Les révoltes arabes ont créé de nouveaux régimes et de nouveaux conflits. Elle ont surtout changé le paysage médiatique arabe et créé un nouveau marché, dominé jusque-là par Al Jazeera, Al Arabya et El Hurra. Selon les journaux arabophones paraissant à Londres, le milliardaire égyptien Naguib Sawiris, patron d´Orascom Telecom Holding a entamé des contacts personnels avec de grands noms de la télévision arabe pour lancer une nouvelle chaîne d´information en continu. Ce nouvel arrivant dans un paysage médiatique arabe pourtant saturé, aura son siège au Caire, où le climat est désormais favorable pour une véritable ouverture de l´audiovisuel après le succès de la révolte égyptienne et la fin du système Moubarak où tous les médias, sans exception, étaient étroitement contrôlés. Le patron d´Orascom possède déjà une chaîne de télévision en Egypte: une télévision de divertissement OTV, avec la célèbre star arabe Yousri Fouda. Naguib Sawiris, qui a fait partie du comité de la société égyptienne au lendemain de la chute de Moubarak, était considéré en Egypte comme le seul homme d´affaires égyptien réellement indépendant et non affilié au régime. Il est d´ailleurs bien parti pour créer avec certaines personnalités importantes du pays un parti politique libéral. Le premier responsable d´Orascom Telecom Holding, est en train de suivre le même chemin que Berlusconi en associant business, médias et politique. Sawiris ne souhaite pas avoir une nouvelle chaîne d´information copiée sur le modèle des médias satellitaires égyptiens, et notamment ceux du bouquet public NileTV, qui ont montré leur limite durant les révolutions arabes. Mais la nouvelle chaîne du groupe Orascom, souhaite concurrencer la chaîne qatarie Al Jazeera. Le milliardaire égyptien aurait laissé entendre qu´il veut une chaîne qui ne soit pas suivie seulement dans les limites des frontières de l´Egypte, mais partout dans le Monde arabe. Cette nouvelle orientation médiatique n´est pas le souhait de Naguib Sawaris seulement, c´est le voeu de nombreux hommes d´affaires et gouvernants arabes du Golfe pour se détacher de la mainmise d´Al Jazeera. La chaîne qatarie qui a su tenir tête à la concurrence des chaînes à capitaux saoudiens comme Al Arabya, pourrait bien être obligée, dans les mois à venir à concéder quelques-unes de ses parts d´un marché arabe de l´information où elle se voulait parfaitement hégémonique. Ainsi, la presse émiratie fait l´écho des intentions de l´émir Cheikh Mohamed Ben Rached Al Maktoum, vice-président et Premier ministre des Emirats arabes unis, également gouverneur de Dubaï, de lancer une chaîne d´information qui défendrait la réussite du modèle libéral et d´ouverture des Emirats. Un média qui serait voué, selon lui, à mettre en avant la particularité des pays du Golfe et leurs singularités. La situation au Bahrein et au Yémen, a créé une crainte chez certains pays de la région qui redoutent que la révolution arabe n´arrive à leurs portes. Ces deux nouvelles orientations médiatiques arabes venant d´un pays où le Printemps arabe a triomphé et de l´autre où la révolution est encore impensable, démontrent que nous sommes entrés dans une ère où les mutations politiques dans le Monde arabe commencent à connaître leurs premières répercussions sur le plan médiatique. Un domaine où les pays arabes sont les plus avancés, puisque plus de 38% des chaînes satellitaires dans le monde appartiennent à des capitaux arabes, alors que la population du Monde arabe ne représente que 5% du total mondial. [email protected]