«Un film n´est pas seulement une histoire que le cinéma vend, mais aussi une culture, un pays, un autre type de consommation. Cela, les Américains l´ont très bien compris.» Bertrand Tavernier La presse s´est réjouie hier en ouvrant ses colonnes sur la consécration des deux films algériens Mascarades et La maison jaune aux Journées cinématographiques de Carthage 2008. Mais le fallait-il vraiment? Les deux films algériens ont, certes, remporté des prix mais quels prix! Prix de l´enfance, de la première oeuvre et Prix spécial du jury. Autant dire que ces prix sont de la poudre aux yeux, puisque les meilleurs prix des JCC sont les Tanits, équivalents des Césars ou des Oscars (Que Dieu me pardonne). Autant dire que les prix remportés par nos cinéastes algériens sont des prix de consolation, qui n´ont aucun poids financier et artistique pour les critiques et les professionnels. Ce ne sont pas ces petits prix qui rendront au grand cinéma algérien ses lettres de noblesse. A cela s´ajoute le copinage douteux de Dora Bouchoucha avec Djamila Sahraoui, qui lui a accordé une subvention pour financer son nouveau scénario. Dora Bouchoucha, la blonde du cinéma tunisien, qui a bénéficié de tous les éloges en Algérie et à qui Hamraoui Habib Chawki avait déroulé le tapis rouge, a la mémoire courte. Elle qui a réussi à écarter de la direction des JCC, le parrain du cinéma tunisien et grand ami du président Ben Ali et du défunt Bourguiba, Rachid Ferchiou, qui a même occupé le poste de président de la commission de contrôle des films (1981-2002). Pionnier des variétés de la TV tunisienne, il avait réalisé entre 1965 et 1971 plusieurs variétés dramatiques, intervilles et téléfilms. Rachid Ferchiou a mené une carrière remarquable en tant que réalisateur et scénariste. Son dernier film L´Accident est un pur chef-d´oeuvre. Dora Bouchoucha comme Nabil Ayouch font partie de cette génération de responsables qui font du cinéma maghrébin un pont vers leurs intérêts européens et français. Mais qu´on ne se trompe pas, les JCC ont toujours relégué, par rivalité artistique, les Algériens au second plan. Et Rouiched l´avait bien dit quand le jury a préféré L´enfant de Halfaouine de Farid Boughedir aux tribulations du maître de la comédie algérienne dans Hassen Niya, «Touansa darouna tchektchika». On l´a bien senti, en regardant en direct sur la chaîne tunisienne 27, la cérémonie de remise des prix. Lyès Salem, visiblement irrité par ces prix non justifiés, vu le succès de son film, a crié à qui voulait l´entendre: «Algeria is back (l´Algérie revient)». L´Algérie reviendra, quand les films qu´elle produira, gagneront des Oscars, comme à l´époque du Bal d´Ettore Scola, dont l´Algérie n´a pas daigné récupérer les droits du film, comme Z de Costa Gavras, ou encore nominés comme Poussière de Vie de Bouchareb, et cela même si Indigènes n´est pas un film algérien. L´Algérie reviendra, quand ses films seront sélectionnés en sélection officielle à Cannes et pas dans les sections parallèles aux côtés des pays émergents. L´Algérie reviendra, quand ses comédiens seront consacrés en montant les marches de la Croisette comme Keltoum en 1966. L´Algérie reviendra quand ses enfants feront des films pour transmettre une culture et non pas pour insulter une société en perpétuel changement. L´Algérie reviendra surtout quand elle accueillera ses enfants comme des stars avant leur consécration. [email protected]