«Nul n´est prophète en son pays» L´Evangile selon saint Mathieu. Au moment où les relations diplomatiques algéro-françaises sont au plus bas, au moment où le Front national utilise le drapeau algérien pour faire campagne contre le danger islamiste en France, au moment où Mosaïc, la Fédération laïque des citoyens de sensibilité musulmane proteste contre les conditions de diffusion du documentaire, Musulmans de France à la télévision française, des Français d´origine algérienne s´illustrent à la cérémonie des Césars du cinéma français. Désormais, on a la preuve que la justice artistique existe en France et qu´à l´Académie des Césars, il existe des personnes qui ne sont pas influencées par la politique des salons, ni par les discours de la rue blanche, car leur seule source de motivation est le talent qui anime la génération d´aujourd´hui. Trois vedettes françaises d´origine algérienne, sont reparties du Théâtre du Châtelet avec la célèbre statuette de Marcel Cravenne. Le plus grand gagnant de cette soirée est incontestablement Tahar Rahim, qui a décroché deux Césars. Un comédien inconnu, il y a deux ans, et qui fut découvert par hasard lors d´une audition pour la série La Commune. Une série écrite par un autre Algérien, Abdel Raouf Dafri qui s´est illustré lors de cette soirée, en décrochant le César du meilleur coscénariste pour sa participation à l´écriture du script du film Un Prophète de Jacques Audiard. Cette soirée fut marquée par le succès inattendu d´Isabelle Adjani, qui a réussi à faire un retour fracassant sur la scène cinématographique avec un petit film que seule la chaîne Arte avait encouragé. Adjani, que les Algériens ont découvert en 1988, quand elle est venue à la fac de Bouzaréah faire un discours, à quelques mètres de la classe de Abassi Madani, pour défendre la démocratie algérienne à ses premiers balbutiements. Depuis, tout le monde en France et en Algérie a su que la «Reine Margot» du cinéma français, était d´origine algérienne et kabyle et qu´elle s´appelait en réalité Yasmine. En décrochant le César de la meilleure actrice grâce à son rôle dans La Journée de la jupe de Jean-Paul Lilienfeld, Adjani a relancé une carrière que certains avait enterré et s´offre une opportunité bien entamée pour son futur rôle de Lala Fathma Nsoumer dans le film de Mohamed Rachid Benhadj. Mais malgré ce triomphe des Algériens ou des Maghrébins de France, ils sont seulement prophètes aux Césars, dans le football, dans la chanson, dans la littérature et bien sûr dans le cinéma, mais le chemin de la démocratie raciale reste encore loin pour atteindre la véritable et réelle intégration sociale et politique en France. D´ailleurs, juste après les Césars, elle l´a bien montré en diffusant des courts métrages qui dénoncent le racisme et la discrimination dans la société française. Aux Etats-Unis, le premier acteur noir à avoir remporté l´Oscar du meilleur acteur était Sydney Poitier en 1963. Dans une démocratie américaine où toutes les chances sont permises, il a fallu tout de même attendre plus de 40 ans pour voir élire un président américain noir. Mais l´American Dream n´est pas comparable au Rêve Bleu de la France, surtout qu´à nos jours aucun député ou maire n´est d´origine arabe et encore moins d´origine «black» en France. [email protected]