La migration, naguère un moyen de prospérité pour les pays occidentaux, est devenue aujourd'hui un fléau à combattre. Le controversé projet de loi sur l'immigration du ministre français de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, va passer dans les jours qui viennent devant la Chambre des sénateurs. Une fois adoptée par cette deuxième Chambre du Parlement français où la droite détient aussi la majorité, la loi sera effective après promulgation bien évidemment. Toutes les projections donnent à penser que le texte va passer sans encombres l'écueil du Sénat où les résistances ou les éventuelles réserves sur le document sont fort négligeables. L'Assemblée nationale, la première Chambre de l'édifice législatif de l'Hexagone, a voté elle en première lecture, à la fin de la semaine dernière, ce projet de loi visant théoriquement à lutter contre l'accroissement de l'immigration clandestine dans le pays. Certes, durant le débat sur le sujet, un semblant de consensus s'est dégagé entre les partis politiques toutes tendances confondues, pour réformer la fameuse cause de la double peine que subissait l'étranger emprisonné. En revanche, sur le régime des attestations d'accueil des étrangers, la polémique a été vive avec les partis de l'opposition de gauche. Mais, les députés ont avalisé les mesures de durcissement du ministre de l'Intérieur qui s'est particulièrement investi dans ce volet depuis des mois. Ainsi, le projet de loi institue des procédures de contrôle et de responsabilité pour les hébergeants. Le maire, dont dépend désormais la délivrance de ce document, peut refuser cette dernière si les «conditions matérielles d'un hébergement normal ne sont pas remplies», et s'il soupçonne une «volonté de fraude». De plus, l'Office des migrations internationales (OMI) et les «services sociaux des communes» pourront visiter aux fins de contrôle le domicile de l'hébergeant qui devra, de surcroît, payer 15 euros par personne hébergée. Il devra également s'engager à prendre en charge les frais de séjour et de rapatriement au cas où l'étranger ne pourrait pas le faire. De son côté l'étranger devra présenter une attestation d'assurance «pour les soins médicaux qu'il pourrait engager durant son séjour.» Parmi les autres nouveautés du texte de loi, le titre de séjour est supprimé pour les ressortissants de l'UE. Mais pour les non-communautaires, la carte de résident de 10 ans est accordée après 5 ans de présence légale et effective en France, au lieu de 3 ans précédemment. En outre une «bonne intégration» s'ajoute aux autres conditions (activité professionnelle et intention de s'installer durablement). La création d'un fichier d'empreintes digitales à partir des demandes de visa déposées par les postulants à un séjour en France, l'allongement de la durée maximale de rétention administrative des étrangers en situation irrégulière, qui passe de 12 à 32 jours, et le renforcement des peines contre les passeurs ou transporteurs d'immigrants clandestins sont les autres modifications apportées aux textes qui présidaient jusque-là à la venue et au séjour des étrangers dans l'Hexagone. Mais anticipant sur ce qu'elle considère comme des dérives «sécuritaires» et «liberticides», l'opposition de gauche, notamment le Parti socialiste, souhaite une autre réflexion sur le sujet et plus particulièrement sur l'idée longtemps tabou en France, des «quotas migratoires» qui semble faire son chemin dans ce courant politique. Il est vrai que malgré ces législations contraignantes, le bilan de ces dernières années en la matière montre que la restriction des droits des immigrés en France et en Europe n'a pas permis la maîtrise des flux migratoires. Bien au contraire, les pays occidentaux s'alarment de plus en plus de découvrir qu'ils profitent largement de la traite d'êtres humains, asservis dans l'agriculture, les textiles ou la construction, une activité criminelle aussi lucrative que le trafic de drogue, un constat établi par le très officiel Bureau international du travail (BIT) dans une étude publiée en mai dernier. Aussi, l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (Osce) basée à Vienne et qui regroupe 55 Etats d'Europe, d'Asie et d'Amérique du Nord, prépare actuellement une offensive coordonnée, pour ne pas dire un plan d'action pour lutter contre ce fléau qui était, il n'y a pas si longtemps, un moyen de prospérité très recherché.