Des violences entre jeunes ont mis le feu aux cités d'Alger Baraki ou le Bronx aux portes d'Alger. On n'est pas dans le quartier du Bronx de New York, mais à la nouvelle cité des 568 Logements de Baraki, une banlieue au sud-est de la capitale. Depuis 4 jours, une bataille rangée a éclaté suite à un fait anodin qui a mis aux prises trois groupes de locataires. «C'est une véritable guerre de houmas», nous a expliqué hier un groupe de jeunes rencontrés à l'entrée de la cité. Exténués et sous l'effet d'une nuit fort agitée, ces derniers se sont affalés sur le sol. Ce groupe de locataires issu de la localité de Baraki nie toute instigation des troubles faisant savoir qu'il «ne fait que défendre son territoire». «On n'a pas fermé l'oeil deux jours d'affilée», témoigne l'un des membres du groupe. «On n'est pas concernés par ce qui se passe ici depuis samedi dernier. Ce sont des gens de Chaâba (cité Mahieddine dans la commune de Sidi M'hamed) et ceux venus de la Carrière Jobert de Bab El Oued qui se livrent des batailles à l'aide de sabres, de couteaux et même des fusils-harpon et objets de chasse sous-marine», racontent-ils en laissant transparaître une certaine inquiétude. A quelques mètres de l'entrée de la cité où pullulent de nombreux immeubles on peut constater les immenses dégâts provoqués par les affrontements. Tout est sens dessus-dessous. La violence et le chassé-croisé des protagonistes ont laissé place à une sorte de trêve provisoire. C'est à se demander si on ne vit pas au Moyen-Age. Comment en est-on arrivé là? Une atmosphère électrique digne des guérillas urbaines régnait encore hier dans cette cité où vivent plus de 1 200 familles. Les ruelles séparant les immeubles sont jonchées de pierres, de débris de verre et de pneus brûlés. Des fenêtres de toute une rangée de bâtiments sont brisées. Les immeubles portent les traces d'impacts de cocktails Molotov. La boiserie de quelques fenêtres n'est qu'un amas de fumée noire. Le comble est qu'à l'origine de cette bataille, qui est loin d'être terminée, il n'y a qu'un geste insignifiant et banal imputé à un jeune locataire ayant déménagé de la cité Mahieddine. «Il a tenté d'arrêter par son intrusion avec sa moto une partie de football disputée par les gamins de la cité», témoignent les riverains. Il n'en faut pas plus pour déclencher une bataille rangée opposant deux groupes d'habitants d'un quartier. «L'esprit houmiste a failli conduire ces personnes jusqu'à s'entretuer», regrette une habitante du quartier. Nous apprendrons par la suite que les choses n'en sont pas restées là. Les hostilités ont été déclenchées par les locataires issus de Carrière Jobert aidés par des gens relogés venus de Bentalha et de la cité Mahieddine. Plusieurs personnes sont blessées dont certaines grièvement, racontent plusieurs habitants. «Une cinquantaine de personnes ont été sérieusement touchées. La plupart sont évacuées à l'hôpital Zemirli tandis que d'autres sont traitées sur place», disent-ils. A l'entrée de la cage d'escaliers d'un des immeubles se sont rassemblés de nombreux blessés. L'un deux a l'oeil droit sous pansement, stigmate de la violence des affrontements. Tenant sa tête entre les mains, torse nu, la victime refuse de se montrer devant les objectifs des photographes par peur des représailles. «J'ai été blessé à la tête par une pierre lancée depuis la terrasse de l'immeuble d'en face», tonne une des victimes visiblement furieuse. «Ils ont rameuté des renforts et ils nous ont chargés avec toutes sortes d'objets osant même nous attaquer à l'intérieur de nos domiciles», poursuit-il en avouant leur avoir rendu la monnaie de leur pièce. Et ce n'est pas terminé, confient-ils. «Cette nuit, nous allons leur régler leur compte», ont-ils promis, fous de rage. Alors qu'une tentative de faire revenir le calme était menée par les gendarmes avec l'aide d'un imam, «une autre descente punitive» d'habitants du quartier de la Carrière contre ceux de la cité Mahieddine est venue remettre de l'huile sur le feu. Le bilan de ces nouvelles violences fait état de plus de 40 véhicules incendiés...La riposte ne s'est pas fait attendre, les «victimes» se sont vengées poursuivant à leur tour leurs «agresseurs» jusqu'à l'intérieur de leur domicile. Les forces de l'ordre dépassées par ces événements...ont quitté les lieux, selon les informations recueillies sur place. Les pouvoirs publics sont interpellés pour sécuriser ce type de quartiers exposés à des rixes qui se transforment en bataille rangée. Fruit sans doute de nombreuses frustrations accumulées depuis trop longtemps.