Un présumé coupable de coups et blessures à l´aide d´une arme blanche risque, sans l´assistance d´un défenseur, les affres d´une sévère condamnation. Aziz F., 29 ans, avait pour avocat Maître Lamouri qui a encore réussi un «truc». Nadia Amirouche, la présidente de la section correctionnelle du tribunal de Hussein Dey (cour d´Alger) ne veut jamais prendre de risques ni avec les justiciables ni avec les avocats, ni encore moins avec la tutelle, ce monstre sacré à deux têtes: exécutive et administrative. C´est pourquoi, dans cette sale affaire de coups et blessures volontaires à l´aide d´une arme blanche (un gourdin), elle aurait bien voulu voir en face d´elle la victime qui n´est pas venue à la barre confirmer ses graves déclarations. Faisant bon coeur contre mauvaise fortune, la juge décide de foncer sur ce dossier où il y a un détenu allant sur la trentaine et donc à l´avenir menacé. Flanqué de son avocat, Messaoud F. dit «Aziz» F., il va de suite nier avoir visé les membres supérieurs avec un gourdin. «Ce qui est sûr et certain, madame la présidente, c´est que nous nous sommes pris à la gorge à mains nues. Nous avons roulé au sol. Il était sur moi. J´avais mon genou sur son avant-bras. Comme je pèse plus de 90 kg, je pense que la blessure a apparu en fin de lutte. Ce que je peux vous assurer, c´est que j´ai livré un combat loyal. Nous étions du côté des Sablettes. Il m´a défié. Je n´ai pas eu froid aux yeux», raconte l´inculpé qui reconnaît avoir, lui aussi, reçu quelques «artichauts» sur le corps. «Lui aussi est un poids lourd. A la fin de la rixe, nous nous étions séparés en promettant une revanche. C´est pourquoi, je ne comprends pas la présence du certificat médical car je n´ai, à aucun moment, pris un bâton, un couteau ou même un fil. Je me suis servi de mes seuls poings. Je le jure.» D´ailleurs, Maître Lamouri va disséquer l´article de loi retenu. Les termes de l´article 264 (loi n°06-23 du 20 décembre 2006) concernant les violences volontaires du titre 2 portant crimes et délits contre les particuliers (contre les personnes pour ce qui est du chapitre 1) du Code pénal, ne laissent aucun doute sur la gravité sur les coups et blessures volontaires avec pour résultat un arrêt de travail de plus de 15 jours. Par ailleurs, un large éventail de manoeuvres est offert aux juristes lors de la lecture dudit article, et on peut parcourir quatre «alinéas» qui ne disent pas leur nom. Il y a d´abord la peine prévue en l´espèce: «Un emprisonnement de un à cinq ans et d´une amende de cent mille à cinq cent mille dinars.» Ensuite, «le coupable peut être privé des droits mentionnés à l´article 14 de la présente loi...». «La peine de prison passe à la réclusion à temps, de cinq à dix ans quand les violences auront été suivies de mutilation ou privation de l´usage d´un membre...» Enfin, dans le dernier «alinéa», dix à vingt ans de réclusion à temps ont été retenus si les coups ont donné la mort sans intention de la donner. Après avoir disséqué cet important article de loi, Maître Benouadah Lamouri revient vers l´inculpation du jour pour attitrer l´attention de la présidente sur l´aspect «brumeux» du contenu du certificat médical décryptant les blessures à l´avant-bras de la victime. «Vous savez mieux que quiconque qu´un certificat médical est rempli par le légiste qui se base sur la transcription du médecin des urgences prenant acte des blessures constatées, mais surtout sur la dictée de la victime. Le certificat médical est une ´´lampe´´ qui guide la preuve de la présence de coups, mais qui ne vous éclaire pas sur l´auteur des coups. Voilà la vérité, madame la présidente», a marmonné le conseil, qui a préconisé que la victime aurait pu être agressée au gourdin quelque temps après, puisque entre la bagarre avec Messaoud dit «Aziz» et la présentation, une autre rixe aurait pu éclater, la victime étant réputée comme un provocateur et un chercheur d´histoires. Amirouche prend alors la résolution de relire un long passage des déclarations de la victime qui reprend le mot gourdin (qazzoul) à cinq reprises: «Le tribunal est perplexe. Bref, c´est bon. Puisque la victime a choisi de rester chez elle, passons. Vos demandes!», dit entre ses dents la présidente. Zahia Houari, la jeune procureure réclame le maximum de la peine. Ce qui permettra à la magistrate d´annoncer la mise en examen du dossier.