la création d'une sous-commission qui se chargera du dossier des disparus forcés imputés aux éléments des forces de sécurité ainsi qu'aux groupes islamistes armés. En somme, la levée de l'état d'urgence n'aurait aucun impact sur la situation de l'Algérie à l'intérieur et à l'extérieur si elle ne révolutionne pas les trois pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire) ainsi que les médias.