C'est un concert de musique indienne bien particulier que l'Etablissement Arts et Culture a présenté mercredi et jeudi soir. C'est au milieu de « la nature », un décor végétal - des plantes posées çà et là sur scène - qu'apparaît la chanteuse-concertiste indienne Shrimati Anita Roy, flanquée de ses deux acolytes de musiciens Marie Courvoisier, joueuse de tempoura et Nabankur Bhattacharya à la tabla. La gandharva veda, la musique qu'elle chante est censée ramener le calme et la quiétude dans l'âme. Bizarrement, sur l'affiche le concert est prévu pour 19h et sur les invitations c'est 20h. Or, la chanteuse s'amène avec plus d'une heure de retard. Que cela soit une demi-heure, ça passe mais plus...Pour accéder à l'harmonie, l'équilibre et la paix intérieure, faut-il d'abord souffrir? C'est à ce stress accumulé que la chanteuse devra s'accommoder et s'employer ainsi à neutraliser chez le public. «Salam alaïkoum, dit-elle en substance, avant d'ajouter fièrement: c'est un grand plaisir d'être parmi vous ce soir. C'est un grand privilège de présenter la musique gandharva veda en Algérie. Ce soir, j'ai choisi d'interpréter le «raga bihag» lequel a la qualité de charmer l'esprit et le coeur». Enveloppée dans un sari mauve, Anita Roy et son acolyte, la blonde, vraisemblablement une ex-baba cool psychédélique affichent une mine sereine et radieuse. Anita Roy s'apprête à traduire les rythmes et les mélodies de la nature. Ce à quoi tend la musique gandharva. Aussi, module-t-elle sa voix selon la «fréquence et l'atmosphère de l'heure » en l'occurrence celle de la nuit. Sa voix belle, «sonore» et captivante suffit à être elle-même un instrument de plaisir. D'ailleurs le tempoura fait office d'un simple fond d'ambiance. Celle qui le joue se contente d'y passer gentiment ses doigts, les yeux tout au long fermés, noyée dans ses phantasmes. C'est Anita Roy, chose étonnante, qui lui accordera son instrument lors d'un autre raga. A croire que Marie ne sait que le caresser dans le sens du poil sans savoir le pratiquer correctement. A l'apparence prostrés ou méditatifs (c'est selon), les yeux fermés et la tête en arrière, étaient les spectateurs dans la salle. Quoique étrangère à notre culture, cette musique était loin de nous rappeler Djanitou, ces musiques rythmées qui vous entraînent à danser, quoique traditionnelles ou encore celles branchées qui sont à la mode actuellement et assaisonnée à la sauce hip-hop. Relaxante peut-être pour certains. Ennuyeuse peut-être pour d'autres. On se pose en tout cas la question. Soporifique ou «regéneressante», cette musique, la gandharva veda gagnerait à être écoutée non pas dans une salle de spectacle mais plutôt chez soi ou dans un cercle intime plus propice à s'en imprégner sérieusement. Cela étant, ceci n'occulte en rien les qualités vocales de l'artiste et l'effet bénéfique déstressant déjà prouvé scientifique par ce «son».