Le terrorisme, c´est la propagande par l´action. Walter Laqueur "Extrait de Le terrorisme" Imaginez un seul instant que l´Entv finance un feuilleton dramatique sur la naissance de l´ex-FIS en 1990 et le parcours de la bande à Bouali, Ali Benhadj et Abassi Madani et qu´on intitulerait bien El Djebha (Le front). Comment serait la réaction du téléspectateur algérien? Les 35 millions d´Algériens seraient branchés sur cette série et les audiences battraient tous les records d´audience. On se souvient encore de l´audience réalisée par l´Unique en 1990, quand Abassi Madani était invité à l´émission de Mourad Chebine Face à la presse. Plus de 20 ans après, l´islamisme politique fait toujours recette que ce soit sur Al Jazeera ou ailleurs et la plus grande preuve c´est l´audience réalisée durant ce mois sacré par le feuilleton Al Gama´a (La confrérie). Ecrit par le scénariste Wahid Ahmed, il ne plaît pas à tout le monde et est en train de battre tous les records d´audience en Egypte. Les annonceurs se frottent les mains et saluent cette fiction sur l´islamisme politique. Plus de cinq coupures de publicité passent à chaque diffusion du feuilleton. Certaines annonces faisant la publicité pour de la bière, sont même diffusées pour narguer les millions de musulmans qui la regardent durant ce mois sacré de Ramadhan. Selon un institut de sondage égyptien, le feuilleton a déjà rapporté 270 heures de publicité soit presque 4,5 heures d´annonce, représentant plusieurs centaines de milliers de dollars. C´est beaucoup plus que les autres feuilletons dramatiques égyptiens comme Echmaa el ahmar et Zahra et ses cinq maris, qui n´ont réalisé que 180 minutes de publicité alors que le feuilleton avec la comédienne tunisienne Hind Sabri Aaiz atagaweiz atteint 125 minutes de publicité. Ces chiffres et le succès du feuilleton sur Hassen El Banna, démontrent l´intérêt que porte le public égyptien et surtout arabe à la fiction politique. La série de trente-trois épisodes qui est diffusée juste après le ftour sur Nil Drama dépeint le fondateur du mouvement, Hassan El Banna, comme un extrémiste voulant imposer la religion par la violence, alors que les autorités égyptiennes sont dépeintes comme modérées et cherchant à éviter les affrontements avec les islamistes. Soigneusement filmé comme un film cinéma, le feuilleton est un modèle dans la précision dans tous les aspects vestimentaires et décors de l´époque. La production privée qui a été chargée de la réalisation de ce feuilleton et qui l´a vendu à la télévision égyptienne pour plus de 7 millions de dollars, a mis le paquet dans la reconstitution des faits. Le pic de l´audience du feuilleton a été atteint quand le film a commencé à aborder les assassinats politiques contre la classe dirigeante égyptienne et surtout l´assassinat du Premier ministre égyptien Mahmud Fahmi Nokrashi en 1948. Les Frères musulmans ont été interdits puis autorisés à plusieurs reprises par le pouvoir égyptien. Bien qu´elle ait officiellement cessé de prôner l´usage de la violence à la fin des années 1970, la confrérie a été déclarée à nouveau illégale en 1982, après l´arrivée au pouvoir de Hosni Moubarak. Officiellement interdite mais tolérée par le pouvoir, cette organisation a réalisé une percée spectaculaire sans précédent, lors des législatives de 2005, en raflant un cinquième des sièges. Ce feuilleton qui est considéré par le fils de Hassen El Banna comme une oeuvre de propagande du pouvoir en place, saura-t-il stopper l´émergence de la mouvance islamiste en Egypte? On le saura dans trois mois. [email protected]