Que sont devenus nos hittistes? Vous vous rappelez? C´était dans les années 80. C´était la tendance qui avait succédé à cette autre tendance qu´était la tchi-tchi. La tchi-tchi était aux jeunes de nos villes ce qu´était le titi parisien aux Français. On y accédait une fois avoir dépassé le cap de ce que l´homme politique, M.Bouhara, appelait la rurbanisation. Ni rural, ni tout à fait urbain. C´était l´époque de la «ruée vers...les villes». L´exode rural. Les Algériens se réappropriaient l´Algérie utile de laquelle la colonisation les avait chassés. De nouveaux comportements étaient apparu. Quelques spécialistes évoquaient la vie à la verticale (dans les villes) et la vie à l´horizontale (dans les campagnes). Passer de l´une à l´autre n´est pas sans effet. Ce sont tous ces travers induits que M.Bouhara a rassemblés dans le concept (rurbain) qu´il a lancé. La tchi-tchi en faisait partie. Le hittisme aussi. La différence se situait entre une forme de raffinement et une autre de désoeuvrement. Si les tenants de la tchi-tchi perdurent encore et se manifestent notamment par toutes ces jeunes mamans qui parlent à leurs bambins en français croyant faire chic, les hittistes que l´on croyait, à tort, comme étant les victimes du chômage qui sévissait après le choc pétrolier de 1986, ont pris des rides et des cheveux blancs mais ils sont toujours là. Beaucoup parmi eux sont même à la retraite. Nos jeunes, aujourd´hui, sont plus rationnels. Ils n´ont pas, comme leurs aînés, le syndrome du «mur». Depuis, le chômage a reculé et la parabole et l´Internet sont passés par là. Pour le peu qui reste et qui ne travaillent pas (informel ou pas) ils sont, soit face à la télé, soit au cyber. Les temps ont changé. Nos jeunes aussi et en mieux. Ils ont acquis des qualités qui les rendent productifs pour eux et pour la collectivité. Qui, à la tête de la microentreprise et grâce au crédit Ansej, fait tout pour améliorer son ordinaire et se faire une situation, qui, à la faveur de l´implantation de sociétés étrangères, réussit dans son challenge d´employé modèle, tous ont la tête pleine de projets. Ils ont intégré dans leur mode de pensée l´effort et la performance. Ils ont ce sentiment de vouloir toujours être les premiers. Dans un tel bouillonnement, il ne peut valablement y avoir de place à l´oisiveté. De cette oisiveté qui «figeait» nos hittistes. Qui «fige» encore malheureusement. Car nos hittistes sont toujours là, même s´il ont pris de l´âge. Ils sont là formant des grappes humaines dans les quartiers. Ils passent leur temps à parler pour ne rien dire. Leurs débats sont stériles. En réalité, ils font semblant de parler car trop occupés à scruter l´horizon et «happer» tout ce qui bouge. Ils sont «analphabètes» dans tout ce qui touche aux nouvelles technologies. Alors, au lieu du cyber, ils se plantent dans le coin le plus stratégique du quartier d´où ils surveillent les allées et venues des voisins. Rien n´échappe à leur «vigilance». Ni la dernière tenue de la fille du voisin, ni la voiture qui a accompagné la dame qui tient le salon de coiffure. Très souvent, c´est vers eux que se dirige le facteur dès qu´il a une difficulté à placer son courrier. Ils sont au courant de tout. Ce n´est pas par hasard si les concierges ont été rayés de nos corps de métiers avec l´arrivée des hittistes. Une légère prospective permet d´espérer le retour des loges de conciergerie dans une vingtaine d´années. Le temps que les hittistes passent de vie à trépas. Ce jour-là, la rue algérienne n´en sera que plus belle. Sans ses voyeurs. ([email protected])