C'est du Sud que vient l'exemple de l'émancipation. Dans l'annuaire du football algérien, le nom de l'US Béchar Djedid aura, désormais, une place à part. Il apparaîtra, comme le club qui aura osé franchir le Rubicon et permettre à une femme de s'occuper de ses affaires. Nul ne contestera, en effet, que s'il y a une discipline sportive où le machisme règne sans partage, c'est bien le football. On veut parler, bien entendu, du football algérien, tant il est vrai, que ce qui se fait ailleurs, n'a rien à voir avec ce qui se pratique à l'intérieur de nos frontières. Il est vrai que la FAF tente, tant bien que mal, de mettre sur les rails, le football féminin, mais force est de reconnaître, qu'il s'agit là, d'une initiative loin de faire l'unanimité et qui passe comme étant une manoeuvre pour garnir la vitrine. On aurait bien voulu, pour l'exemple, que les nouveaux règlements généraux obligent les clubs de l'élite à engager une équipe féminine au même titre que ce qui se fait dans les autres sports collectifs. Pour en revenir à l'USBéchar Djedid, ce club donne une bonne leçon d'ouverture d'esprit aux grands de notre football, dont tout le monde sait qu'ils n'ont de grand que le nom et qui se pavanent avec l'argent du contribuable à la recherche d'un oiseau rare qui n'a rien de rare, et qui ferait bien parfois de changer de discipline, tant il fait peine à voir, balle au pied. Voilà donc un club de seconde division, un club du Sud de surcroît, qui laisse entrer dans son comité directeur, une femme. Elle n'est pas allée quémander ce poste; on est allé la chercher parce qu'on a estimé qu'elle pouvait contribuer à relancer ce club dont la situation est loin d'être encourageante. Pour rappel, l'USBéchar Djedid est un club qui a frôlé la relégation à la fin de cette saison. Evoluant dans le groupe Centre-Ouest, il avait dû faire face à d'énormes difficultés financières qui l'avaient presque obligé à se retirer de la compétition. Pour éviter le forfait, lors du match contre l'IRBHadjout, c'est la fédération qui l'avait pris en charge. Les mauvais résultats aidant, l'ancien comité directeur avait jugé utile de quitter la scène avant la fin de la compétition. Le wali, avait donc, nommé un directoire provisoire pour tenter de sauver ce qui pouvait être sauvé. Au sein de cette structure, il y avait un certain Badreddine Laoufi au poste de vice-président. C'est lui qui occupe depuis l'assemblée générale du club, tenue le 28 mai dernier, le poste de président. Une consécration pour cet entrepreneur dont l'âge doit également permettre à l'USBD de réaliser un autre record, puisque l'intéressé a, à peine, 30 ans. Il a auprès de lui non pas un vice-président, mais une vice-présidente. C'est là où se situe l'énorme différence avec tous les autres clubs du pays. Mme.Dalila Houasni, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, n'a rien, d'une illuminée ou d'une personne cherchant à sortir de l'ordinaire. Si elle se retrouve aujourd'hui à ce poste, c'est, d'abord, parce qu'elle aime le football. «C'est un sport qui me passionne depuis ma plus tendre enfance nous a-t-elle dit. Associée comme entrepreneur à l'un des sponsors du club, M.Mustapha Tasfaout (le cousin de Hafid, l'ex-capitaine de l'équipe nationale), cette dame originaire de Khemis Miliana, mère de trois enfants, semble savoir où elle met les pieds. Son meilleur soutien émane de son mari et de ses enfants «qui sont, ajoute-t-elle, mes meilleurs supporters». Habitante de Béchar Djedid, elle su faire l'unanimité autour de sa personne. «Dans les moments les plus difficiles du club, les joueurs ne manquaient jamais de venir me voir. En outre, comme vous le savez, Béchar est une région pauvre, manquant de loisirs. Il faut redonner vie au football car c'est pratiquement la seule discipline sportive susceptible de donner de la joie aux gens», indique-t-elle. Elle sait que la tâche qui l'attend ne sera pas de tout repos, à commencer par le mépris que pourraient afficher à son égard les responsables des autres clubs. «Ce sont des hommes, je me comporterai en homme avec eux», nous a-t-elle dit. Mais plus que cela, ce sont les difficultés financières qui lui font peur. Son président et elle nous ont fait savoir, que le wali de Béchar leur a promis une aide. Pour mener le bateau à bon port qui sera, selon les objectifs, le maintien, ils comptent sur l'apport des sponsors qui ont permis au club de surnager la saison dernière tels Ammari Hammadi, Zerouati, Belagraa, Tasfaout, ainsi que les autorités de Béchar à leur tête le wali. Nul doute qu'il faudra beaucoup de courage et de cran aux dirigeants du club béchari, qui ambitionnent de créer une équipe féminine et un centre de formation.