On ne peut qu'accepter le sort. Mais c'est l'erreur de l'être humain qui engendre autant de pleurs, de drames et de souffrances. «On commence à s'habituer à la nouvelle vie imposée par le séisme du 21 mai dernier», lance Kamel, ce jeune de Zemmouri dont le village n'a pas résisté à l'onde de choc. Malgré la chaleur étouffante qui écrase les têtes, on tente tant bien que mal de consommer les heures, mais aussi à faire reculer l'ennui. Il est presque midi, au moment où nous faisons notre entrée dans ce vaste site de tentes dressées à même la poussière. Le piétinement du sol des uns et des autres tout au long de la journée a rendu le terrain désertique. La poussière envahit les toiles et le rare souffle d'air, venu de la mer proche rafraîchit un tant soit peu l'atmosphère. Pour les nombreuses familles rassemblées là, une nouvelle vie a déjà commencé. Hier, logeant dans de vastes appartements et villas, ils se retrouvent obligés de cohabiter avec de nouvelles figures, mais aussi, à passer les nuits fraîches sous des bâches. Il n'empêche que le courage constaté et exprimé démontre qu'on a relevé le défi et qu'on a supplanté le mauvais souvenir. «Je ne connais pas mes voisins de fortune, mais on s'entend très bien. On est tous des rescapés de ‘‘l'aventure'' mais que faire en ces circonstances douloureuses?», dira Ali qui a perdu deux de ses enfants, ensevelis sous les décombres. En effet, ce fonctionnaire des contributions a souffert intérieurement du cataclysme. Des larmes envahissent ses yeux, mais la fierté l'emporte sur les malheurs. Il s'accommode, au fil des jours, à cette nouvelle vie, jonchée de «découvertes» où le sentiment humain est des plus attachants. Hier, habitant un F3 dans un immeuble, il regarde aujourd'hui, «cette bâche» bleue comme abri. Les souvenirs remontent à la surface et on met tout sur le dos du mektoub. Dans les camps on se trompe pleinement, car les tremblements de terre ont toujours existé mais «c'est l'homme, l'être humain qui n'arrive pas à les maîtriser». «L'anarchie», «l'égoïsme», «la concurrence»...sont autant de facteurs qui ont guidé ces familles à ne rien respecter des normes de construction. Les architectes, les ingénieurs, les spécialistes...avides d'argent n'ont fait qu'accentuer les malheurs.