Neuf soldats américains tués et 17 Irakiens sont morts hier. Plusieurs attentats et accrochages à Kerbala, à Tikrit, à Sadr City (Bagdad) sur la base américaine de Taji (Bagdad), ont marqué la journée d'hier qui a eu son lot de morts et de blessés. Ainsi, neuf soldats américains et 17 Irakiens ont trouvé la mort hier, et dans la nuit de vendredi à samedi, au cours de diverses opérations de la guérilla et des forces de la coalition. La violence appelant la contre-violence, c'est encore les civils irakiens qui payent l'addition, qui constituent la majorité des victimes des combats de ces dernières semaines, notamment à Falloujah. Dans cette ville, hier encore, les marines américains, qui assiégeaient Falloujah, ont empêché ses habitants, ayant fui les combats, de réintégrer leurs domiciles. En fait, la situation demeure très précaire et les responsables militaires américains ne s'attendent pas à une amélioration notable dans les prochains jours. De fait, le commandant des forces américaines en Irak, le général John Abizaïd, a laissé entendre, hier, qu'il allait demander à Washington des renforts n'excluant pas, par ailleurs, d'augmenter le niveau actuel des forces américaines déployées en Irak. Voici quelques jours, au plus fort de la bataille de Falloujah, le Pentagone avait déjà pris la décision de prolonger de 90 jours la mission de 20.000 soldats dont le contrat venait à terme à la fin du mois. Ainsi, le général Abizaïd n'exclut aucune alternative indiquant : «Si la situation en terme de sécurité s'aggrave et si nous estimons que nous devons faire venir plus de soldats, ou si des pays décident de retirer leurs troupes, nous ferons ce qu'il faut». Mais à l'évidence ce «qu'il faut» ne dit pas tout face à une situation qui n'a cessé de se détériorer depuis mars dernier, en fait, depuis le premier anniversaire de la chute du régime de Saddam Hussein, date qui a marqué une nouvelle dimension dans le conflit irakien. D'ailleurs devant le peu de succès des forces de la coalition à former une armée «autochtone» irakienne, prête à prendre la relève des forces d'occupation américano-britanniques, le chef de l'administration américaine en Irak, Paul Bremer, envisage sérieusement de rappeler au service d'anciens officiers supérieurs de l'armée irakienne, dissoute immédiatement après la chute de Bagdad. Dans une déclaration télévisée, Paul Bremer a indiqué en effet : «Le ministre de la Défense (du Conseil transitoire irakien) m'a informé de son intention de rencontrer la semaine prochaine des officiers supérieurs de l'ex-régime, dont les états de service ont été passés au crible, afin d'examiner la meilleure façon de reconstruire la hiérarchie militaire», soulignant : «La majorité de ces officiers ayant une bonne réputation, de l'ancienne armée et d'ailleurs, prendront du service dans les prochains mois (...).» De fait, de plus en plus de responsables américains estiment qu'ils se sont compliqués les choses en entreprenant une «débaassification» massive de l'administration et de l'armée irakienne, laissant ces deux piliers institutionnels, sans cadres qualifiés. Aussi, l'administrateur américain veut-il mettre un frein à la «débaassification» entreprise sous la houlette d'Ahmed Chalabi, (ancien agent des renseignements américains et président du Congrès national irakien, CNI, membre du Conseil de transition). Une «débaassification» qui aura surtout contribué à déstabiliser le pays le privant de ses cadres les plus compétents. De fait, il semblerait qu'Ahmed Chalabi et la majorité des actuels membres du Conseil transitoire du gouvernement irakien, n'ont aucune chance de figurer dans le futur gouvernement provisoire irakien qui aura à préparer les institutions d'un Irak démocratisé. A propos de ce gouvernement intérimaire, l'émissaire spécial de l'ONU pour l'Irak, l'ancien chef de la diplomatie algérienne, Lakhdar Brahimi, estime que sa mise en place «est faisable» indiquant, dans un entretien à la chaîne de télévision américaine ABC, que «l'échéance du 30 juin pourrait être respectée si nous avons (...) une coopération de chacun» admettant toutefois que «tout est compliqué. Tout est difficile. Le temps est certainement un problème». En effet, la date butoir du 30 juin impose une course d'obstacles pour, d'une part, maîtriser la situation sécuritaire, trouver les hommes devant mener le changement en Irak, d'autre part. Très difficile en effet.