En plus de la grève, les avocats ont décidé de saisir le président de la République «Ce projet est une atteinte à la liberté de la profession de l'avocat. C'est une régression très grave!» «Au temps du parti unique, on avait plus de droits que ce que propose l´actuel projet», a déclaré Me Miloud Brahimi, en réaction au projet de loi présenté par le ministre de la Justice devant la commission des affaires juridiques et administratives et des libertés de l´APN. Une grève générale a été décidée à l´unanimité pour mercredi par l´assemblée générale extraordinaire convoquée, hier, à l´université de Bouzaréah par l´Union des bâtonniers d´Alger. Cela afin d´arrêter la position et les démarches à entreprendre par rapport à ce projet de loi. Ainsi, les cinq tribunaux de la cour d´Alger, une vingtaine des cours environnantes dont, Médéa, Bouira, Boumerdès, Blida, Tizi-Ouzou... La Cour suprême ainsi que le Conseil d´Etat seront ainsi paralysés mercredi prochain. A l´initiative du Conseil de l´ordre du barreau d´Alger, le bâtonnier Abdelmadjid Silini, n´a pas mâché ses mots quant aux inquiétudes qu´a suscitées ce projet de loi. Devant plus d´un millier d´avocats et avocates, le bâtonnier a exhorté ses confrères de la corporation des robes noires à dire d´une seule voix «non», car il estime que «ce projet est une atteinte à la liberté de la profession de l´avocat. C´est une régression très grave! Nous, qui croyions aller de l´avant». Unanimes donc, tous les avocats présents ont revendiqué d´une seule voix le retrait de ce projet portant organisation de leur profession. La raison: beaucoup de lois représentent une atteinte à la liberté de la profession d´avocat. Les articles contestés sont entre autres, les 09, 24, 124, 112, 116, 122, 131... A titre d´exemple, «les articles 9, 24 et 124 qui font référence à d´éventuels incidents qui pourraient survenir lors des audiences et dont se rendrait coupable un avocat en plaidoirie devant le juge», a expliqué Me Silini. En d´autres termes, certains articles de ce nouveau texte suggèrent la suspension pure et simple de l´avocat en attendant de le déférer devant le conseil de discipline. «Il risque une suspension tout simplement en s´élevant contre le non-respect des règles de la procédure. L´obligation sera faite désormais, à l´avocat, menacé de poursuite pénale, de ne pas se retirer d´une audience, même lorsque le déroulement d´un procès est biaisé», explique-t-on. Lorsque le bâtonnier est saisi par le procureur général sur le cas d´un avocat «il doit, à son tour, saisir le conseil de discipline qui doit statuer dans les deux mois de sa saisine», a encore indiqué Me Sellini précisant que «la Commission nationale de recours qui doit, elle aussi, statuer sur l´action disciplinaire dans un délai de deux mois, peut être à son tour, actionnée par le ministre de la Justice». Pour ces avocats, «le ministre est un élément extérieur à l´Ordre des avocats, donc son intervention n´a pas à avoir lieu». En fait, l´article 24 accorde tout simplement une certaine autorité disciplinaire au parquet et au ministère de la Justice sur les avocats. Par ailleurs, on conteste, un certain nombre de dispositions contenues dans le projet de loi. «Ces nouveaux textes conditionnent la possibilité de plaider pour un jeune avocat au niveau de la cour après sept ans d´exercice auxquels s´ajoutent les deux années de stage et deux années de Capa», regrette-t-on encore. Un autre point qui a soulevé l´ire de cette corporation sont ces «décisions et délibérations des assemblées» ainsi que «le conseil de l´Union et l´assemblée générale des barreaux» qui seront ainsi sous le contrôle du ministre de la Justice. Me Miloud Brahimi et M. Mustapha Bouchachi, ont fait de leurs intervention un discours fort d´économie de parole et un chemin à suivre. «Si l´on veut protéger l´avocat dans l´exercice de sa profession, l´objectif fondamental est de suspendre ce projet de loi», a estimé Me Brahimi. Sur un autre ton, Me Bouchachi a surtout attiré l´attention de ses confrères quant au rôle de l´avocat dans les sociétés qui se respectent. «Sachez mes confrères qu´on a déçu les Algériens car on n´a bougé que pour un statut qui nous concerne. Etre en retard est mieux qu´être démissionnaire», a-t-il prévenu. «Cette fois-ci représente une chance à nous tous par rapport à l´opinion publique nationale et internationale. Alors on est tenu de rester unis», a-t-il conclu avant que près de 1400 avocats ne votent unanimement «pour» cette démarche. En plus de la grève, les avocats ont décidé de saisir le président de la République. Entre ces deux options, plane l´option d´une marche. «Accusé, levez-vous»!