La justice française a officiellement ouvert une enquête visant la nouvelle directrice générale du Fonds monétaire international (FMI) Christine Lagarde, pour «complicité de faux et de détournement de biens publics», a-t-on appris hier de source judiciaire. La commission d'instruction de la Cour de Justice de la République (CJR) a été officiellement saisie afin d'enquêter sur le rôle joué en 2008 par Mme Lagarde, alors ministre des Finances, dans une affaire juridico-financière liée à l'homme d'affaires, Bernard Tapie, a indiqué hier le parquet général près la Cour de cassation. Cette saisine de la CJR, seule instance habilitée en France à juger des ministres pour des faits commis dans l'exercice de leurs fonctions, était obligatoire après la décision prise le 4 août par cette cour d'ouvrir une enquête sur Christine Lagarde, 55 ans. La commission d'instruction, composée de trois magistrats de la Cour de cassation, procèdera à des investigations pour savoir si l'ex-ministre s'est rendue coupable de «complicité de faux» et «complicité de détournement de biens publics», délits passibles de dix ans de prison et de 150.000 euros d'amende. Pour hâter la fin de longues procédures et trancher un vieux litige concernant la vente par la banque Crédit lyonnais du groupe Adidas, ancienne propriété de Bernard Tapie, homme d'affaires à la réputation sulfureuse, Christine Lagarde avait choisi une justice arbitrale, c'est-à-dire une justice privée. Le jugement rendu en 2008 par cette instance a été favorable à Bernard Tapie qui doit ainsi personnellement empocher au moins 200 millions d'euros, provenant de fonds publics. Le parquet reproche à Mme Lagarde d'avoir recouru à cette procédure privée alors même qu'il s'agissait de deniers publics, d'avoir eu connaissance de la partialité de certains juges-arbitres et de ne pas avoir exercé de recours contre la sentence arbitrale. Les investigations promettent d'être longues et même si Mme Lagarde était renvoyée devant la CJR, un procès n'aurait probablement pas lieu avant plusieurs années. Depuis sa création en 1993, la CJR a examiné plus de mille plaintes et n'a jugé que six ministres.