L'ancien Premier ministre entre dans l'arène de la présidentielle. Comptera-t-il dans le jeu ou sera-t-il un simple lièvre ? Un appel a été lancé à partir de Béjaïa pour la constitution d'un comité de soutien à la candidature de Hamrouche à la prochaine présidentielle. L'appel, paru en tant que publicité dans un quotidien national, invite l'ancien Premier ministre à présenter sa candidature. Loin d'être innocente, cette invitation est sans doute l'inspiration de l'entourage même de Mouloud Hamrouche, qui lance à travers un placard publicitaire un ballon-sonde, annonciateur d'un début de campagne qui ira crescendo avec la rentrée sociale. Cela étant, les observateurs de la scène nationale s'interrogent sur le choix de la ville d'où Hamrouche annonce, quoique timidement, son retour sur le terrain politique. L'un des éléments de réponse tiendrait dans le fait que cette ville n'est acquise à aucun candidat en lice. En effet, ni Bouteflika ni Benflis ne peuvent prétendre ratisser large dans une région traditionnellement réfractaire au courant nationaliste. Plus que cela, l'annonce, même indirecte, d'une candidature depuis la Kabylie permet d'éviter les interférences qui peuvent être nuisibles dans d'autres régions du pays. C'est donc en «eau calme» que Hamrouche compte mener sa «barque présidentielle», du moins avant le début des grandes hostilités qui, faut-il le signaler, ont déjà cours entre les deux plus importants candidats à la présidentielle, à l'est comme à l'ouest du pays. C'est ainsi que l'on peut parler d'une stratégie de campagne qui semble différente de celles de Bouteflika et de Benflis, ces derniers étant déjà passés à la vitesse supérieure. En fait, l'ancien Premier ministre, à la différence de Bouteflika et de Benflis, ne dispose pas d'un appareil politique pour faire sa campagne et encore moins de relais solides dans ce cercle des décideurs qui l'ont déçu plus d'une fois. En effet, depuis sa démission de son poste de Chef du gouvernement en juin 1991, en pleine agitation islamiste, Mouloud Hamrouche n'a plus occupé de poste de responsabilité. Son nom a circulé en 1995, à l'occasion de la première élection présidentielle pluraliste qui a porté Zeroual au pouvoir. L'homme, alors membre de la direction du FLN, a décliné de ses partisans arguant le fait qu'il ne se présenterait jamais contre un candidat de l'ANP, laquelle ne l'avait donc pas choisi pour prétendre à la magistrature suprême. Quatre ans après, l'ancien Chef du gouvernement annonce sa candidature à la présidentielle d'avril 1999 et a concouru aux côté de six autres candidats. Ayant passé avec brio le stade de collecte de signatures (75.000), les observateurs y avaient vu un discret soutien des décideurs, voire le poulain des généraux. Mais il n'en fut rien, puisque Hamrouche s'est retiré en même temps que cinq autres candidats à la veille de la tenue de l'élection. Avant cela, lors d'une campagne marathonienne, il s'est allié l'aile réformiste du FLN qui a fait campagne pour lui et l'a même encouragé à créer un parti. Mais sitôt l'élection passée, l'homme retourne à son mutisme et ne fait que de très rares apparitions publiques. Après plusieurs années de silence donc, Hamrouche annonce son retour dans un climat politique qui n'a rien à voir avec celui de 1999. Il aura à affronter deux candidats qui se «disputent» le FLN, déjà expurgé de la majorité de ses militants réformistes acquis à ses idées. Autant dire que les partisans de Hamrouche devront réinventer une structure à même de donner une assise populaire à un discours qui n'a certes pas perdu de sa pertinence, mais qui tombe dans une conjoncture où la surenchère et autres scandales sont susceptibles de le rendre quelque peu minoritaire. En termes de chances, Hamrouche conserve certains relais dans la société civile qui peuvent, le cas échéant, lui permettre d'assurer la collecte des 75.000 signatures nécessaires à la validation de sa candidature. Il peut même obtenir un score honorable en termes de voix. Mais en l'absence d'une formation politique solide, les observateurs ne lui prédisent pas un grand succès face à un Djaballah, fort de son parti, un Taleb Ibrahimi qui a la sympathie de la base de l'ex-FIS, un Benflis de plus en plus populaire et un Bouteflika aux ressources insoupçonnées. En fait, Hamrouche entre cette fois dans une arène autrement plus dangereuse. Il aura bien du mal à tirer son épingle du jeu. Cela dit, on ne sait pour le moment pas grand-chose de sa stratégie de campagne. Epatera-t-il les Algériens? L'avenir nous le dira.