Pendant des mois, seuls contre tous, Américains et Anglais ont seriné à la communauté internationale le prétendu danger, que constituerait, pour le monde, un Irak supérieurement armé et disposant, en outre, d'armes de destruction massive que, assure Tony Blair, Premier ministre britannique, Bagdad pouvait «déployer dans les 45 minutes». Trois mois après la fin de guerre, trois mois d'occupation de l'Irak, et de déploiement de 1500 experts, britanniques et américains, pour découvrir les fameux ADM, toujours rien. Wallou! Tout cela n'était que de la poudre aux yeux, mais permit aux Américains et aux Britanniques d'embarquer la communauté internationale sur le chemin de l'illégalité et de la loi du plus fort. Et c'est cette dernière, la loi du plus fort qui, en définitive, triompha du droit international, des règles et lois, de la même qualité, régissant les rapports entre les Nations, et de la Charte des Nations unies, réduite à un simple papier sans conséquence. En fait, depuis le 20 mars et l'attaque contre l'Irak, le monde vit dans l'illégalité, sous le régime de la loi du plus fort, nonobstant ce que peuvent affirmer le Conseil de sécurité, -première victime du coup de force américain-, analystes et observateurs. Les Américains voulaient la guerre, ils l'ont imposée à la communauté internationale. Aujourd'hui, même le chef des inspecteurs en désarmement de l'ONU, Hans Blix, dont le mandat s'achève le 30 juin prochain, l'avoue, «il n'y avait pas un début de preuve» dans les accusations américaines et britanniques contre l'Irak. Interrogé par la commission des Affaires étrangères de la Chambre des Communes, le chef de la diplomatie britannique, Jack Straw, reconnaît que l'arsenal nucléaire irakien constitue «un embarras pour la gouvernement», alors qu'un important expert en armes chimiques et biologiques du Département d'Etat américain, Christian Westermann, avoue devant la commission d'enquête du Congrès qu'il a subi «des pressions» afin de «changer ses analyses de renseignements sur l'Irak(...)» rapportait hier le New York Time. Après coup, la communauté internationale apprend par petites touches que le dossier des ADM irakiens était vide, strictement vide. Et la «détermination» du président Bush, à trouver les armes prohibées irakiennes, un tir d'arrière-garde qui ne convainc plus personne. D'autant plus que les Américains, aujourd'hui sur place en Irak, ne sont plus vraiment pressés de faire la lumière sur ces armes et se donnent toute latitude et temps nécessaire pour «(...) découvrir l'étendue véritable des programmes d'armements de Saddam Hussein, quel que soit le temps nécessaire», dixit George W.Bush. Un fantastique bluff, monté de toute pièce a mystifié le monde quant à l'existence des ADM, introuvables en Irak. Ainsi, le document britannique sur lequel s'est appuyé le secrétaire d'Etat américain, Colin Powell, au Conseil de sécurité, s'est avéré être le plagiat d'une thèse d'un étudiant, soutenue au début des années 90, et recopiée telle que, y compris ses fautes d'orthographe. Le document selon lequel l'Irak aurait engagé des contacts avec le Niger pour l'achat d'uranium, était aussi un faux, qui plus est c'est la CIA elle-même qui l'affirme, ce qui n'empêcha pas la Maison Blanche d'en faire état, appelant une mise au point du directeur de l'AIEA (Agence internationale de l'énergie atomique), Mohamed El Baradeï. A court d'arguments, le duo Bush-Blair, fit appel au pauvre José Marie Aznar, chef du gouvernement espagnol, trop heureux d'être sollicité par ces puissantes personnes, leur apportant son soutien et affirmant à son tour que «l'Irak maintient sa volonté de développer des armes de destruction massive», sans que, lui non plus, n'étaye ces accusations par des preuves fondées. Et voila M.Aznar qui rata une occasion de se taire se permettant de faire une incursion inopinée dans l'actualité internationale. Aujourd'hui, des sources proches des stratèges américains affirment que, même s'ils n'ont pas trouvé des armes de destruction massive en Irak, cela a, tout au moins, permis de déboulonner un dictateur. Certes! Cependant, il y avait d'autres moyens d'éliminer Saddam Hussein, et singulièrement il aurait été plus loisible que ce soit le peuple irakien qui se libère lui même. Car, qui parle de liberté pour les Irakiens, quand les Américains envisagent maintenant une présence indéterminée, sans doute à très long terme. Or, les prétendues armes de destruction massive dont disposerait l'Irak, n'étaient en fait qu'un énorme bluff, comme l'était le bluff irakien consistant à faire croire à cette réalité, alors même que l'Irak n'est jamais parvenu à reconstituer son programme nucléaire après la destruction de la centrale nucléaire de Tamuz (projet Osirak, au nord de Bagdad), par l'armée israélienne en 1981. Pour ce qui concerne les armes chimiques et biologiques, tout le monde sait qu'elles ont été détruites entre 1991 et 1998 par les inspecteurs de l'Unscom (Commission des Nations unies pour le désarmement de l'Irak, instituée par le Conseil de sécurité après la guerre du Golfe de janvier-mars 1991). Aussi, les Américains ont-ils monté en épingle cette peu croyable histoire des ADM irakiens parce que leurs intérêts supérieurs recommandaient la guerre comme unique solution pour le cas irakien. Le reste était secondaire, et il est probable que les ADM ne seront jamais trouvées, car vraisemblablement elles n'existent pas, ou plus, -si jamais elles ont été produites-, mais, il fallait d'abord frapper les esprits, faire peur en diabolisant un pauvre dictateur aux abois. Les intérêts et valeurs américains ont constitué dès lors un puissant levier pour mettre en branle tout un scénario qui s'est conclu par la chute de Saddam Hussein, et l'occupation de l'Irak, alors même que les causes invoquées pour justifier la guerre en Irak se dégonflent maintenant comme des baudruches. A quelques nuances près, le même scénario est en train de s'écrire pour l'Iran plus que jamais dans le collimateur des néo-conservateurs américains, le secrétaire d'Etat américain adjoint, John Bolton, n'hésitant pas à évoquer l'option militaire contre Téhéran. L'Empire américain ne cache plus que sa stratégie à terme est de mettre au pas l'ensemble des pays de la région dans la perspective de faire main-basse sur un Moyen-Orient gorgé d'or noir. Une denrée énergétique vitale pour les Américains. Et le contrôle de cette manne permet, du point de vue américain, tous les coups, y compris les plus tordus, aussi, le droit et les lois internationaux sont de peu de poids, en l'occurrence, face à la défense des intérêts américains. Et les Etats-Unis, comme ils étaient prêts à user des armes stratégiques contre l'Irak de Saddam Hussein, de même ils sont maintenant prêts à récidiver avec les ayatollah iraniens et à soumettre les nations de cette région à leurs diktat et intérêts, par l'utilisation de la force au besoin. Et c'est bien les Britanniques qui affirment, «il n'y a pas d'ennemis éternels, ni d'amis éternels, il n'y a que les affaires qui sont éternelles». Une maxime que l'empire américain, qui s'engage dans une politique de colonisation, a vite fait de faire sienne.