Discrédit des participants et isolement de l'opposition: voilà au final ce à quoi ont servi les consultations politiques du mois de mai dernier. Deux mois après la fin des travaux de la Commission des consultations politiques, les observateurs de la scène politique s'interrogent sur l'utilité de cette démarche. «Ces consultations serviront plutôt à un changement cosmétique et esthétique», a estimé le politologue Mohamed Hennad. Lors d'une conférence-débat organisée récemment par la Laddh, M. Hennad a jugé que la commission manque de crédibilité et n'inspire pas confiance. Abdelhamid Mehri, ex-secrétaire général du FLN, a laissé entendre que le pouvoir a trompé l'opinion à travers cette commission. «Je n'aperçois aucune volonté de changement chez le pouvoir», a-t-il dit récemment dans une conférence. Le cas le plus illustratif de ce scepticisme reste celui de Bouguerra Soltani, président du MSP, dont la formation fait partie du gouvernement et qui soupçonne le pouvoir de jouer sur le temps. Il demande l'accélération des démarches pour entamer les véritables réformes. Cela renseigne sur le fait que cette démarche du pouvoir, boycottée par l'opposition, a fini par dissuader même ceux qui y ont pris part. En effet, du 21 mai au 21 juin 2011, 250 personnalités (politiques, associatives et/ou nationales) ont défilé devant la Commission conduite par le président du Sénat, Abdelkader Bensalah, pour remettre leurs propositions dans la perspective des réforme de l'arsenal juridique et législatif algérien. C'est dire que deux mois après c'est carrément le scepticisme qui a gagné les esprits, y compris de ceux qui y ont participé et qui sont au pouvoir. Mais au-delà de toutes les considérations, les observateurs estiment que ces consultations, ont permis au système politique de «gagner du temps et mater dans l'oeuf toute contestation populaire porteuse de revendications politiques». Ce qui aurait donné raison aux boycotteurs des consultations ayant estimé à l'époque qu'il ne s'agissait que d'une diversion. Le credo qui enlève toute substance à des mouvements de protestations politiques était d'engager des réformes qui touchent à tous les secteurs. Selon toujours les observateurs, les consultations ont jeté le discrédit sur les participants. N'entend-on pas à l'époque déjà des «Il cautionne la démarche», «Il s'est décrédité», à chaque fois qu'on annonce la participation d'un parti, d'une personnalité ou d'une organisation du mouvement associatif. Certains parmi ceux qui avaient un brin de crédibilité l'ont perdu à cette occasion. Autre pari réussi du système à travers ces consultations: l'isolement de l'opposition et son exposition à la vindicte populaire, au point où des ministres contestaient publiquement l'algérianité des opposants. Mais la plus grande imposture, c'est la nature de ces consultations «C'est de l'esbroufe», estime-t-on. Et pour cause, le pouvoir a déjà enterré ses promesses et oublié ses engagements. Dans son discours du 15 avril 2011, où il a annoncé le train de réformes, le chef de l'Etat a annoncé la dépénalisation du délit de presse. La majorité des parties qui se sont rendues dans la salle de consultations de Bensalah ont salué la démarche avant de l'approuver et demander la dépénalisation totale de ce délit. Le pouvoir a trouvé la parade. D'abord, en infligeant une forte amende aux journalistes dans le cadre de la révision du Code pénal, puis en maintenant tout simplement la peine de prison dans le Code de l'information. C'est dire que le pouvoir a initié les consultations tout en ayant déjà élaboré sa stratégie. Histoire de faire croire un moment à une volonté de changement dans un contexte régional explosif et national bouillonnant. Cependant dans un pays où de hauts responsables, notamment ceux élus ou cooptés, se comportent comme des monarques et non tels des citoyens élus par des citoyens, cet état de fait n'étonne pas.