La situation est critique, quoique pas encore désespérée. La peste, de l'avis du ministre de la Santé, M.Abdelhamid Aberkane, gagne du terrain, et les mesures prises jusque-là pour la contenir se sont avérées vaines. Le ministre de la Santé, qui a présidé, hier, une réunion de huit walis de l'ouest du pays, n'a pas manqué, durant sa conférence de presse, de souligner que la décision de la levée de la mesure de quarantaine était inopportune et qu'elle aurait dû être maintenue pour éviter de voir le bacille se manifester dans d'autres localités de l'ouest du pays. M.Aberkane, qui s'était déplacé au lendemain de la découverte des premiers cas de peste bubonique à Oran, s'est dit sceptique, hier, au cours du point de presse, organisé en marge de la réunion de huit walis de la région ouest du pays. Il faut dire que l'ambiance, hier, au siège de la wilaya d'Oran n'était pas aux réjouissances. Cela sous-entend que des oreilles ont été sûrement tirées dans les coulisses. C'est ce qui explique les mines défaites affichées durant le point de presse animé par M.Aberkane. A Oran, depuis l'apparition de la maladie, on a tenté d'en réduire la portée en déclarant que seule la localité de Kehaïlia était atteinte de la peste bubonique. Or, depuis, le bacille qu'on n'a pas essayé de contenir au moyen de mesures prophylactiques sûres est sorti du périmètre de la zone affectée pour se «promener» à l'est et à l'ouest d'Oran. Aujourd'hui, la peste bubonique est signalée à Oran est et ouest et à Aïn Témouchent où deux cas sont signalés. Les autorités locales ont tenté de taire ces cas tout en essayant de rassurer la population locale grâce à des mesures sans grande portée. Hier, M.Aberkane a reconnu, implicitement, que la levée de la mesure de mise en quarantaine était précipitée et qu'il fallait attendre les résultats des tests micro-biologiques effectués dans la région de Kehaïlia, pour se prononcer. Le bacille a quitté le périmètre où il était censé évoluer pour aller toucher d'autres zones situées à des dizaines de kilomètres. Il est vrai que l'euphorie qui avait suivi la levée de la quarantaine avait aveuglé les autorités sanitaires de la wilaya qui avaient cru qu'en prenant cette mesure, la peste, allait être vaincue. Or les nouveaux cas signalés dans la wilaya sont là pour prouver à ceux qui croyaient que la peste pouvait être vaincue grâce à une mesure administrative, que la réalité est tout autre: aujourd'hui on signale 2 nouveaux cas à Aïn Témouchent, 5 à Tafraoui, 2 à Haï Khemisti, 2 à Mers El Kébir et 1 autre à Brédeah. La répartition géographique des affections laisse comprendre que le périmètre sanitaire au lendemain de l'apparition de la maladie n'a pas réussi à contenir la maladie qui s'est propagée à l'est de Kehaïlia, (Haï Khemisti) comme au nord (Mers El Kebir) où des millions d'estivants sont attendus. M.Aberkane avant le début de la rencontre avec les 8 walis de la région Ouest concernée par la peste, a laissé entendre qu'il était prêt à décider la mise sous quarantaine de toute cette zone. «L'essentiel pour nous est de vaincre cette maladie et nous ne reculerons devant aucune mesure pouvant nous aider à réaliser cet objectif», dira le ministre en marge de sa rencontre avec la presse. Il reconnaîtra que la levée de la mesure qui isolait Kehaïlia et sa région était inopportune et qu'aujourd'hui le salut passe par des mesures énergiques, même si elles sont impopulaires. Hier, à Oran, les experts de l'OMS venus de Tadjikistan devaient rencontrer les malades déclarés comme guéris et qui avaient quitté l'hôpital. «Ils doivent subir une série de tests pour déterminer si le schéma de traitement, utilisé à travers le monde est respecté», nous dira un médecin du CHUO avant de rentrer dans la salle de l'hémicycle bien gardé et des vigiles pour empêcher toute intrusion de journalistes. Oran, hier, ressemblait à une zone où il ne fait pas bon vivre. De quoi seront faits ses lendemains? Mais en attendant, un homme et une femme de la proche banlieue de Aïn Témouchent sont atteints de la peste, deux enfants voisins de la villa d'hôtes de la wilaya d'Oran (Khemisti) portent eux aussi les germes de la maladie, trois autres habitent le périmètre de la base de Mers El Kébir, c'est dire que le bacille du Yersin a quitté le périmètre dans lequel on voulait le confiner...