Le très jeune détenu, client de Maître Amine Morsli, risque une «raclée» du Code pénal, car il traîne derrière lui un gros boulet nommé: inculpation de coups et blessures avec arme blanche, article 264... Une des victimes reprend les faits qui ont débuté dans la rue avec des mots jusqu´à l´usage du couteau ayant entraîné deux blessures profondes à telle enseigne que la victime, ressentant une grosse bouffée de chaleur, a couru aux urgences mettre un terme à l´hémorragie. Le premier témoin n´a, évidemment, rien vu ni entendu: «Je n´étais arrivé sur les lieux qu´après les faits», a-t-il dit, poussant la juge à appeler le second témoin pour prêter serment. C´est un voisin. «Vers onze heures, Samir, l´inculpé est venu me raconter que Farouk a dit des choses pas gentilles à son propos. Après quoi, Samir est rentré chez lui, suivi de Farouk», raconte le témoin qui poursuit que «Samir est ressorti de chez lui en sautant au cou de Farouk. A l´issue de la rixe, on m´a parlé de sang mais moi, je jure que je n´ai pas vu de sang», ajoute le témoin avec qui la juge échange des propos allant droit vers la vérité, car cette Leïla Fellouh est une présidente qui ne s´en laisse jamais conter. Loin de là. Maître Ghattas, l´avocat de la victime, pose une question relative à un autre témoignage qui disait que le témoin avait commencé à parler avec Samir, le premier, avant la bagarre. Le témoin dit non. Pour la partie civile, Maître Ghattas s´appuie sur le fait que l´inculpation est une accusation de tentative de meurtre, pas de coups et blessures, ayant traîné des blessures profondes avec quarante-cinq jours d´incapacité et deux opérations sensibles au bloc de l´hôpital où les présents n´avaient donné aucune chance au blessé dont le sang coulait à flots. L´incompétence est donc demandée, car trois coups de couteau dont un a été porté au bas du dos, ce n´est pas la correctionnelle. A défaut, si le tribunal retient l´inculpation, une expertise médicale est demandée. Djamila Benkhettou, la procureure de l´audience réclame dix-huit mois de prison ferme et une amende. Lentement, Maître Amine Morsli pose la problématique de l´inculpation. «Nul n´a le droit de réqualifier des faits, à part le parquet», s´écrie soudainement l´avocat qui éloigne du revers de la main les demandes de son aîné, Maître Ghattas qui reste de marbre, respectant les coutumes. Le conseil aborde par la suite cette histoire de récidive: «Seul le président peut ou non prendre en considération les circonstances atténuantes.» «Le casier contient des faits pour lesquels mon client a payé et, lourdement», a encore marmonné le défenseur qui s´en est ensuite pris au témoignage qui a viré à cent quatre-vingts degrés, avant d´aborder la personnalité de l´inculpé qui fait partie des gens qui ne peuvent avaler la diffamation, l´insulte et l´injure. «Oui, il n´avait pas à se faire justice, mais il mérite au moins des circonstances atténuantes même si le tribunal ordonne une expertise médicale», conclut Maître Morsli qui n´avalera pas la réplique de son confrère qui est revenu à la requalification des faits, à l´incompétence et au renvoi en Crim de Samir. «Encore une fois, la défense repose au tribunal l´autorité que la loi lui confère en matière de déqualification de fait», rajoute, à la hâte, le défenseur que le jeûne n´a pas encore «abattu», contrairement à Maître Omar Abdenour Ath Boudjemaâ qui a demandé, discrètement, le report de son affaire, somme toute banale où son client n´est pas détenu. Le verdict aura été une peine de prison assortie du sursis.