A quelques jours de l'Aïd El Fitr, les familles s'affairent déjà aux achats nécessaires pour la circonstance. La liste est longue pour égayer la table qui recevra les invités. Elle l'est également pour les placards d'où sortiront les nouveaux habits des enfants. La joie devra, coûte que coûte, se dessiner sur les visages de la progéniture. Mais, les parents n'oublient pas que les achats du mois de Ramadhan sont passés par là. Les dépenses de la rentrée scolaire, aussi, ne peuvent point être occultées. La bourse, déjà réduite suite à un long et lent mois de Ramadhan, devra pouvoir affronter l'Aïd El Fitr la rentrée scolaire, la rentrée sociale, et ce qui reste des fêtes de mariage qui reprendront certainement dans quelques jours. Gérer pareille situation, pour l'écrasante majorité des familles, est un exercice hyper angoissant. Les appréhensions apparaissent déjà dans les discussions avec les pères et mères de famille. A Tizi Ouzou, les habitudes risquent de subir de profonds changements. Les réflexes d'achat des années précédentes n'ont certainement plus cours. Aujourd'hui, les familles ne trouveront plus les habits sur les trottoirs. Les commerces informels étant démantelés, elles devront composer avec les commerçants réguliers. Les magasins seront leur seul recours. «Cette année, je crains vraiment ne pas pouvoir satisfaire mes enfants. Je crois que les propriétaires des magasins augmenteront les prix. Ils prendront leur revanche nous qui les avons ignorés au profit de trabendistes durant de longues années», ironise une dame rencontrée dans un magasin. Ainsi et, contrairement à un passé récent, les effets vestimentaires ne seront pas étalés à même le trottoir. Les autorités ont nettoyé ces espaces occupés par le commerce informel. Un fait qui a largement satisfait la population pour l'insécurité qui va avec ces pratiques incontrôlables. Mais, il semblerait que les pouvoirs publics n'ont pas pensé aux avantages que procurait ce commerce pour les familles modestes. «Eh oui, c'est bien de combattre le commerce informel mais, qui peut contrôler les magasins qui pratiquent des prix exorbitants au nez des contrôleurs?», s'interroge un père de famille à Tigzirt. La différence, rien que pour l'habillement enfant, est criarde. Les magasins vendent très cher. «C'est énorme comme différence. Chez les trabendistes, j'achetais pour mes enfants avec 4000 DA, mais ici, comme vous le voyez, j'en aurais pour pas moins de 20.000 DA. Que restera-t-il de mon salaire et des dépenses de l'Aïd et la rentrée scolaire?», s'interroge une enseignante, mère de famille. «Je crois que cette année, les enfants auront à choisir entre les achats de la rentrée scolaire et ceux de l'Aïd». «C'est impossible de faire face à autant de dépenses. Un salaire de 100.000 DA ne suffirait pas», affirme une autre dame dans un magasin à Tizi Ouzou. La tournée dans les magasins permet aussi de constater que les citoyens sont en train de tâter le terrain. «Beaucoup de monde vient juste pour s'informer des prix. Les gens sont vraiment alarmés à l'approche de l'Aïd. Leur bourse a déjà été vidée par les dépenses du Ramadhan. La rentrée scolaire est également une autre source d'angoisse» nous explique un commerçant au centre-ville de Tizi Ouzou. Cette année, le constat vient des propriétaires des magasins, les populations n'achètent pas beaucoup. L'Aïd semble s'estomper devant la rentrée scolaire. «Il semblerait que les gens commencent à comprendre le sens des priorités. Moi, personnellement je préfère acheter des habits pour la rentrée et les articles scolaires plutôt que des dépenses sans intérêt de l'Aïd et du mois de Ramadhan», affirme Ali, un enseignant dans un lycée. La tendance à l'achat irréfléchi est en effet en baisse. Enfin, une chose est sûre: les achats coûteront plus cher. La disparition des trabendistes même si elle a emporté avec elle l'insécurité qu'elle engendre, a été suivie par l'augmentation des prix. Le contrôle sur le commerce légal risque d'être plus ardu qu'il ne le paraît. Signe de cette difficulté: les trottoirs sont encore occupés par les commerçants qui ne respectent pas les consignes des services de contrôle de la wilaya. Pourtant, ordre leur a été donné de quitter les trottoirs.