Le succès de Djezzy, les rumeurs sur sa vente, l'affaire de la cimenterie de M'sila et le groupe Lafarge, les investissements en perspective d'OTH en Algérie, l'identification des puces anonymes et le transfert de technologie ont été abordés par Naguib Sawiris. Sans complaisance. “Nous allons créer l'institut Djezzy des technologies et Orascom entamera bientôt une campagne pour vendre l'image de marque de l'Algérie, un pays prometteur pour l'investissement et une destination pour le tourisme.” C'est Naguib Sawiris, P-DG d'Orascom Telecom Algérie, qui l'a annoncé lors d'une conférence de presse organisée mercredi dernier au siège du groupe au Caire, en Egypte. Les détails de ces deux initiatives seront rendus publics dans deux ou trois semaines à Alger. Cependant, Naguib Sawiris et Tamer El-Mahdi, DG de Djezzy, présent lui aussi à la conférence du Caire, ont tenu à préciser que la mise en place de l'institut est actuellement en discussion avec les autorités algériennes et qu'elle vise à transférer les technologies au profit des diplômés et cadres algériens dont la réputation pour leur rigueur a été encore une fois prouvée dans la réussite et le développement qu'a connus Djezzy depuis 2002 en Algérie. “Cet institut qui n'a aucun but lucratif permettra aux diplômés algériens d'avoir une meilleure maîtrise de leur formation afin de leur faciliter l'intégration dans le marché de l'emploi”, a précisé de son côté, dans une brève intervention, Tamer El-Mahdi. Hommage aux cadres algériens d'OTA Une réussite que Naguib Sawiris impute à la détermination des 15 000 Algériens qui travaillent dans les différentes filiales d'OTA. “Les cadres égyptiens, libanais ou européens se comptent sur les doigts d'une main”, a-t-il dit. Tout en émettant le vœu de rencontrer prochainement les responsables algériens afin de leur faire part des nouveaux projets d'investissement que compte entreprendre son groupe dans le pays, Naguib Sawiris n'a pas manqué de revenir sur les informations faisant état de la vente de Djezzy au profit d'un opérateur français. Si ce n'est pas la première fois que le patron d'OTH y répond, il a été encore plus loin en affirmant haut et fort : “Cette entreprise existe en Algérie, emploie des Algériens et paie ses impôts en Algérie. Djezzy n'était pas à vendre, encore moins Orascom Telecom Holding, je vais augmenter mes investissements en Algérie et Orascom sera là dans dix ans, dans vingt ans… Nous ne sommes pas pressés. Nous n'avons pas senti de changement dans l'attitude du gouvernement à notre égard.” “Nous considérons qu'Orascom est une partie intégrante de l'Algérie. Je dois vous dire que nous sommes très satisfaits de notre présence en Algérie. Malgré les mentalités ambiantes dans les pays arabes où les populations souffrent encore du complexe du colonisé, et Orascom a été victime de cette mentalité dans son propre pays qu'est l'Egypte. Notre réussite en Algérie a suscité des inquiétudes et des jalousies non seulement auprès des concurrents locaux mais aussi internationaux, dès lors qu'Orascom a opté elle aussi, les dernières années, pour l'investissement à l'étranger. Ce qui n'est pas fréquent dans les pays arabes où ce sont les Occidentaux qui viennent investir. Ils n'ont pas de solutions magiques. Orascom est parti à l'étranger pour conquérir d'autres marchés parce que le marché égyptien est devenu petit pour le groupe. Alors, nous sommes partis en Grèce et en Algérie. Aujourd'hui, nous avons quelque 20 millions d'abonnés avec ces deux pays. Les filiales du groupe Orascom emploient quelque 90 000 personnes en Egypte, où il est considéré comme le premier investisseur”, explique le président d'Orascom Holding avant de revenir longuement sur les raisons qui ont motivé son groupe à investir en Algérie, malgré “la situation difficile” que le pays connaissait à l'époque. Le choix de l'Algérie était une question de défi… “Nous avons décidé d'investir en Jordanie, au Pakistan, en Tunisie et en Algérie. Mais, en Algérie, il était question d'un défi. Nous sommes arrivés dans ce pays dans des circonstances où le pétrole n'était pas cédé au prix actuel et où le climat de l'investissement n'était pas qualifié de favorable comme il l'est aujourd'hui, en raison de la menace terroriste”, ajoute Naguib Sawiris. Plus loin, et avant de souligner qu'à l'époque, “les observateurs ont qualifié le choix d'Orascom de l'Algérie d'aventure”, Sawiris revient sur les conditions d'acquisition de la licence. “La procédure s'est déroulée dans la transparence avec un appel d'offres et une ouverture des plis en présence d'un représentant de la Banque mondiale”, a-t-il indiqué, avant de rappeler : “Nous avons proposé le double du prix proposé par France Télécom, et je dois rappeler ce fait pour lever toute équivoque. 700 millions de dollars.” Naguib Sawiris précise par ailleurs qu'Orascom n'est pas seulement une entreprise égyptienne mais beaucoup plus une multinationale puisqu'elle comprend des actionnaires américains, anglais et allemands. En évoquant les conditions de l'installation d'OTH en Algérie, Sawiris affirme n'avoir pas été étonné par la réaction de l'opinion publique algérienne qui, selon lui, voyait mal comment un opérateur arabe allait tenir ses engagements et développer la téléphonie mobile. “Mais, aujourd'hui, je dois le dire haut et fort, l'Algérie a fait entrer Orascom dans le cercle des grands puisque la réussite de ce groupe a été boostée par le succès de Djezzy en Algérie. On ne peut pas parler d'Orascom Tunisie ou au Pakistan. La réussite d'Orascom n'a jamais été égalée ailleurs. Elle l'a été en Algérie”, affirme le patron d'OTH. Cap sur le transfert de technologie “La privatisation ne signifie pas seulement le profit financier. Elle veut dire aussi la création d'emplois, la formation des ressources humaines et le transfert de technologie. Les IDE entraînent forcément de nouvelles idées, contribuent à l'ouverture des jeunes cadres algériens aux nouvelles méthodes de gestion et de management”, a souligné Naguib Sawiris qui entend étendre les activités de son groupe à plusieurs pays. “Nous venons d'avoir une licence au Canada et les mêmes rumeurs sur l'aventure et l'échec imminent fusent de la part de ceux qui ne veulent pas voir un groupe arabe de télécom concurrencer des géants européens du secteur”, a fait remarquer Naguib Sawiris. Djezzy, une meilleure preuve pour les IDE Lors de la conférence de presse, le patron d'OTH n'a pas manqué de revenir sur les investissements directs étrangers en Algérie (IDE) en affirmant que “Djezzy est la meilleure preuve que puisse brandir le gouvernement pour prouver qu'il est possible d'investir et de réussir en Algérie”.Tout en relevant qu'un investisseur étranger ne vient pas dans un pays pour perdre de l'argent, Sawiris s'est interrogé si Djezzy avait échoué, OTH aurait-elle eu toute cette popularité ? “Je ne le crois pas”, a-t-il répondu. Sawiris et le conseil d'Amar Tou À une question sur les garanties qu'aurait obtenues OTH pour investir en Algérie, Sawiris a nié en avoir reçues, mais il a cependant reconnu que les engagements signés ont été respectés par les autorités algériennes. “C'est l'un des rares pays où les choses se sont déroulées sans entraves.” Sawiris a saisi cette occasion pour rendre hommage à l'ancien ministre de la Santé Amar Tou. “Il nous a aidé avec ses conseils, surtout pendant la campagne pour la présidentielle de 2004 où Djezzy a été au centre d'attaques entre partisans du candidat Benflis et le président candidat Bouteflika. Il m'avait dit, ton seul avocat c'est ton travail, ne réponds pas aux critiques. Seul ton travail parlera. Et j'ai suivi ce conseil qui m'a été d'une extrême importance dans la conduite du développement de l'entreprise”, a-t-il reconnu. Lafarge s'invite au Caire Inévitablement, le dossier de la cimenterie de M'sila et Lafarge a eu sa part à la conférence de presse. Ainsi, en tant que membre fondateur du groupe Orascom, Naguib Sawiris a répondu à la question d'un journaliste sur cette affaire. “Il a été dit que mon frère a vendu la cimenterie à Lafarge. C'est faux, mon frère n'a jamais vendu la cimenterie à Lafarge mais il a transformé toutes les parts qu'il possède dans toutes les cimenteries au Pakistan, en Irak, au Nigeria, une vingtaine de cimenterie dans le monde, pour entrer en actionnaire à 20% dans un premier temps, une part qui sera réévaluée à la hausse dans trois ans. Mon frère n'a d'ailleurs pas touché de chèque”, a-t-il déclaré en guise d'explication. “Je suis content de m'être débarrassé d'abonnés qui nuisent à l'Algérie” Concernant l'opération d'identification des puces anonymes, notamment le fait que Djezzy ait perdu des abonnés, Naguib Sawiris a eu cette réponse claire : “Je préfère perdre un abonné terroriste car je n'accepte pas que mon réseau soit utilisé par des gens qui veulent nuire à l'Algérie, non seulement par le terrorisme mais par toutes autres activités de contrebande.” Et de conclure : “J'ai donné des instructions fermes au DG de Djezzy Tamer El-Mahdi pour accélérer l'opération, même si cela a coûté beaucoup d'argent. Je ne peux accepter que des abonnés nuisent à l'Algérie.” S. T. Lire tout le dossier en cliquant ici