Le parti de Sadi tire sur la corde alors qu'une troisième voie est sur le point de s'imposer dans le mouvement. Quinze jours à peine après l'offre de dialogue lancée par le Chef du gouvernement Ahmed Ouyahia à l'adresse des ârchs, le mouvement semble entrer dans une phase de guerre larvée de leadership. En effet, après les «oui, mais...» des trois coordinations du mouvement citoyen, la question a pris une autre tournure depuis la rencontre-célébration du 2e anniversaire de la rédaction de la plate-forme d'El-Kseur le 11 juin dernier. Le RCD a rappelé à ses militants à Béjaïa, au cours d'un regroupement, l'impératif de maintenir le forcing sur la Coordination intercommunale de Béjaïa (Cicb) pour qu'elle adopte la «dissolution des assemblées élues» comme préalable à toute négociation avec le Chef du gouvernement Ahmed Ouyahia qui, lui, a réussi le coup de force de s'imposer comme l'interlocuteur des pouvoirs publics, entraînant dans son sillage le chef de l'Etat. Au cours de cette rencontre prévue initialement pour débattre des préparatifs de la convention régionale, le RCD a adopté une stratégie à même de faire aboutir cette action, nous a révélé une source du parti. Ce qui confirme la thèse selon laquelle le RCD joue son va-tout dans le dossier de Kabylie pour se repositionner vis-à-vis des décideurs. Mais surtout de crainte de se voir définitivement éliminé de la course. Aussi, ce regroupement auquel aurait même pris part le patron du parti, le Dr.Saïd Sadi, intervient dans un climat de divorce presque consommé entre les deux principales coordinations du mouvement, la Cicb de Béjaïa et la Cadc de Tizi Ouzou. Pour rappel, le conclave de la Cadc ayant débattu de l'offre de Ouyahia, a d'abord eu maille à partir avec les partisans de la tendance pure et dure du mouvement pour lesquels l'aboutissement de la plate-forme signifie tout simplement le départ du système en place. Un compromis «boiteux» a fini par être trouvé. Il a consisté en l'acceptation de l'offre à condition qu'elle soit accompagnée de gages de sincérité du pouvoir à aller vers la concrétisation «pleine et entière» de la plate-forme d'El-Kseur. Cependant, la rencontre d'El-Kseur, outre qu'elle a rabroué les autonomistes du MAK qui avaient failli être lynchés par la population n'était l'intervention du délégué Ali Gherbi, n'a pas moins mis à nu le fossé qui sépare la Cicb et la Cadc sur le sens à donner à ce dialogue. Des divergences patentes ont amené la délégation de Tizi Ouzou à quitter El-Kseur après avoir opposé son veto à une quelconque déclaration ou réunion et après avoir réussi à imposer le report du conclave d'Amizour au 26 et 27 juin courant. Curieusement, cela rappelle un scénario similaire qui s'est produit à Béjaïa, à la veille de la grande manifestation du 19 mai 1981. De l'aveu d'un animateur influent du Mouvement culturel berbère (MCB), une délégation du FFS, conduite à l'époque par Saïd Sadi et Ferhat M'henni, a fait le déplacement de Tizi Ouzou pour convaincre les organisateurs de la marche de surseoir au mouvement, sous prétexte que Hocine Aït Ahmed était en négociation avec le Président Chadli Bendjedid au sujet des revendications du Printemps berbère. Autant dire que les vieux réflexes ont la peau dure. Ce qui ne manquera pas d'apporter de l'eau au moulin des délégués du mouvement citoyen qui multiplient les efforts pour imposer une représentation qui transcende les courants partisans au prochain dialogue avec le gouvernement.