Les islamistes du parti dissous comptent déséquilibrer les autorités en s'attaquant à leur point le plus fragile. Il y a deux jours, le n°1 et porte-parole du parti dissous, Abassi Madani, a rendu visite à Farouk Ksentini, président de la Commission algérienne pour la protection et la promotion des droits de l'Homme. Selon les proches de Abassi Madani, celui-ci a tenu à exprimer à Ksentini ses remerciements pour ses «positions honorables» affichées depuis plus de six mois et partant sur «le respect des droits des leaders du FIS emprisonnés». Le septuagénaire leader du parti dissous a saisi l'occasion de relever «le caractère anachronique des dix interdits» signifiés aux deux chouyhoukh, et qui sont l'émanation d'une loi concoctée en 1986 pour museler une opposition politique en 2003. Le chef de file de l'islamisme politique en Algérie s'est dit «étonné» par ces lois «ajustées» aux leaders qui ont été emprisonnés dans des «circonstances troubles» et qui ont «purgé la totalité de leur peine», ce qui, aujourd'hui, donne à celle-ci «le caractère de la chose jugée». Farouk Ksentini s'est montré, selon nos sources, disposé à étudier avec les autorités les doléances du cheikh, en même temps qu'il a réaffirmé ses positions résolues de toujours activer pour le droit, et le droit seul, soit respecté et promu au rang des priorités en Algérie. La commission des droits de l'Homme présidée par Farouk Ksentini a été installée par le Président de la République, Abdelaziz Bouteflika, au lendemain de son investiture, mais n'a pas été une institution «malléable». Ksentini a notamment brillé par une critique courageuse et publique, lancée à l'endroit des autorités algériennes, dont il a dit qu'elles «ne s'illustrent pas par leur respect du droit», et a été impitoyable contre ceux qui, «au centre même du pouvoir, font fi du droit du citoyen». Ksentini s'est aussi exprimé sur la libération des deux leaders du parti dissous, bien avant le 2 juillet en affirmant que les autorités devaient relâcher les deux prisonniers après expiration de la durée de détention et devaient leur préserver «tous leurs droits». Confinés dans la stratégie sécuritaire du «tout-préventif», les leaders du parti dissous comptent déséquilibrer les autorités en attaquant celles-ci sur le point le plus fragile, c'est-à-dire le respect des droits de l'Homme. En contraignant leurs chefs à observer le silence et à se soumettre aux décisions prises à leur encontre, les privant de leurs droits civiques et politiques, les leaders du FIS, notamment ceux vivant à l'étranger comptent saisir le plus grand nombre d'ONG et d'institutions politiques internationales, afin de mettre au pied du mur les autorités algériennes et de les faire passer pour «les nouveaux responsables» de cette impasse politique. Pour l'instant, l'actualité et le développement des événements politiques n'ont pas encore démontré l'efficacité de pareils stratagèmes, mais il est d'ores et déjà certain que les autorités, en jouant sur le caractère «préventif» des sanctions prononcées à l'encontre des deux leaders du parti dissous, ont longuement compromis les chances des deux chouyoukh de camper le rôle «de victimes de s engendrées par des groupes qui ont activé dans la périphérie de l'ex-FIS».