La patrie des droits universels se bat pour bafouer celui du peuple sahraoui à décider de son destin. Ce qui n'était que rumeur vient de se confirmer. Rafarin, le Premier ministre français, en visite au Maroc, a officiellement mis en avant «la concordance de vue et de positions entre Paris et Rabat à propos de la question du Sahara occidental». Le responsable français a sans doute mûrement pesé le sens et la gravité de cette déclaration avant de la faire. La France, qui a toujours tout fait pour être à l'avant-garde des combats humanitaires et démocratiques est en train de soutenir les vélléités colonialistes et expansionnistes du Royaume chérifien. Les observateurs estiment que Paris, à travers cette action, cherche surtout à servir ses intérêts économiques. En effet, faisant fi du droit international, le Maroc a commencé à accorder des concessions à des compagnies pétrolières françaises au niveau du Sahara Occidental. La France, comme le Maroc donc, «refuse que le peuple sahraoui décide seul de son destin à travers un référendum prévu dans les cinq années à venir suivant le plan Baker, représentant personnel de Kofi Annan et ancien secrétaire d'Etat américain indiquent des sources diplomatiques à Alger». Raffarin a admis, à mots à peine déguisés, que son pays est au service du Maroc au niveau du conseil de sécurité de l'ONU. L'agence de presse anglaise Reuters a confirmé hier, citant des sources diplomatiques, que la France oeuvre avec acharnement à empêcher l'adoption de cette résolution lors d'une réunion du conseil de sécurité de l'ONU prévue ce jeudi. Les concessions faites au Royaume sont pourtant énormes puisque durant tout ce temps, il exercera de très larges pouvoirs sur la Rasd (république arabe sahraouie et populaire) et aura même tout le temps nécessaire pour mener campagne en faveur de l'annexion de ce territoire. Le président de la commission de l'APN des affaires étrangères, Sadek Bouguettaya, invité récemment de notre rubrique «A coeur ouvert avec L'Expression», nous avait livré ces informations en exclusivité en indiquant que la France était en train de tenter de bloquer le plan Baker. Paris, qui roule ostensiblement pour Rabat, a déjà pris langue avec les représentants de près d'une dizaine de pays membres permanents ou non du conseil de sécurité. La France a ainsi entamé une course contre la montre aux fins d'obtenir un vote négatif de la résolution proposée par James Baker et soutenue aussi bien par Washington que par le Polisario. Si Paris agit de la sorte, estiment des sources diplomatiques, c'est qu'elle n'a pas intérêt à ce que les choses s'enveniment dans la région du Maghreb alors que le Maroc, dont le comportement colonialiste n'est un secret pour personne, n'hésitera pas à pratiquer de nouveau la politique du fait accompli en défiant le conseil de sécurité de l'ONU et en maintenant sa présence militaire sur des territoires qui ne lui appartiennent pas. Désormais, selon des sources diplomatiques basées aux USA, le conflit est ouvert entre les Américains et les Français. Contrairement aux positions nobles de Paris relatives à la guerre contre l'Irak, il ne fait aucun doute que cette fois-ci Jacques Chirac va se retrouver seul contre tous, puisque les préceptes mêmes et principes fondateurs de l'ONU reposent sur des propositions comme celle de Baker. Les Américains, croit-on savoir, auraient même réagi de manière sarcastique à la menace française d'opposer son veto. Les Américains, dont la puissance tant diplomatique que militaire n'est plus à faire, ne devraient pas trouver beaucoup de mal à faire triompher leurs thèses, d'autant que le droit et la morale, cette fois-ci, sont intégralement de leur côté. La France, en revanche, laisse beaucoup de plumes dans cette affaire après avoir vu son prestige grandir auprès de la communauté arabe et musulmane concernant ses courageuses et justes positions sur la guerre contre l'Irak.