41 morts et 60 blessés Un quintuple attentat terroriste a secoué la capitale économique marocaine, Casablanca, dans la nuit de vendredi à samedi, occasionnant la mort de 41 personnes alors que l'on relevait quelque 60 blessés, dont nombre d'entre eux dans un état grave. D'après les premières indications des services de sécurité marocains, ces attentats, commis par au moins douze kamikazes, ont constitué un cocktail entre voitures piégées, bombes et attentats-suicide perpétrés au coeur même de la grande métropole marocaine. L'attaque terroriste, qui survient moins de cinq jours après celle contre des complexes résidentiels à Riyad, capitale de l'Arabie Saoudite, porte à l'évidence la marque du «terrorisme international», comme l'affirmait hier, dans une première réaction, le ministre marocain de l'Intérieur, Mustapha Sahel. Quoique les victimes soient en majorité marocaines, les objectifs visés étaient, en revanche, des lieux de rendez-vous internationaux, restaurants, clubs-houses très fréquentés par les résidents, coopérants ou touristes étrangers, Occidentaux notamment. C'est ainsi que des bombes ou voitures piégées ont explosé à l'Hotel Safir, à la Casa de Espana (la Maison d'Espagne, cercle culturel très branché), le Cercle de l'Alliance israélite, (fréquenté par la communauté juive marocaine) et près du Consulat de Belgique... Donnant des indications sur cette série d'explosions, le ministre marocain, tout en révélant que trois suspects - et un kamikaze blessé - sont, actuellement, interrogés par la police, déclare «ne pas disposer, dans l'immédiat, d'identification précise des terroristes», relevant toutefois «la concomitance des attentats» de même que leur «mode opératoire» supputant que ces attaques portent «la signature du terrorisme international». Tout en affirmant que «la situation est totalement sous contrôle», Mustapha Sahel souligne que «le royaume du Maroc ne se laissera pas intimider, ni déstabiliser par ceux qui veulent, aujourd'hui, s'attaquer aux acquis démocratiques et constitutionnels de notre pays, par ceux aussi qui veulent remettre en cause les valeurs du pluralisme (...)». Quoique le responsable marocain ait été quelque peu évasif et n'ait, à aucun moment, prononcé le nom d'Al-Qaîda, il ne faisait pas de doute pour les observateurs et analystes - qui ont vite franchi le pas - que cette organisation n'est guère étrangère à cette cascade d'attentats qui viennent rappeler que l'organisation d'Oussama Ben Laden demeure toujours nuisible. Les attentats de Casablanca n'ont pas été revendiqués, mais il apparaît de fait que la similitude entre les attentats de mardi dernier à Riyad et ceux de Casablanca équivaut à une signature. Ces derniers mois, la police marocaine avait opéré plusieurs arrestations parmi les groupes islamistes singulièrement le coup de filet réalisé en mai 2002, qui donna lieu au démantèlement d'une «cellule dormante» d'Al-Qaîda, rappelle-t-on. Ces cellules préparaient, des attentats au Maroc, indiquaient les services de sécurité marocains à l'époque. De fait, l'attentat de Casablanca survient d'une part, quelques jours après celui perpétré à Riyad, d'autre part, au lendemain même de menaces, attribuées à Al-Qaîda, d'attentats contre l'Egypte et l'Occident. Il semble à tout le moins évident que les derniers attentats terroristes, à Riyad et Casablanca, soient liés à la mouvance terroriste internationale. Des experts avaient planché, vendredi, lors du Congrès du Conseil mondial du tourisme et du voyage (WTTC) à Vilamoura (Portugal), sur certains aspects du terrorisme international en relation avec le tourisme international. Se voulant rassurant, l'ancien secrétaire d'Etat adjoint américain, James Rubin, avait alors indiqué que le réseau terroriste Al-Qaîda «a été nettement affaibli après les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis», mais, ajoute-t-il, «demeure une menace sérieuse pour certaines zones d'Asie et du Moyen-Orient», estimant que les groupes islamistes représentent, selon lui, «un risque plus important dans les pays dont les membres sont originaires: Arabie Saoudite, Yémen, Philippines, Indonésie et quelques pays du Sud-Est asiatique». Toutefois, le quintuple attentat de Casablanca met en défaut cette thèse et montre, en fait, que le terrorisme, auquel la communauté internationale avait longtemps laissé la bride sur le coup, montre, a contrario, qu'il a la capacité d'agir et la mobilité lui permettant de frapper partout et à tout moment et pas seulement là où on l'attend. Les attentats de Riyad et de Casablanca montrent surtout que la lutte contre le terrorisme international n'est l'affaire ni d'un pays ni celle d'un groupe de pays, mais bien celle de la communauté internationale dans son ensemble, sous l'égide incontournable de l'ONU. Pour avoir perdu de vue cette vérité, les Etats-Unis notamment, certes traumatisés par les attentats de New York et de Washington, en faisant de la lutte antiterroriste une «affaire personnelle», ont fait perdre beaucoup de temps à la nécessaire éradication de ce phénomène, tout en donnant à Al-Qaîda et aux organisations du terrorisme international la possibilité de renforcer leurs capacités de nuisance.