«On peut être fier de n´importe quoi si c´est tout ce que l´on a.» John Steinbeck La rumeur enfle au sujet de la participation du dernier film de Rachid Bouchareb Hors la loi à la prochaine édition du Festival de Cannes. Cependant, l´un des coproducteurs du film, Tarek Ben Ammar, a reconnu qu´il n´était pas sûr que le film soit retenu en sélection officielle. En réalité, le problème qui subsiste demeure la nationalité sous laquelle le film sera présenté: au nom de l´Algérie ou au nom de la France? Les spécialistes affirment qu´il participera au nom de l´Algérie, même si celle-ci n´est pas le producteur majoritaire. Lors de sa dernière participation, Bouchareb avait présenté le film Indigènes au nom de la France. Ce qui lui a valu une campagne médiatique géante et surtout de décrocher le Prix d´interprétation. Alors qu´en revanche, il avait présenté le film aux Oscars au nom de l´Algérie, ce qui lui a valu de vives critiques dans l´Hexagone, mais aussi au Maroc. Mais cette fois, sa position artistique et thématique est différente. L´Algérie est d´abord coproductrice à part entière, alors que pour Indigènes, elle n´avait pas dépensé un dinar. En second lieu, ce nouveau film parle d´un pan important de l´histoire de l´Algérie: les massacres du 8 Mai 1945. Si le film Hors la loi sera présenté au nom de la France, il n´aura aucune chance d´être sélectionné, car il y a déjà, des films français qui sont pressentis pour aller en sélection officielle. La commission de sélection des films à Cannes, présidée par le président Gilles Jacob et le délégué général Therry Frémaux, aura la lourde tâche de choisir les films et de les rendre officiels le 15 avril prochain. Le réalisateur algérien reste religieusement silencieux face aux médias sur cette question. Selon certaines sources, Bouchareb ne souhaite pas être sélectionné dans les sections parallèles, tel que la Quinzaine des réalisateurs ou la Semaine de la critique. Son objectif est d´être retenu dans la sélection officielle et surtout de décrocher un prix à Cannes. (repartir sans prix serait une humiliation et surtout un revers pour son oeuvre). Il aurait déclaré à ses proches que le film sera fini d´ici le Festival de Cannes et que cette fois il visera le prix de la mise en scène ou celle du meilleur film. Car la plus grande ambition chez Bouchareb est de surclasser Mohamed Lakhdar Hamina, qui reste le seul cinéaste arabe, africain et algérien à décrocher une Palme d´or et le Prix de la première oeuvre. Un objectif difficile à atteindre devant la qualité de certains films aujourd´hui, qui ne sont pas récompensés pour le déploiement des moyens, mais pour la qualité de l´histoire et la hauteur du talent. Les spécialistes vous diront que le film Indigènes, n´est pas une grande oeuvre, mais le film doit bien son succès au sujet important qu´est la participation des Maghrébins issus de pays colonisés à la libération de la France. Mais le sujet traité par Bouchareb dans son dernier film n´est pas un sujet «ouvert» en France. Sa sélection au Festival de Cannes va, une nouvelle fois, relancer la question des «massacres» de la colonisation française, à deux ans des festivités de la décolonisation française. Pour ce faire, notre réalisateur doit déployer tout son talent pour convaincre et surtout faire connaître cet épisode important de l´Histoire de l´Algérie. Pour le moment? seule l´Algérie, à travers ses relais étatiques, l´ARC et la cinémathèque, défend ce projet et fait du lobbying pour faire de ce film la meilleure production algérienne en 2010. Pour le reste des pays producteurs, c´est avant tout une opération commerciale et pas politique. [email protected]